Une initiative avant-gardiste en Amérique latine. Elle prend le nom de “Projet Innocence” et est soutenue par la Faculté de Droit de l’Université Manuela Beltrán de Bogotá. Le projet vise à rouvrir, gratuitement, des affaires de personnes condamnées injustement, mais privées des ressources économiques nécessaires pour payer leur défense.
L’initiative naît en 2007. « En général, les affaires que nous affrontons le plus fréquemment – explique Juan Carlos Cárdenas C., directeur du “Projet Innocence” – sont celles qui concernent une négligence ou une erreur dans l’identification des auteurs des infractions. Ce sont des affaires dans lesquelles les fonctionnaires judiciaires omettent de faire correctement leurs devoirs et, en raison d’actes de négligence, formation insuffisante, faute de preuves ou faux témoignages, mais aussi corruption, de mauvaises décisions sont prises, qui condamnent injustement une personne. »
Le “Projet Innocence” est composé d’une équipe interdisciplinaire de travail, dont font partie des avocats, des psychologues, des détectives et, naturellement, des étudiants de tous ces domaines d’étude.
Divisés en groupes de travail, les représentants du Projet Innocence visitent les Centres pénitentiaires de Bogotá (pour hommes et femmes) deux fois par semaine. Dans ces Centres, les détenu(e)s s’inscrivent sur une liste d’attente pour être reçu(e)s. Les déclarations d’innocence de la part de parents ou amis affluent, ainsi que les demandes d’aide par courrier électronique à travers la page web .
Un avocat professionnel, un surveillant et, en général, des étudiants en droit et en psychologie participent à l’entretien : « On ne perd jamais de vue – souligne le directeur du Projet – le fait qu’il pourrait s’agir de l’unique opportunité qu’a cette personne d’être écoutée ».
« Normalement – explique l’avocat Cárdenas – les détenus affirment que, lors du procès et du jugement, il y a eu des erreurs. Pour cette raison, il est important d’avoir une formation professionnelle sérieuse et profonde. On part du respect et de la conviction que tous les jugements rendus par les juges sont fondés sur le principe de légalité et de rectitude. Il est donc encore plus difficile de démontrer à l’administration de la justice qu’elle s’est trompée, après qu’un jugement a été rendu en dernière instance. Par principe, notre travail ne consiste pas à chercher à identifier le fonctionnaire qui s’est trompé, mais plutôt à démontrer où et quelle a été l’erreur commise à l’interne de ce procès qui a amené à la condamnation d’un innocent. »
Au “Projet Innocence” parviennent des affaires comme des enlèvements, homicides, crimes sexuels, extorsions, blanchiment d’argent, mais derrière lesquelles il y a des personnes injustement accusées et privées de liberté. Comme l’affaire de Manuel Mena, condamné à 17 ans de prison pour un homicide qu’il n’a pas commis. Après trois ans et demi en prison et un travail rigoureux accompli par l’équipe de l’Université, pour analyser preuves et faits, la Cour constitutionnelle a annulé le jugement de condamnation, en ordonnant la libération immédiate.
« Les détenus – conclut le professeur – sont parmi les plus nécessiteux de la population ; ils ont besoin d’aide et de solidarité. Mais ceux qui vivent un procès de réhabilitation ont aussi besoin d’un soutien amical, d’un conseil, d’une écoute. Le monde de la justice doit aussi être renouvelé par l’Évangile et par la vérité, et cette initiative, pour nous qui sommes engagés, représente un petit grain de ce renouveau. »
(Témoignage raconté lors du Symposium international sur la fraternité le 4 avril 2012, à l’Université Manuela Beltrán, avec la présence de Giancarlo Faletti, coprésident du Mouvement des Focolari.)
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Juan Carlos Cárdenas C., directeur du “Projet Innocence”, enseigne le Droit à l’Université Manuela Beltrán de Bogotá (Colombie). Il est engagé dans le Mouvement des Focolari depuis que, dans sa jeunesse, il a fait sienne la spiritualité de Chiara Lubich.
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