Mouvement des Focolari
Solidarité avec le peuple du Myanmar

Solidarité avec le peuple du Myanmar

Déclaration commune de SIGNIS, Pax Christi International et du Mouvement des Focolari en solidarité avec le peuple du Myanmar SIGNIS, l’Association Catholique Mondiale pour la Communication, entend le cri du courageux peuple birman qui résiste, sans violence, au coup d’État militaire au Myanmar qui a renversé une élection légitime et démocratique. Nous exprimons cela main dans la main avec Pax Christi International et ses membres de la région Asie-Pacifique qui, dans leur déclaration de février sur « l’état d’urgence » au Myanmar, ont exprimé de sérieuses inquiétudes quant à la situation dans le pays. De même, le mouvement international des Focolari s’unit à nous dans la solidarité avec le peuple birman. Chaque jour, des personnes courageuses, dont beaucoup de jeunes, retournent dans les rues pour protester pacifiquement, en dépit des coups et des tirs des soldats. En guise de symbole de leur protestation, et conformément à la coutume birmane, un signe de la colère légitime du peuple à l’égard des militaires peut être entendu dans le claquement régulier et constant des casseroles et des poêles pour éloigner les mauvais esprits. Nous sommes témoins de la détention arbitraire, sur la base d’accusations fabriquées de toutes pièces, de membres du gouvernement démocratiquement élu, ainsi que de dirigeants civils et religieux qui ont pris part à la longue lutte du peuple birman pour la démocratie. L’information véridique étant fondamentale dans une démocratie, nous rejetons la campagne de désinformation de l’armée du Myanmar, qui cherche à justifier ses actions. Nous demandons la pleine garantie des droits de l’homme et une procédure régulière pour les journalistes arrêtés pour avoir partagé des nouvelles et des informations sur ce qui se passe dans le pays, et exigeons leur droit à la liberté de la presse. Nous déplorons l’autoritarisme extrême qui a jugé bon de fouler aux pieds la constitution de la nation, permettant effectivement une démocratie limitée tout en gardant une grande partie du pouvoir politique entre les mains des élites des forces armées. Malgré d’énormes défis, le Myanmar fait ses premiers pas vers la démocratie, donnant à ses citoyens l’espoir d’un nouvel avenir. Cet espoir doit être restauré. Avant tout, nous entendons la voix du peuple du Myanmar: ce coup d’État vise essentiellement à renverser sa volonté. En définitive, il ne s’agit pas d’éliminer les opposants politiques ou de faire régner la soi-disant loi et l’ordre, mais de supprimer des années de travail patient pour les droits fondamentaux des citoyens et d’écraser les rêves de construction d’un pays libre et démocratique. En tant qu’organisations catholiques, nous nous joignons au pape François et aux dirigeants civils et religieux du monde entier qui ont condamné le coup d’État et appelé à un « dialogue constructif » pour rétablir la démocratie. En outre, nous nous joignons à d’autres organisations pour exiger : La libération d’Aung San Suu Kyi et des autres fonctionnaires et dirigeants détenus ; La cessation du recours à la violence et à la détention arbitraire par l’armée de manifestants pacifiques et de journalistes ; Justice et responsabilité pour les actions violentes commises par l’armée contre le peuple rohingya et d’autres minorités ethniques, ainsi que la prévention de tels crimes et abus à l’avenir ; Que les membres de la communauté internationale, en particulier dans la région Asie-Pacifique, fassent pression sur le régime pour qu’il démissionne et rétablisse la démocratie, et n’utilisent pas cette crise pour leurs propres intérêts géopolitiques. Nous demandons aux membres de SIGNIS, de Pax Christi International et du mouvement des Focolari du monde entier de se faire l’écho de l’appel du peuple birman en rendant compte de la situation dans les médias locaux et nationaux, et d’exhorter leurs gouvernements à prendre des mesures diplomatiques fermes pour s’opposer au coup d’État et aider à ramener la démocratie au Myanmar. Notre mission en tant qu’organisations est de promouvoir la paix. Ainsi, nous nous joignons à l’archevêque de Yangoon, le cardinal Charles Maung Bo, président des conférences épiscopales d’Asie, pour dire : « La paix est possible. La paix est le seul moyen. La démocratie est la seule lumière sur ce chemin». Télécharger la déclaration  

Garder le cap

Le choix d’aimer Jésus dans son abandon sur la croix et de le préférer à tout autre amour, est devenu pour Chiara Lubich comme une boussole qui donnait une orientation à sa vie et la libérait de nombreuses préoccupations. […] Nous avons remarqué que l’appel à suivre Jésus abandonné de manière radicale n’a pas eu lieu une seule fois, c’est-à-dire au début du Mouvement. De temps en temps en effet, au cours de ces années, le Seigneur nous l’a souligné de nouveau par des événements ou des considérations particulières. C’est ce qui m’est arrivé en 1954. […] Un focolarino devenait prêtre pour la première fois. J’ai dû aller de Rome à Trente pour l’ordination de Don Foresi par l’Archevêque de Trente. Mais comme je n’étais pas très en forme, on avait pensé que je fasse une partie du voyage en avion. Dès que je suis montée dans l’avion, une hôtesse très gentille, pour me faciliter le voyage, a eu l’idée de me faire entrer dans la cabine de pilotage. De cet endroit j’ai tout de suite été impressionnée par le panorama magnifique que l’on pouvait admirer : vaste, complètement dégagé du fait de la carlingue toute vitrée. Mais ce n’est pas le panorama qui m’a le plus frappée. Ce fut plutôt une explication sommaire du pilote sur ce qui est important pour piloter un avion. Il m’a dit que pour effectuer un voyage direct et sûr, il fallait, à l’aide de la boussole, mettre le cap sur le point d’arrivée. Puis, tout au long du vol, on devait veiller à ce que l’avion ne dévie jamais de la direction établie. En suivant cette explication, j’ai fait tout de suite le parallèle entre un voyage en avion et le voyage de la vie : je dirais aujourd’hui le « Saint Voyage ». Il m’a semblé comprendre que là aussi, il s’agissait, dès le départ, de fixer avec précision le cap, la route de notre vie qui est Jésus Abandonné. Puis, tout au long du trajet, ne faire qu’une seule chose : lui rester fidèle. Oui, la seule voie à laquelle Dieu nous appelle tous est celle-ci : aimer Jésus Abandonné, toujours Cela signifie étreindre toutes les souffrances de notre existence. Cela signifie mettre l’amour en pratique, en adaptant toujours notre volonté à la sienne, en « tuant » la nôtre pour laisser vivre la sienne. […] Aimer Jésus Abandonné signifie connaître la charité, savoir comment faire pour aimer notre prochain (comme Lui, jusqu’à l’abandon). Aimer toujours Jésus Abandonné signifie mettre en pratique toutes les vertus qu’il a vécues lui-même à ce moment-là, de façon héroïque. […] Le désir ardent de ne pas perdre de temps sur notre chemin, m’incite à affirmer qu’« orienter la boussole » de notre âme sur Jésus Abandonné, est ce qu’il y a de mieux à faire pour continuer jusqu’au bout notre voyage, et le parcourir même avec une certaine facilité. J’ai remarqué que le pilote est entièrement libre de ses mouvements il n’utilise ni rênes, ni volant, comme pour conduire une calèche ou une voiture ; de même, si nous orientons notre « boussole spirituelle » sur Jésus Abandonné, nous n’aurons pas besoin d’autre moyen pour arriver au but à coup sûr. Et de même que, dans un voyage en avion, on ne rencontre ni les surprises des virages car on avance sur la ligne aérienne, ni les montagnes car on s’élève tout de suite en haute altitude, de même dans le voyage de la vie, par l’amour pour Jésus Abandonné, on se place aussitôt à bonne hauteur. On ne s’effraye pas des imprévus, on ne ressent pas tellement la fatigue de la montée car, pour Lui, surprises, fatigues et souffrances sont déjà toutes prévues et attendues. Comment demeurer fidèle à Jésus Abandonné ? Dès le réveil, chaque matin, fixons l’aiguille de notre boussole sur Lui en lui disant : « Me voici. » Puis durant la journée, de temps en temps, donnons un coup d’œil pour voir si nous avons toujours le cap fixé sur Jésus Abandonné. S’il n’en est pas ainsi, alors, par un nouveau « Me voici », nous nous remettons dans sa direction et le voyage ne sera pas compromis. […] Si nous faisons le voyage de la vie en compagnie de Jésus Abandonné, nous pourrons à la fin répéter la célèbre phrase de sainte Claire : « Va sûrement, sois sûre ô mon âme, parce que tu as un bon compagnon sur ta route. Va, car Celui qui t’a créée, t’a toujours gardée et t’a sanctifiée. » […]

Chiara Lubich

(D’une conférence téléphonique, Rocca di Papa, 5 janvier 1984) Extrait de : « Garder le cap », in : Chiara Lubich, La vie est un voyage, Ed. Nouvelle Cité, p.10.  

Le testament de Chiara Lubich: “Soyez une famille”

Aujourd’hui, 14 mars, marque le treizième anniversaire de la mort de Chiara Lubich, la fondatrice du mouvement des Focolari. Depuis le 14 mars 2008, à cette même date, les communautés des Focolari dispersées sur tous les continents se réunissent pour faire mémoire d’elle et pour prier ensemble, en se souvenant de l’héritage qu’elle a confié au Mouvement : “Soyez une famille”. «Si aujourd’hui je devais quitter cette terre et qu’une dernière parole m’était demandée pour exprimer notre idéal, je vous dirais, sûre d’être comprise de façon exacte: “Soyez une famille”». https://youtu.be/QKwgvxsUU2E

Un Centre Chiara Lubich pour personnes âgées en Amazonie

Un Centre Chiara Lubich pour personnes âgées en Amazonie

De l’engagement d’une petite communauté des Focolari envers les plus vulnérables est né un Centre pour personnes âgées dans un village de la forêt  péruvienne, qui porte le nom de la fondatrice du Mouvement. Il y a quatre ans mon mari Javier, nos trois filles et moi-même (Jenny) sommes arrivés d’Argentine avec l’intention de vivre dans le Pérou profond. Nous portions en nous l’idéal de l’unité. Dès que nous sommes arrivés à Lámud, une ville située en plein coeur de l’Amazonie, sachant que l’évêque du diocèse était de passage, nous avons couru le saluer et nous nous sommes présentés comme membres du mouvement des Focolari. « C’est une grande joie de voir que les focolari sont arrivés en Amazonie ! », nous a-t-il dit en nous donnant sa bénédiction et en nous encourageant à d’aller de l’avant. Nous avons ensuite passé un accord avec le curé de la paroisse, qui nous a demandé de prendre en charge la Pastorale sociale et la Catéchèse familiale dans les villes qui font partie de la paroisse. Nous sommes donc allés en banlieue pour prendre contact avec la réalité sociale du lieu, parfois accompagnés de nos filles. Nous avons découvert une Lámud  cachée, marquée par de nombreuses souffrances. Nous avons décidé de commencer à aller auprès des personnes les plus fragiles, en fait les plus âgées, (troisième âge). Certaines d’entre elles n’avaient même pas un lit digne de ce nom pour mourir. Nous avions à l’esprit la méditation de Chiara Lubich : « Une ville ne suffit pas ». Nous avons parcouru les quartiers périphériques à la recherche de ceux qui étaient seuls, abandonnés, pour leur apporter un peu de tendresse, un mot d’espoir, de la nourriture, des vêtements et nous leur avons demandé de prier pour nous, alors que nous commencions notre aventure dans ces lieux complètement nouveaux pour nous. Au bout d’un certain temps, nous avons commencé à  rêver d’offrir à ces personnes un logement décent, un repas chaud et, surtout de la compagnie pour remédier à leur solitude. Un rêve qui, si d’un côté il semblait lointain, de l’autre il semblait presque à portée de main, à tel point que nous nous sommes dit : « Oui, nous le pouvons ! Nous devons faire quelque chose de plus concret qu’une simple visite. » Ensemble, nous avons établi un plan : quelques lignes, mais chaque phrase nous encourageait davantage à aller de l’avant. Nous avons également réfléchi au nom à donner à la maison. Nous nous sommes regardés dans les yeux et avons décidé qu’il s’appellerait : « Hogar y Centro de Día para Adultos Mayores, Chiara Lubich » (“Maison et Centre de jour pour personnes âgées Chiara Lubich”). Pendant ce temps, notre rêve prenait forme. Il y a eu de nombreux événements et contacts avec des personnes qui se passionnaient pour le projet. Entre-temps, Jenny avait fait plusieurs expériences de volontariat en Argentine. L’occasion s’est présentée pour elle d’être embauchée par la municipalité du district de Lámud, pour travailler précisément au service des personnes âgées ! Enfin, nous nous sommes sentis encouragés par les paroles du Pape qui nous a invités, en tant que laïcs, à travailler en faveur des plus défavorisés, encore plus au cours de cette période de pandémie. Bref, d’heureuses coïncidences nous ont fait penser que Jésus aurait été heureux de voir naître une Œuvre pour les plus petits, dans la forêt péruvienne. C’est-à-dire une maison de retraite digne et accueillante pour les personnes du troisième âge de cette province amazonienne. Pendant ce temps, nous avons vu que tout se passait à un rythme effréné. Ainsi, confiant pleinement dans la Providence de Dieu et dans le pouvoir de la prière, nous avons pris de plus en plus conscience que Jésus ne nous abandonnerait pas et nous étions certains qu’avec notre petite communauté, nous ne serions jamais seuls. À l’époque, nous avons signé le bail de la maison et entamé les procédures légales pour nous constituer en association à but non lucratif. Un groupe de personnes de la communauté avait déjà rejoint volontairement le projet. Ils avaient répondu par un “oui” très fort à l’engagement de travailler pour le bien des personnes les plus vulnérables de Lámud et de la province de Luya (département d’Amazonas). Nous avons immédiatement aménagé un lieu pour pouvoir commencer à offrir aux personnes âgées un repas chaud par jour, fourni par la municipalité. C’est pourquoi désormais, petit à petit, nous évaluons chaque étape à franchir pour atteindre notre objectif, qui est d’offrir aux personnes âgées, exposées à la solitude et à l’abandon, non seulement de la nourriture mais aussi la possibilité de résider de façon permanente dans le Centre. Mais plus que des titres, des noms et des statuts, notre désir est que règne dans cette maison le climat d’unité, d’harmonie et de famille que Chiara Lubich nous a laissé en héritage, et c’est pour cette raison que le Centre porte son nom. Jenny, Javier et la communauté de Lámud (département d’Amazonas, Pérou)

Expérience recueillie et traduite par Gustavo E. Clariá

 

La géopolitique courageuse du pape François

La géopolitique courageuse du pape François

La catégorie incontournable du pontificat du pape François, confirmée également en Irak, est la fraternité. Son témoignage personnel et ecclésial, son magistère et ses relations avec le monde musulman, font désormais de la fraternité une figure géopolitique. La rencontre historique avec al-Sistani. Ces jours-ci, de nombreux acteurs tentent de faire le bilan de la visite du pape François en Irak. Je pense qu’il est difficile, voire impossible, d’en tenter un exhaustif. Les questions en jeu sont trop nombreuses et, surtout, nous sommes trop proches, à proximité immédiate d’un événement mondial articulé, que seul le passage du temps permettra de comprendre dans toute sa signification. Il est évident que certains éléments plus que d’autres ont frappé l’imagination de ceux qui ont suivi les différents événements dans un contexte qui, à certains égards, dans sa réalité brute, risquait presque de paraître surréaliste. Si nous pensons aux voyages pontificaux inaugurés par Woityla à partir de 1979, nous étions habitués à des scénarios et à des arrière-plans très différents : des foules océaniques, une préparation chorégraphique qui frôlait souvent la perfection et, surtout, des événements qui laissaient l’image, surtout dans les premières années de l’ère du pape polonais, d’une foi forte, au centre de l’histoire, en contraste avec le monde athée d’où venait le pape polonais. Le pape François, qui dès le début de son pontificat a introduit l’idée d’une Église accidentée  et l’a comparée à un hôpital de campagne, s’est attaché ces dernières années à véhiculer cette image de l’Église et l’a fait pratiquement partout où il est allé. De son premier voyage officiel à Lampedusa, port et cimetière de migrants, en passant par Bangui, où il voulait inaugurer son inattendu et extraordinaire Jubilé, à Mossoul, où la scène avait pour décor des décombres et des murs encore perforés par des balles de différents calibres. Et nous ne pouvons pas oublier Tacloban, où il a bravé un typhon imminent pour se tenir aux côtés des survivants d’un autre événement catastrophique ; Lesbos, où il a passé un temps précieux à écouter les histoires inédites de réfugiés d’origines diverses. Mais la leçon de François ne concerne pas seulement son engagement à montrer que le visage le plus précieux de l’Église est celui qui est accidenté. Il s’agit plutôt de la manière dont il fait preuve de proximité, de la chaleur nécessaire pour faire sentir à ceux qui souffrent la communauté chrétienne. Il s’engage surtout à projeter ces communautés sur la scène mondiale, pour dire que c’est la véritable Église, que nous devons tous chérir et qui témoigne réellement du Christ. Comme il l’a dit dans le vol de retour, Bergoglio respire dans ces moments-là, parce que c’est son appel pétrinien, celui pour lequel le conclave l’a élu sans savoir et sans imaginer où la barque de Pierre allait le mener. Nous le voyons et le vivons tous au cours de ces années. Et les voyages en sont probablement le miroir le plus fidèle, qui ne trahit pas et ne laisse aucune place aux malentendus. D’un autre côté, ce n’est pas nouveau. Comme ses prédécesseurs, le pape argentin démontre sa capacité à lire et à décoder les signes des temps et offre un témoignage crédible du fait que l’Église est un témoin dans le temps, interceptant les problèmes et les questions clés, offrant des réponses souvent à contre-courant de celles qu’impose le monde politique, international et, aujourd’hui, financier. Face à la réalité que François se trouve à vivre, y compris celle, sans précédent (du moins en ces termes), de la pandémie, la catégorie essentielle de son pontificat, confirmée aussi en Irak, est la fraternité. Le témoignage personnel et ecclésial de Bergoglio, son Magistère et ses relations, surtout mais pas seulement, avec le monde musulman, en font désormais une figure géopolitique. Sa rencontre avec le Grand Ayatollah al-Sistani l’a également démontré. Les implications de ces quarante-cinq minutes sont fondamentales. Nous savons tous, en effet, que le grand nœud que l’Islam doit aujourd’hui dénouer est interne à son monde : la tension jamais apaisée mais désormais dangereusement aiguisée entre les sphères sunnite et chiite. C’est ici qu’il faut chercher les racines de bon nombre de problèmes que connaissent les musulmans et à cause desquels, également, beaucoup meurent. Bergoglio a fait preuve d’un grand tact politique en voulant rencontrer al-Sistani, le représentant le plus significatif du chiisme spirituel, bien éloigné de la théocratie iranienne qui, depuis la révolution khomeyniste des années ’80 du siècle dernier, a poussé le monde iranien à se faire le champion de cette frange du kaléidoscope musulman. Al-Sistani a toujours pris ses distances par rapport au choix théocratique des ayatollahs iraniens, et a été pendant des décennies un chef spirituel et religieux reconnu. Entre autre, il est né en Iran. La rencontre entre les deux hommes s’est déroulée à huis clos, mais comme l’a décrit le pape François sur le vol de retour, il s’agissait d’un moment de spiritualité, « un message universel . J’ai ressenti le devoir, […] d’aller rendre visite à un grand, un sage, un homme de Dieu. Et ce n’est qu’en l’écoutant que l’on peut s’en rendre compte. […] Et c’est une personne qui a cette sagesse… et aussi la prudence. […] Et il a été très respectueux, très respectueux lors de la rencontre, et je me suis senti honoré. Même au moment de prendre congé : il ne se lève jamais, et il s’est levé, pour me saluer, deux fois. C’est un homme humble et sage. Cette rencontre a fait du bien à mon âme. C’est un moment de lumière ». Bergoglio s’est ensuite risqué à une appréciation qu’aucun pape n’avait peut-être eu le courage d’exprimer par le passé : « Ces sages sont partout, parce que la sagesse de Dieu s’est répandue dans le monde entier. Il en va de même pour les saints, qui ne sont pas seulement ceux qui sont sur les autels. Ce sont les saints de tous les jours, ceux que j’appelle ceux de « la porte à côté », les saints – hommes et femmes – qui vivent leur foi, quelle qu’elle soit, avec cohérence, qui vivent les valeurs humaines avec cohérence, la fraternité avec cohérence ». Tout cela n’est pas passé inaperçu. Les commentaires positifs pleuvent de toutes parts, à commencer par le monde musulman lui-même. Sayyed Jawad Mohammed Taqi Al-Khoei, secrétaire général de l’Institut Al-Khoei de Najaf, figure de proue du monde chiite irakien et directeur de l’Institut Al-Khoei qui fait partie de la Hawza de Najaf, un séminaire religieux fondé il y a près de mille ans pour les érudits musulmans chiites, a été très clair dans son appréciation. « Bien qu’il s’agisse de la première rencontre dans l’histoire entre le chef de l’establishment islamique chiite et le chef de l’Église catholique, cette visite est le fruit de nombreuses années d’échanges entre Nadjaf et le Vatican et renforcera sans aucun doute nos relations interconfessionnelles. Cela a été un moment historique pour l’Iran également. » M. Al-Khoei a affirmé l’engagement à « continuer à renforcer nos relations en tant qu’institutions et individus. Nous nous rendrons bientôt au Vatican pour veiller à ce que ce dialogue se poursuive, se développe et ne s’arrête pas ici. Le monde est confronté à des défis communs et ces défis ne peuvent être résolus par un État, une institution ou une personne seule ». L’agence AsiaNews rapporte également certains commentaires positifs parus dans la presse iranienne, qui a largement couvert cette rencontre historique et l’a célébrée comme une « opportunité pour la paix ». Cette nouvelle a fait la une des journaux et organes d’information de la République islamique. Sazandegi, une publication historique proche de l’aile réformatrice, a souligné que les deux chefs religieux sont aujourd’hui « les porte-drapeaux de la paix mondiale ». Il a qualifié leur rencontre en tête-à-tête au domicile du chef spirituel chiite d’ « événement le plus efficace [dans l’histoire] du dialogue entre les religions ».

Roberto Catalano

Le Burundi et le projet « On peut y arriver ! »

Le Burundi et le projet « On peut y arriver ! »

Microcrédit et microfinance communautaires pour soutenir la croissance de projets en expansion. Le témoignage de Rose sur l’importance de l’initiative soutenue par l’Amu. BIRASHOBOKA en Kirundi signifie « ON PEUT Y ARRIVER ». C’est de cette conviction qu’est né au Burundi (Afrique) le projet de Microcrédit et de Microfinancement communautaire. Malgré les grandes difficultés dans lesquelles le pays se trouve encore – il est le deuxième pays le plus peuplé d’Afrique et l’un des cinq pays ayant les indices de pauvreté les plus élevés au monde – l’Amu, Action pour un Monde Uni-Asbl, une organisation non gouvernementale de développement inspirée par la spiritualité du Mouvement des Focolari, soutient depuis un certain temps les capacités des communautés locales. En effet, depuis 2007, en pleine synergie avec l’asbl CASOBU (Cadre Associatif des Solidaires du Burundi), elle aide les familles locales dans un processus de formation et d’amélioration de leurs conditions de vie. Avec le projet « On peut y arriver ! », il vise à créer des groupes de microcrédit communautaires dont les membres peuvent s’autofinancer pour créer des activités de travail et, dans un deuxième temps, à créer un groupe de microfinance communautaire pour soutenir la croissance de projets en expansion. « Dans mon groupe, nous avons commencé il y a 13 ans, dit Rose, avec le premier crédit que j’ai obtenu, je me souviens très bien que je n’ai rien fait de particulier, j’ai acheté des vêtements et des biens dont j’avais besoin, mais le reste, je l’ai gaspillé. Au début, je ne savais pas comment créer une entreprise et ce qui se passait souvent, c’est que j’avais du mal à rembourser les crédits que j’avais reçus. Puis j’ai réalisé que je ne pouvais pas continuer à prendre un prêt sans un projet concret et j’ai finalement décidé de commencer le projet de restaurant avec les premiers 300 000 Fbu (150 €). J’ai commencé à acheter des casseroles, des plats et peu à peu j’ai ouvert le restaurant. C’était en 2009, je n’avais pas encore de travailleurs. À cette époque, mes enfants m’aidaient à la cuisine et je prenais le bus pour apporter la nourriture à la ville où j’avais mes clients. Comme ils ont appris à me connaître et que la clientèle a augmenté, j’ai pu embaucher des travailleurs. Je suis fière que grâce au salaire qu’ils perçoivent, je participe aussi à la réalisation de leurs rêves ». Rose, heureuse d’avoir entrepris ce voyage, est maintenant en mesure de fournir un salaire à 5 autres familles en plus de la sienne. Elle aimerait maintenant améliorer et développer son entreprise, par exemple en louant une maison plus grande, où elle pourrait cuisiner et réduire ses frais de restaurant et de déplacement. C’est une décision très courageuse car il s’agit d’un gros investissement et Rose n’a ni les qualifications ni les garanties nécessaires pour obtenir un prêt auprès d’une banque. Et c’est précisément pour Rose et beaucoup d’autres personnes qui, comme elle, souhaitent développer leurs entreprises que le projet AMU et CASOBU est né, en soutenant le démarrage d’une institution communautaire de microfinance pour offrir des services d’épargne et de crédit à des personnes qui ont de grands rêves mais qui sont encore non bancarisables. Pour soutenir le projet, cliquez ici

Lorenzo Russo