«Si quelqu’un pleure, pleurons avec lui ; s’il rit, réjouissons-nous avec lui (cf. Rm 12,15). Ainsi, la croix est partagée et les épaules se pressent pour la porter. La joie est multipliée et de nombreux cœurs y ont part. Se faire un avec le prochain est un moyen, le meilleur moyen pour se faire un avec Dieu, car, dans cette charité, se fondent les deux premiers et principaux commandements.

Nous faire un avec le prochain pour l’amour de Jésus et par lui, jusqu’au moment où, doucement touché par l’amour de Dieu en nous, il en viendra à se faire un avec nous dans un échange de projets, d’idéaux, de sentiments et de biens. Jusqu’à réaliser les conditions pour que le Seigneur puisse dire de nous : « Là où deux ou trois se trouvent réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux » (Mt 18,20). Il faut donc que nous nous fassions un au point de nous assurer, dans la mesure du possible, de la présence de Jésus, et avancer toujours ainsi dans la vie, petite église en marche, à la maison comme à l’école, à l’usine comme au parlement. Avancer dans la vie comme les disciples [82] d’Emmaüs, avec ce troisième personnage parmi nous qui donne une valeur divine à chacune de nos actions.

Alors ce n’est plus nous qui agissons dans la vie, pitoyables et mesquins, seuls et souffrants. Le Tout-Puissant marche avec nous. Et qui demeure uni à lui porte beaucoup de fruits. D’une cellule naissent plusieurs cellules. De plusieurs cellules, un tissu… Se faire un avec le prochain dans cet oubli total de soi que possède, sans le savoir ou le rechercher, celui qui pense à l’autre, au prochain.

C’est la « diplomatie » de la charité. Il lui arrive de prendre les formes et expressions de la diplomatie courante. Elle ne dit pas tout, si cela devait peiner un frère et offenser Dieu. Elle sait attendre, trouver les mots, atteindre son but. Divine diplomatie du Verbe qui se fait homme pour nous diviniser. Pourtant cette diplomatie a une marque essentielle et caractéristique qui la différencie de celle qui se pratique dans le monde, pour qui diplomatie est souvent synonyme d’arrière-pensées et même de mensonge. Elle est mue par le bien de l’autre et dépourvue de toute trace d’égoïsme.

Utopie de penser que cette règle de vie devrait présider à toute diplomatie ? Non, car, avec Dieu, on peut y parvenir. Il est le maître des nations et des groupes sociaux, autant que de chacun des hommes.

Si le diplomate exerce ses fonctions animé par la charité, aussi bien envers les autres États qu’envers [83] son propre pays, Dieu l’éclaire et l’aide. Il peut alors travailler efficacement à la fraternité qui doit exister entre les peuples autant que parmi les hommes. La charité éclaire et guide, et celui qui est investi d’une mission a toutes les grâces pour la mener à bien. Que Dieu nous aide à réaliser cela. Quant à nous, faisons l’impossible pour que le Seigneur puisse voir son testament réalisé entre les peuples.

À nos yeux cela peut sembler un rêve. Au regard de Dieu, c’est la seule loi qui garantisse la paix dans le monde et l’épanouissement de chacun dans l’unité d’une humanité enfin arrivée à la connaissance de Jésus».

Chiara Lubich – « Méditations », p.81-83, Ed.Nouvelle Cité 2000

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