La communauté chrétienne de Corinthe est vivante et pleine d’initiatives. Formée de groupes divers, avec leurs guides charismatiques, elle connaît pourtant des tensions, le culte de la personnalité et le désir de se distinguer. D’où l’intervention de Paul, rappelant qu’au-delà des dons et qualités des leaders, quelque chose de plus profond encore les lie : l’appartenance à Dieu.

C’est la grande annonce chrétienne : Dieu est avec nous. Nous ne sommes pas en pays étranger, orphelins, abandonnés à nous-mêmes. Nous sommes enfants de Dieu, nous sommes à lui. En vrai père, il prend soin de nous et veille à nous procurer tout le nécessaire pour notre bien. Son amour est même surabondant : « Tout est à vous, affirme Paul, le monde, la vie ou la mort, le présent ou l’avenir, tout est à vous ! » Dieu nous a même donné son Fils, Jésus.

N’est-elle pas immense la confiance de Dieu, qui met tout entre nos mains ? Or combien n’en avons-nous pas abusé, nous considérant propriétaires de la création, jusqu’à la piller et la défigurer. Nous nous sommes crus les maîtres de nos frères et sœurs jusqu’à les réduire en esclavage et les massacrer, et maîtres de notre vie jusqu’au culte de nous-mêmes.

Cet immense don de Dieu – « Tout est à vous », écrit Paul – appelle notre gratitude. Or souvent nous nous plaignons de ce qui nous manque et nous tournons vers Dieu uniquement pour demander. Pourquoi ne pas regarder autour de nous, essayer de découvrir la beauté et le bien qui nous entourent ? Et remercier Dieu de ce qu’il nous donne jour après jour ?

Cette parole – « Tout est à vous » – n’est-elle pas aussi une responsabilité ? Celle de prendre soin avec tendresse de ce qui nous est confié : le monde entier et tout être humain. Accordons-leur le même soin que Jésus à notre égard – « Vous êtes à Christ » – et le même soin que le Père a pour Jésus – « Christ est à Dieu ».

Sachons être heureux avec ceux qui sont dans la joie et pleurer avec ceux qui souffrent. Accueillons toute division, souffrance, violence, comme nous appartenant, afin de la partager et la transformer en amour. Tout nous a été donné pour que nous l’apportions au Christ, c’est-à-dire à la plénitude de la vie, et à Dieu, le but final, en redonnant à chaque chose et à chaque personne sa dignité et son sens.

Un jour d’été, en 1949, au cours d’une période particulière, Chiara Lubich éprouva une unité telle avec le Christ qu’il lui sembla être unie à lui comme l’épouse à son époux. Elle pensa alors à ce qu’il lui incombait d’apporter et comprit que ce devait être toute la création ! Quant à Jésus, il lui donnerait en héritage tout le Paradis. Elle se rappela alors les paroles du psaume : « Demande-moi, et je te donne les nations comme patrimoine, en propriété les extrémités de la terre » (Ps 2,8). Et Chiara d’ajouter :« Nous avons cru et demandé. Il nous a tout donné, pour que nous le lui apportions et lui, nous donnera le Ciel : nous lui donnerons le créé, lui nous donnera l’Incréé. »

Vers la fin de sa vie, parlant du Mouvement auquel elle avait donné vie, Chiara Lubich écrivait : « Quel est mon ultime désir maintenant ? Lorsque l’Œuvre de Marie [le mouvement des Focolari], en rangs serrés, attendra de paraître devant Jésus abandonné-ressuscité, à la fin des temps, je voudrais qu’elle puisse lui dire, en les faisant siennes, les paroles du théologien belge Jacques Leclercq, qui me touchent chaque fois que je les relis : “Un jour, ton jour, ô mon Dieu, je viendrai vers toi. […] avec mon rêve le plus fou : t’apporter le monde dans mes bras” 1. »

Fabio Ciardi

1 Chiara LUBICH, Le Cri, Nouvelle Cité, p. 151.

7 Comments

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *