22 Mai 2019 | Non classifié(e)
Un siècle n’est même pas encore passé depuis le dernier conflit mondial et semble-t-il aujourd’hui, l’Europe a déjà perdu d’une certaine manière, le défi qu’elle s’était fixé au départ. Théâtre de deux conflits mondiaux avec des millions de morts, de nombreuses villes et communautés détruites, le vieux continent s’engageait dans les années ‘50 vers une renaissance inespérée. Les pères fondateurs de l’actuelle Union Européenne, avaient vu au-delà des intérêts particuliers de chaque pays, et avaient vu grand : une communauté de peuples qui puisse d’une certaine manière, planifier un futur de paix et une renaissance économique.
De l’Europe, nous avons parlé avec Maria Voce, Présidente du Mouvement des Focolari, lors d’une interview, articulée en neuf questions, accordée à l’occasion de la Mariapolis européenne qui aura lieu au courant des prochains mois de juillet et août, à Tonadico dans la région de Trente. Dans un dialogue franc et ouvert, l’interview se développe en affrontant des thématiques concernant la politique, les jeunes, le témoignage des chrétiens d’aujourd’hui, l’Europe que nous voulons, et quelle signification peut avoir la Mariapolis européenne. La diversité entre les différentes communautés des peuples est une valeur, affirme Maria Voce et il ne faut pas céder à l’envie de souveraineté et de nationalisme : à la Mariapolis, la diversité devient justement la raison de l’enrichissement pour tous, en devenant un moment au cours duquel chacun peut manifester sa propre richesse et sa propre culture. ‘’Et si chacun est engagé à faire cela, – continue Maria Voce – personne ne sentira plus le besoin de revendiquer la propre identité car celle-ci est reconnue, valorisée et enrichie dans l’unité’’. Et c’est cela que la Mariapolis européenne peut signifier et donner aux participants, réaliser ensemble une phrase que Chiara Lubich disait encore en 2004 :’’La plus haute dignité pour l’humanité est celle de ne pas se sentir un ensemble de peuples souvent en conflit entre eux, mais par l’amour réciproque, un seul peuple enrichi par la diversité de chacun et pour cela, gardien dans l’unité, des différentes identités’’. Un autre point affronté est la présence des jeunes dans la société d’aujourd’hui et leur plutôt faible participation à la vie politique. Maria Voce n’a pas de doutes à l’égard des jeunes et donne valeur aux témoignages de nombreux parmi ceux-ci qui ont en ce moment une forte influence, par exemple, dans le domaine de l’écologie : les nouvelles générations s’engagent ‘’pour des projets qui concernent le bien de l’humanité et non dans l’instantanéité du jour qui passe et pour des projets qui demandent un engagement concret et qui montrent une authenticité de vie’’, affirme la Présidente des Focolari. La mission des chrétiens est aussi assez ardue mais ceux-ci peuvent transmettre la valeur de la solidarité, de la fraternité, de l’amour pour tous ceux qui vivent en situation précaire, en donnant de leur personne, par une vie cohérente à la lumière de l’Évangile. Parmi les questions ne pouvait manquer celle concernant sa propre rencontre avec le charisme de l’unité qui a eu lieu à Rome pendant ses années d’université, et par conséquent, sa première expérience de Mariapolis, qui, nous l’avons découvert, a justement eu lieu en ‘59 dans les vallées des Dolomites où elle a connu Chiara Lubich. Maria Voce a été témoin de cette foule de personnes qui déferlait chaque année dan ces lieux enchanteurs, des personnes les plus variées, attirées par le fait d’expérimenter en personne, l’amour réciproque, la fraternité et de réaliser ainsi la prière de Jésus, ‘’Que tous soient Un’’. La dernière question est l’occasion d’exprimer son rêve :’’Mes espérances pour l’Europe sont que celle-ci puisse découvrir sa beauté et sa vocation : des peuples unis qui se reconnaissent les uns les autres, des principes communs, des valeurs communes. L’histoire d’un peuple est aussi mon histoire, l’histoire de chaque peuple de l’Europe est aussi mon histoire, elle fait partie de mon histoire, elle vit dans mon histoire’’.
Patrizia Mazzola
20 Mai 2019 | Non classifié(e)
Jésus ressuscité nous propose de faire avec lui une expérience de vie nouvelle et de paix, afin que nous puissions la partager avec les autres. Pour les autres Depuis que nous étions jeunes, animés par nos convictions chrétiennes, mon mari et moi avions commencé à travailler pour les autres. Nous venons de familles pauvres : mes parents travaillaient à la mine, alors que les parents de Ramon étaient agriculteurs, et nous sommes bien conscients des difficultés et des besoins dus au manque de ressources. Notre souhait s’est réalisé lorsqu’on nous a proposé de gérer un fonds pour des enfants insérés dans un projet d’adoption à distance. Grâce aux contributions reçues, nous pouvons maintenant suivre 23 enfants et nous avons pu acheter un terrain où nous avons construit une structure qui abrite une vingtaine d’enfants de familles pauvres, permettant ainsi aux parents d’aller travailler. Il y a aussi un petit atelier de couture pour les mamans. Grâce à la générosité de plusieurs, nous pouvons développer cette activité pour le bénéfice non seulement des enfants, mais aussi de leurs familles. (R. J. – Bolivie) Quatrième grossesse À la neuvième semaine de ma quatrième grossesse, j’ai contracté la rubéole. Les jours qui ont suivi ont été les plus durs de notre vie conjugale, nous étions confrontés à un problème qui nous dépassait. Les médecins nous ont prévenus que la possibilité d’avoir un bébé en bonne santé était réduite à 5%. Le « rejet » de la grossesse, selon la mentalité courante, semblait être la bonne solution. Mon mari m’a laissée libre de choisir, mais je voulais qu’il me dise d’accepter cette nouvelle créature. Dans mon cœur de maman, en fait, je l’avais accepté dès le premier instant. Je ne crois pas avoir jamais prié aussi intensément de toute ma vie. Un jour, mon mari me dit : « Et si notre fils n’avait rien, ou peu », c’était le signe que j’attendais : nous nous sommes embrassés et à partir de ce moment nous nous sommes sentis plus unis. Après six mois, un beau garçon est né. En bonne santé. (J.O. – Suisse) Vol à la maison De retour dans notre maison, construite avec beaucoup d’efforts, nous avons trouvé tout dévasté : les voleurs avaient même emporté l’évier et les toilettes. N’ayant pas la possibilité de remplacer tout ce qui manquait par du neuf, nous avons donc commencé à faire les magasins d’occasion. Jusqu’au moment où, dans l’un d’entre eux, nous avons reconnu certains de nos objets. Les vendeurs nous ont dit les avoir achetés à certains garçons du quartier, que nous connaissions bien puiqu’ils étaient nos voisins. Nous sommes allés chez eux, avec l’intention de récupérer ce qui était à nous, mais aussi de leur faire comprendre leur erreur. Devant la réalité, ils n’ont pas nié et avec eux, nous sommes allés récupérer la marchandise. En chemin, nous avons parlé à cœur ouvert des valeurs qui donnent un sens à notre vie, alors qu’ils auraient dû s’attendre à une réaction plus dure. C’est peut-être ainsi que nous avons apporté notre petite contribution à la paix. (B.O. – Venezuela)
Propos recueillis par Chiara Favotti
19 Mai 2019 | Non classifié(e)
Une nouvelle journée d’action mondiale pour le climat se tiendra au niveau mondial le 24 mai. Cette mobilisation, née de l’initiative d’une Suédoise de seize ans, coïncide avec le quatrième anniversaire de la publication de l’encyclique du Pape François « Laudato Sí ». Nous avons demandé à Lorna Gold, économiste et membre des Focolari, qui travaille pour l’Irish Catholic Development Agency « Trocaire » et auteure du livre « Climate Generation : Awakening to our Children’s Future », de nous expliquer pourquoi un engagement immédiat, individuel et collectif pour la planète terre est nécessaire. Tu es une spécialiste du développement international et tu as travaillé presque vingt ans dans les milieux universitaires et dans des organisations non gouvernementales. Comment est né ton engagement pour l’environnement ? Mon engagement a commencé quand j’étais petite et j’ai réalisé, avec les enfants du mouvement des Focolari, des actions pour construire un monde plus uni. Je me souviens, en particulier, quand les jeunes de l’Amazonie (Brésil) m’ont raconté comment la forêt a été détruite. J’étais horrifiée. J’ai rapidement commencé à faire campagne dans mon école et dans ma communauté pour protéger cette région. J’ai ensuite étudié et fait un doctorat sur le développement durable, en me concentrant sur l’Economie de Communion, comme exemple d’une économie où les gens se concentrent plus sur le partage et la construction du bien commun que sur la consommation. Dans mon travail à Trócaire, où nous soutenons les personnes qui vivent dans la pauvreté, j’ai compris que si nous ne réussissons pas à protéger la terre, nous échouons aussi avec les pauvres et avec tous. Si nous ne protégeons pas les conditions de base de la vie dont nous dépendons, il n’y aura pas de voie de sortie de la pauvreté. Tu as adhéré à l’initiative « FridaysForFuture » promue par Greta Thunberg en impliquant les enfants et les parents en Irlande. Que faites-vous chaque vendredi ? Je suis très préoccupé par les changements climatiques et je m’efforce depuis des années d’influencer les politiques gouvernementales. J’ai été touché par Greta Thunberg. Il y en a eu d’autres comme elle dans le passé, mais maintenant, avec le pouvoir des réseaux sociaux, il y a une chance que les paroles d’une enfant deviennent un « feu » qui enflamme tout le monde. Elle a invité chaque personne à protester le vendredi, en particulier le 15 décembre 2018. Au début, je ne pensais pas que cette invitation s’adressait à moi, mais j’ai été ensuite protester devant notre Parlement. Et j’y suis retournée chaque vendredi. Le nombre de personnes qui s’y réunissent chaque semaine augmente et des groupes similaires se forment dans toute l’Irlande. Le 15 mars 2019, tout le pays s’est mobilisé : 15 000 enfants et adultes sont descendus dans les rues de Dublin et dans 40 autres localités. Comment faire afin que l’engagement pour la planète modifie notre mode de vie ? Nous devons protester et agir. N’importe qui peut commencer la manifestation du vendredi dans sa communauté locale et l’enregistrer sur la carte mondiale sur Fridaysforfuture.org. Mais on peut aussi faire une action positive comme planter des arbres. Cela aurait un double impact : protester et planter ! Pendant ce temps, continuons avec les protestations mondiales, comme celle d’aujourd’hui. En collaboration avec le Mouvement catholique mondial pour le climat, dont font partie également les membres des Focolari, nous demandons à tous, personnes de toute croyance et communauté, de se joindre aux étudiants pour cette journée. Dans quelle mesure la rencontre avec le charisme des Focolari a influencé tes choix de travail et de vie ? Mes choix de vie ont certainement été influencés par ma rencontre avec le Mouvement des Focolari. J’ai appris que l’amour triomphe de tout. Pour résoudre le problème climatique, nous avons besoin que tout le monde travaille ensemble. Nous avons des technologies, des idées et même de l’argent, mais il manque souvent la collaboration et une volonté authentique de travailler pour le bien commun. Je crois que le Mouvement des Focolari a un rôle important à jouer dans la création d’espaces où tout le monde peut être aidé à travailler ensemble dans un esprit de collaboration authentique. Comment t’est née l’idée d’écrire un livre et avec quels objectifs ? En quoi consiste l’engagement que tu proposes pour la protection de la planète ? L’idée est née de la profonde inquiétude que les parents ne voient pas ce qui arrive au climat et ne comprennent pas comment cela affectera leurs enfants. Je travaille sur cette question depuis deux décennies. La situation est terrifiante. Si nous ne changeons pas radicalement nos sociétés, dans les dix prochaines années, nos enfants devront faire face au changement climatique avec une augmentation de 4 ou 5 degrés d’ici la fin du siècle. Cela signifie que la civilisation, telle que nous la connaissons, ne survivra pas. La grande majorité des espèces sera balayée. Nos enfants trouveront un fardeau impossible à porter. Pour moi, en tant que mère, ce n’est pas acceptable. Mon livre suscite un grand intérêt ici en Irlande et il vient d’être publié aux Etats-Unis par New City Press. J’espère qu’il sera également publié dans d’autres pays. J’y suggère trois choses : renouer avec la terre, la merveilleuse création de Dieu et nous retrouver en grande communion, non seulement avec les autres êtres humains, mais avec tout le cosmos. Deuxièmement, changer notre mode de vie afin de réduire au minimum l’impact environnemental ; nous avons besoin d’une « conversion écologique », comme l’appelle le Pape François. Un bon point de départ est de mesurer notre empreinte écologique en ligne (il en existe de nombreuses façons sur le Web) et voir ce que nous pouvons faire pour la réduire. Aucun des choix ne sera facile, certains nécessiteront des changements majeurs. Enfin, nous devons nous joindre à d’autres pour faire pression, même au niveau politique, et obtenir de grands changements. Les actions individuelles ne suffisent pas. La fin des investissements publics dans les combustibles fossiles est un pas fondamental dans cette direction. Les campagnes de sensibilisation sont également essentielles jusqu’à ce que le changement soit irréversible.
Anna Lisa Innocenti
17 Mai 2019 | Non classifié(e)
Il y a beaucoup de migrants vénézuéliens qui quittent leur patrie pour le Pérou ou d’autres pays d’Amérique latine, à la recherche de meilleures conditions de vie. Irene Indriago Castillo est une psychologue clinicienne et cognitive vénézuélienne qui travaille avec le Mouvement des Focolari au Pérou comme coach organisationnel international. Nous l’avons interrogée sur son expérience humaine et professionnelle dans ce domaine.
Quelles sont les douleurs que les migrants portent en eux et quels sont leurs espoirs ? Les personnes qui arrivent au Pérou ont souvent quitté le Venezuela avec les moyens les moins chers, se détachant de leurs biens matériels et de l’affection des leurs. Après le voyage et le passage des contrôles migratoires, un processus que j’appelle « de l’illusion à la déception » commence pour eux : ils sont presque sans ressources économiques, mais ils aimeraient obtenir au plus vite de meilleures conditions de vie, trouver un logement et un emploi pour aider ainsi leur famille restée au Venezuela. Malheureusement, ces attentes s’effondrent rapidement et commence pour eux un chemin douloureux. Ils souffrent de la séparation d’avec leurs familles dont ils n’ont pas de nouvelles, de la perte de leur vie quotidienne et des repères dans lesquels ils se sentaient en sécurité. Ils vivent souvent dans des conditions moins bonnes qu’au Venezuela. L’adaptation est donc difficile, parfois elle cause aussi des difficultés aux couples. Ils évoluent dans une mer d’incertitudes qui minent leur force émotionnelle et spirituelle. Seuls ceux qui viennent avec un objectif clair et une foi solide sont capables de surmonter ces épreuves en moins de temps.
Quels sont leurs besoins les plus grands et les plus urgents ? L’exigence principale est d’ordre économique, afin de pouvoir subvenir à leurs besoins. Ils doivent régulariser leur présence dans le pays de destination et leur traitement en cas de maladie. Il est également très important qu’ils puissent rester en contact avec leur famille au Venezuela. Ils ont aussi besoin de relations d’aide et de soutien, pour gérer leur frustration, leur incertitude et leur détresse . Nombreux sont les mineurs qui arrivent, quels sont les plus grands traumatismes qu’ils subissent et comment essayez-vous de les aider ? Les enfants et les adolescents n’échappent pas aux chocs émotionnels, même s’ils savent que le but de la migration est d’obtenir une meilleure qualité de vie. Ils n’ont pas les mêmes outils que les adultes pour faire face au changement. Dans les ateliers que je fais avec eux, je me suis rendu compte que pour tous la décision de venir au Pérou avait été prise par leurs parents, on ne leur a pas demandé leur avis. Même en comprenant la perspective d’une amélioration des conditions de vie, tous ne voulaient pas venir. Ils voient peu leurs parents, vivent dans l’anxiété, communiquent moins, n’ont pas d’amis. Tous ne peuvent pas entrer immédiatement dans les écoles péruviennes, mais ceux qui les fréquentent s’entendent souvent dire des paroles offensantes par leurs camarades de classe. Leur tristesse, leur colère et leur peur se manifestent par des comportements que parfois leurs parents ne comprennent pas, comme la rébellion, les pleurs, l’isolement. Il est essentiel d’y prêter attention, de communiquer ouvertement et de leur permettre de former des groupes de jeunes de leur âge pour qu’ils se sentent solidaires. Pensez-vous qu’on puisse encore espérer reconstruire un avenir chez ces enfants et ces jeunes ? Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir. La résilience doit être promue comme un outil qui renforce, sur les plans cognitif et émotionnel, ceux qui sont confrontés à de grands défis dans la vie. Le pays d’accueil, dans le cadre des droits de l’homme, doit garantir l’accès à la santé, à l’alimentation et à l’éducation. Il est essentiel de mettre en place des aides pour faciliter de nouvelles relations affectives, maintenir la communication familiale et établir des ponts pour l’adaptation au nouveau cadre de vie, sans oublier le soutien spirituel. De cette façon, nous formerons des personnes avec des valeurs plus stables, avec une pespective d’avenir et suffisamment équipées pour prendre les décisions qui leur permettront de réaliser leurs rêves.
Anna Lisa Innocenti
16 Mai 2019 | Non classifié(e)
La nouvelle étape du voyage de Maria Voce et Jesús Morán au Liban scrute les racines de la culture du pays, dans sa complexité sociale, politique et religieuse. La renaissance du Liban est la clé du défi d’un dialogue authentique.
« It’s time to built a new nation » « Il est temps de construire une nouvelle nation ». C’est ce qui était écrit sur un panneau surplombant l’autoroute, mais la vitesse du trafic libanais ne nous a pas permis de comprendre à qui il est destiné, ni quelles intentions il voulait exprimer. La petite délégation du Mouvement des Focolari, dirigée par la présidente Maria Voce et le coprésident Jesús Morán, revient d’un voyage dans le nord du pays où elle a visité la Vallée des Saints, un centre spirituel de l’Église maronite, dont la grande majorité des chrétiens libanais sont membres. C’est aussi la région des fameux cèdres du Liban : une petite forêt à 2000 mètres d’altitude, où l’on trouve encore des spécimens qui datent probablement de l’époque du roi Salomon et donc âgés de plus de 3000 ans. De retour à Beyrouth, nous sommes submergés d’impressions qui affirment la grande capacité de ce peuple qui a 7000 ans d’histoire derrière lui et qui a su survivre au carrefour de trois continents et de trois grandes religions. Un peuple qui a su aussi préserver sa créativité dans des conditions extrêmement difficiles. Plus nous approchons de la capitale, plus la réalité actuelle nous vient à l’esprit, qui, dans sa complexité, ne donne pas beaucoup de raisons d’espérer. Il y a actuellement 18 communautés religieuses au Liban. L’Etat et les administrations publiques fonctionnent en « urgence ». Il y a une imbrication indissoluble entre les groupes ethniques, religieux, politiques, entre les grandes familles, les intérêts économiques, les puissances étrangères. Les anciennes blessures de la guerre dite « civile » de 1975 à 1990 ne sont pas encore cicatrisées.
« Nous n’avons pas eu le courage de regarder en face le mal que nous nous sommes fait mutuellement – a dit l’un des évêques que nous avons rencontrés ces derniers jours – et par conséquent personne n’a jamais demandé pardon à l’autre ». Et plusieurs fois en ces jours, nous entendons dire que la situation pourrait éclater à tout moment. « Il est temps de construire une nouvelle nation », dit le panneau sur l’autoroute, et il vient naturellement à l’esprit de se demander comment cela pourrait arriver un jour. La réponse que Jesús Morán a esquissée lors de son intervention à la table ronde de la Faculté de philosophie de l’Université du Saint-Esprit (USEK) près de Beyrouth, peut se résumer en un mot : dialogue. « Le dialogue – a-t-il souligné – fait partie de la nature de l’homme. Dans le dialogue, l’homme devient plus homme parce qu’il est complété par le don de l’autre. Il ne s’agit donc pas tant de paroles ou de pensées que de donner son propre être. Cela exige le silence et l’écoute et le risque de mettre en jeu sa propre identité, même culturelle, voire ecclésiale, qui ne se perdra pas, mais s’enrichira dans son ouverture ».
Dialoguer donc pour construire une nouvelle nation ? Ce sera encore une autre belle théorie, l’une des nombreuses que les Libanais ont entendues ces dernières années ? Absolument pas, pourraient répondre les 150 chrétiens et musulmans qui se sont rencontrés le 13 mai dans la soi-disant « maison jaune » construite sur ce qui était la ligne de démarcation entre la zone Est et Ouest de Beyrouth et qui a été reconstruite pour ne pas oublier les blessures de la guerre. Les témoignages de leur amitié, née pendant la guerre sur la base d’un simple accueil des Focolari, étaient émouvants et convaincants. De petits gestes de bon voisinage et d’attention, de visites réciproques, de relations non intéressées, ont transformé – comme le décrivait une femme musulmane – l’amitié en une véritable famille. « Le dialogue n’est possible qu’entre des personnes vraies. Et c’est seulement l’amour qui nous rend vrais », a dit Jesús Morán dans son intervention. Les amis chrétiens et musulmans et leur expérience en sont la preuve. Ce n’est peut-être qu’une petite graine qui poussera lentement, tout comme les cèdres du Liban. Mais c’est certainement une graine d’une force irrésistible, d’où peut naître une nouvelle nation.
Joachim Schwind
15 Mai 2019 | Non classifié(e)
Luigi Butori est un focolarino italien qui vit à Ho Chi Minh Ville. En Asie depuis plus de 20 ans, il en connaît toute la beauté mais également les drames et les contrastes. Nous l’avons accompagné dans son travail pour soutenir et remettre debout les plus pauvres parmi les pauvres, d’abord en Thaïlande (voir Téléréunion de septembre 2015) et à présent au Vietnam. https://vimeo.com/333138557