Mouvement des Focolari
Pologne: dialogue entre chrétiens et musulmans à Katowice

Pologne: dialogue entre chrétiens et musulmans à Katowice

20150601-04En Pologne les musulmans, au nombre de 25000, soit 0,08% de la population, font partie des minorités religieuses de ce pays de 38 millions d’habitants. Leur présence remonte à l’arrivée des Tartares au XIVème siècle ; puis à l’immigration de la seconde moitié du XXème siècle et à celle qui suit la chute du mur de Berlin. La journée d’échanges qui vient juste d’être vécue s’insère dans le sillage de trois événements sur lesquels s’appuie le dialogue entre chrétiens et musulmans en Pologne. C’est le Père Adam Was, membre du Comité pour les religions non chrétiennes de la Conférence Episcopale Polonaise, qui a en retracé le cadre: la Journée de l’Islam dans l’église catholique de Pologne instaurée au cours de l’année 2000 par la Conférence Episcopale Polonaise à la demande du Conseil Mixte des Catholiques et des Musulmans, célébrée chaque année le 26 janvier ; la « Prière pour la Paix et la Justice dans le Monde », née après le 11 septembre 2001, à l’initiative des musulmans tartares polonais ; enfin un événement « sans précédent dans le monde entier », comme l’a souligné le Mufti Nedal Abu Tabaq, « La Journée du Christianisme parmi les Musulmans en Pologne », fixée le 29 mai et proposée il y a trois ans par les musulmans de la Ligue Musulmane en Pologne. Invitées par l’imam Abdul Jabbar Koubaisy, directeur du Centre et vice-président de la Ligue Musulmane en Pologne, cinquante personnes sont intervenues au cours de ce rendez-vous : des représentants des autorités locales, des Eglises catholique, orthodoxe et luthérienne, de l’Université de Silésie et aussi de la Communauté Juive de Katowice. Invités d’honneur : Maria Voce, présidente du Mouvement des Focolari et Jesús Morán, coprésident. 20150601-05“Le dialogue interreligieux est une condition nécessaire pour la paix dans le monde, et donc un devoir pour les chrétiens, tout comme pour les autres communautés religieuses” (EG, 250), a rappelé le métropolite de Katowice, l’archevêque Victor Skworc, dans son message lu par le père Tadeus Czakański, son délégué pour le dialogue avec l’Islam. Et, en s’appuyant sur le thème de cette rencontre, il a souligné comment « le fondement de tout l’enseignement de Jésus-Christ repose sur l’amour miséricordieux envers le prochain », en souhaitant que cette rencontre interreligieuse à Katowice nous aide tous « à vivre plus profondément le mystère de la miséricorde de Dieu » et qu’elle « contribue à une plus grande ouverture des uns envers les autres pour travailler de manière plus efficace au service des opprimés et des exclus ». Ensuite Maria Voce, dans son discours, a rappelé quelques passages des Ecritures chrétiennes qui parlent de Jésus, avant même sa naissance, en mettant20150601-06 l’accent sur son amour concret envers chaque homme. « C’est cet amour universel, sans réserves, qui a attiré tous ceux qui font partie du Focolare et qui est devenu notre règle de vie », a fait remarquer la présidente des Focolari. « Une des intuitions de Chiara Lubich, qui constitue l’un des fondements de la spiritualité de l’unité depuis ses débuts, fut la découverte de la valeur du commandement par excellence de Jésus : « Ceci est mon commandement : que vous vous aimiez les uns les autres comme je vous ai aimés. Il n’y a pas d’amour plus grand que celui-ci : donner sa vie pour ses amis » Jn 15, 12-13) “ Aimer toujours n’est pas facile – a souligné Maria Voce – parfois ou très souvent cet amour envers le frère nous coûte beaucoup, demande des sacrifices… Mais dans ces moments-là aussi Jésus est pour nous un modèle : il nous a aimés jusqu’au point de donner sa vie pour nous ». Et, à la fin, elle a souhaité à tous : que Jésus – « le plus grand et le plus miséricordieux, nous aide à nous regarder tous comme des frères, avec la mesure que lui-même nous a révélée, pour construire ensemble un monde où règne la fraternité et donc la paix pleine et vraie que nous attendons tous ». 20150601-07Le Mufti Nedal Abu Tabaq, responsable de tous les imams en Pologne, en parlant de Jésus Christ a souligné qu’il « n’est pas seulement notre frère, mais notre chef à tous », et qu’il faut donc le suivre. Dans le Coran il est écrit – a affirmé le Mufti – que « Jésus est le signe (…). Non seulement il a été conçu miraculeusement, mais il a aussi accompli des miracles, il a soigné les malades, il a ressuscité les morts. Chacun de nous – a-t-il aussi souligné -, doit « ressusciter la lumière en celui qui souffre (…) Nous ne sommes pas comme des bougies qui peuvent s’éteindre, mais nous sommes la lumière qui en est désormais sortie et cette lumière est présente en chaque homme, mais nous devons toujours la révéler, la faire ressortir (…) en ceux qui sont dans le besoin, comme l’a fait Jésus-Christ (…). Voilà le Jésus que j’aime, que je connais, que je loue ». Action commune en faveur du dialogue interreligieux, la menace qui pèse sur la valeur de la famille et la nécessité de la protéger ensemble en tant que croyants, l’éducation des enfants au dialogue, voilà quelques unes des questions traitées dans un dialogue fraternel avec Maria Voce et Jesús Morán , au cours de la seconde partie de la rencontre. La prière du “Notre Père” récitée par les chrétiens et la prière “Douâa” par les musulmans ont conclu l’événement. Le signe de la paix, échangé entre tous en se serrant la main ou en s’embrassant, a exprimé l’amour fraternel vécu au cours de ces heures entre chrétiens, musulmans et juifs. Cette Journée du Christianisme au milieu des Musulmans en Pologne mérite qu’on s’en souvienne.

Concile Vatican II, œcuménisme et dialogue interreligieux.

Concile Vatican II, œcuménisme et dialogue interreligieux.

20150601-02“Il y a cinquante ans j’étais adolescent et jamais j’aurais imaginé vivre une aventure aussi passionnante que celle du dialogue, sur la voie ouverte par Nostra Aetate [le document conciliaire prophétique qui a marqué l’ouverture de L’Eglise au dialogue constructif et positif avec les diverses traditions religieuses du monde]. En regardant en arrière je ne peux qu’être reconnaissant envers Dieu, mais aussi envers les dizaines de personnes rencontrées sur ce chemin que je n’aurais jamais imaginé parcourir. A commencer par ma famille où j’ai appris que dialoguer est toujours meilleur qu’entrer en conflit, puis mes camarades d’université, à l’époque de la contestation des années 70, les jeunes des mouvements catholiques où j’ai grandi, le monde du travail où je me suis inséré dès mes vingt ans, et, par la suite, des personnes rencontrées en Asie, en Amérique du Nord et du Sud, en Afrique et dans diverses parties du monde, y compris la Nouvelle Zélande et l’Australie. Une richesse immense, un chemin que la société, en 1965, ne pouvait même pas imaginer ». C’est là un souvenir personnel, en marge du congrès qui célèbre les 50 ans de la conclusion du Concile Vatican II (Georgetown, Washington 22-24 mai), organisé par Ecclesiological Investigation, un groupe de théologiens qui se rencontre une fois par an et débat d’une question particulière. Cette année le sujet choisi est Vatican II, Remembering the future, et les représentants venant de Rome ne manquent pas, parmi eux le cardinal Kasper et le cardinal Tauran. 201506-1-01“Cette conférence est de haut niveau – poursuit Roberto Catalano – : interventions en séance plénière, mais aussi sessions parallèles à fort contenu théologique et culturel. Grande ouverture humaine et intellectuelle, désir d’approfondir un événement comme le Concile sous divers points de vue : géographique bien sûr, mais surtout sous l’angle des perspectives et des contenus. Il y a des interventions qui cherchent à situer dans leur contexte les raisons qui expliquent pourquoi cet événement a eu lieu entre 1962 et 1965. D’autres ont abordé les aspects historiques qui l’ont motivé. Il faut aussi souligner l’importance des lectures concernant ce qui s’est passé après, avec le constat que cinquante ans n’ont pas été suffisants pour le réaliser. Les avis de succèdent dans un climat de grande écoute, d’intérêt et d’ouverture intellectuelle et spirituelle ». « Malgré la diversité des positions, à un demi-siècle de sa conclusion, le Concile apparaît, après ces journées d’études, comme un événement qui a changé l’Eglise et l’humanité. Ce qui frappe le plus, c’est la dimension prophétique qui caractérise en particulier les documents qui ont été promulgués à la fin des assises conciliaires ». Et l’intervention de Roberto Catalano s’est fondée précisément sur cette dimension prophétique, sur le rôle de quelques mouvements, comme les Focolari et Sant’Egidio, dans l’actualisation de Nostra Aetate. Le dialogue comme devoir, le dialogue comme culture de la rencontre, comme pèlerinage, comme pensée ouverte et pleine d’empathie… autant de points développés par Catalano. Une des journées du congrès a été dédiée entièrement à l’œcuménisme et à toute la signification du Concile à cet égard. Prises de parole successives des catholiques, des luthériens, presbytériens, orthodoxes et épiscopaliens : « Les zones d’ombre dues à des rendez-vous manqués et aux obstacles qui empêchent encore une vraie communion entre les différentes Eglise n’ont pas été occultées. Mais l’intervention la plus remarquable, suivie de quelques minutes d’applaudissements qui ont fortement résonné à l’intérieur de la National Cathedral (épiscopalienne) a été celle du cardinal Walter Kasper qui, après une analyse magistrale de l’histoire et des aspects théologiques de la question œcuménique, conclut avec son optimisme pragmatique plein de souffle : « Unity perhaps has already started ! [ L’unité a peut-être déjà commencé ! ] » « On se rend compte – dit-il en conclusion – de la façon dont, au cours de ces cinquante années, des pas énormes ont été accomplis et que l’unité ne sera jamais un retour ou une unification, mais une communion ».