Le texte de Chiara Lubich qui suit nous conduit au cœur de la foi chrétienne. « Nous avons cru à l’amour de Dieu – c’est ainsi que le chrétien peut exprimer le choix fondamental de sa vie . » C’est un choix qui s’avère assez audacieux en ce moment, mais qui n’en est pas moins vrai. Cette fois-ci, nous parlerons encore de la prière : elle est la respiration de notre âme, l’oxygène de toute notre vie spirituelle, l’expression de notre amour envers Dieu, le carburant de chacune de nos activités. Mais de quelle prière voulons-nous parler ? De cette prière, aux richesses infinies et divines, qui est toute contenue dans une parole, dans un seul mot que Jésus nous a enseigné et que l’Esprit Saint a mis sur nos lèvres. Mais allons à son origine. Jésus priait, il priait son Père. Pour lui, le Père était « Abba », le père, le papa auquel il s’adressait avec des accents de confiance infinie et d’amour sans limites. Il le priait en étant au sein de la Trinité où il est lui-même la seconde Personne divine. C’est bien aussi par cette prière toute spéciale que Jésus a révélé au monde qui il était réellement : le Fils de Dieu. Mais comme il était venu sur terre pour nous, il ne s’est pas contenté d’être lui seul dans cette condition privilégiée de prière. En mourant pour nous, en nous sauvant, il nous a faits enfants de Dieu, ses frères, et il nous a donné, à nous aussi par l’Esprit Saint, la possibilité d’être introduits au sein de la Trinité, en Lui, avec Lui et par Lui de sorte que pour nous aussi cette divine invocation, la sienne, est devenue possible : « Abba Père », « papa ! mon papa », notre papa, avec tout ce que cela comporte : certitude de sa protection, sécurité, abandon aveugle à son amour, consolations divines, force, ardeur. Ardeur qui nait dans le cœur de celui qui est sûr d’être aimé… C’est cela la prière chrétienne. Une prière extraordinaire. Une prière que l’on ne rencontre nulle part ailleurs ni dans d’autres religions. Si l’on croit en une divinité, tout au plus on la vénère, on l’adore, on la supplie mais on reste en quelque sorte extérieur à elle. Là non. On entre dans le cœur de Dieu. Et alors ? Rappelons-nous avant tout les hauteurs vertigineuses auxquelles nous sommes appelés en tant que fils de Dieu et, par conséquent, l’exceptionnelle possibilité de prier que nous avons. Naturellement on ne peut dire : « Abba, Père », avec toute la signification que contient ce mot, que si l’Esprit Saint le prononce en nous. Et pour que cela puisse se faire, il faut être Jésus, rien d’autre que Jésus. Le moyen ? Nous le connaissons : Jésus vit déjà en nous par la grâce, mais il y faut encore notre contribution. Celle-ci consiste à aimer, à être dans l’amour envers Dieu et envers le prochain. Puis l’Esprit Saint mettra cette parole sur nos lèvres avec plus de plénitude si nous sommes en unité parfaite avec nos frères, là où Jésus est au milieu de nous. Que la prière « Abba, Père » soit tout particulièrement notre prière. […] Par elle, nous correspondrons pleinement à notre vocation qui est de croire à l’amour, d’avoir foi en l’amour qui est à la racine de notre charisme. Oui, l’Amour, le Père nous aime. Il est notre papa : de quoi aurions-nous peur ? Et comment ne pas voir dans le dessein d’amour qu’il a sur chacun de nous et qui se révèle à nous, jour après jour, l’aventure la plus extraordinaire à laquelle nous pouvions être appelés ? « Abba » est la prière caractéristique du chrétien et de nous, focolarini, en particulier. Si donc nous sommes sûrs de vivre notre Idéal, c’est-à dire si nous sommes dans l’amour, adressons-nous ainsi au Père, comme le faisait Jésus. Les conséquences ? Nous les éprouverons dans notre cœur.
Chiara Lubich
(Liaison téléphonique, Rocca di Papa, le 9 mars 1989) Extrait de : « Abbà, Padre ! », in : Chiara Lubich, Conversazioni in collegamento telefonico, p 355. Città Nuova Ed., Roma 2019.
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