PAROLE DE VIE D’OCTOBRE 2003
Les actes comme les paroles de Jésus déconcertent toujours. Entre autres à propos des enfants. Son époque les considérait comme socialement insignifiants et n’ayant pas leur place dans le monde des « adultes ». Les apôtres n’en voulaient donc pas autour de Jésus. Ils dérangeaient ! Même attitude chez les grands prêtres et les scribes. « Voyant les enfants qui criaient dans le temple : “Hosanna au Fils de David”, ils s’en indignèrent » et demandèrent à Jésus de remettre de l’ordre . Jésus a, lui, une toute autre attitude. Les enfants, il les appelle, il les attire à lui, étend la main sur eux pour les bénir. Il les présente même comme des modèles à ses disciples :
« le Royaume de Dieu est à ceux qui sont comme eux »
Dans un autre passage de l’Evangile, Jésus dit que si nous ne changeons pas et si nous ne devenons pas comme des enfants, nous n’entrerons pas dans le royaume des cieux .
Pourquoi le royaume de Dieu leur appartient-il ? Parce que l’enfant s’abandonne avec confiance à son père et à sa mère : il croit à leur amour. Quand il est dans leurs bras, il se sent en sécurité, il n’a peur de rien. Même s’il prend conscience d’un danger autour de lui, il lui suffit de se serrer encore plus fort contre son papa ou sa maman pour se sentir tout de suite protégé. Quelquefois c’est le papa lui-même qui le place dans une situation difficile, pour lui faire faire un saut, par exemple. Même dans ce cas-là l’enfant s’élance avec confiance.
C’est ainsi que Jésus voit le disciple du royaume des cieux, le chrétien authentique. Comme l’enfant, il croit à l’amour de Dieu, se jette dans ses bras en toute confiance. Il ignore la peur, ne se sentant jamais seul. Il croit que tout ce qui lui arrive est pour son bien. A-t-il une préoccupation ? Il la confie au Père, sûr que tout se résoudra. Comme un enfant, il s’abandonne totalement à lui.
« le Royaume de Dieu est à ceux qui sont comme eux »
Les enfants dépendent complètement de leurs parents. Ceux-ci leur donnent nourriture, vêtements, soins, éducation… « Enfants de l’Evangile », nous dépendons nous aussi du Père. Il nous nourrit comme il nourrit les oiseaux du ciel, nous habille comme les lys des champs. Il connaît et satisfait nos besoins, même avant que nous les exprimions . Le royaume de Dieu même, nous n’avons pas à le conquérir. Nous le recevons comme un don des mains du Père.
Tant que l’enfant ne connaît pas le mal, il ne le commet pas. De même, le disciple de l’Evangile, en aimant, fuit le mal et redevient innocent. Sans expérience, l’enfant affronte la vie avec confiance, comme une aventure toujours nouvelle. De même, l'« enfant de l’Evangile » confie tout à la miséricorde de Dieu. Oubliant le passé, il commence chaque jour une vie nouvelle, ouvert aux suggestions de l’Esprit, toujours créatif. Seul, l’enfant ne peut apprendre à parler. Il a besoin qu’on le lui enseigne. De même, le disciple de Jésus ne suit pas son propre raisonnement. Il apprend tout de la Parole de Dieu, y compris parler et vivre selon l’Evangile.
L’enfant a tendance à imiter son propre père. Si on lui demande ce qu’il fera plus tard, il dit souvent qu’il aura le métier de son père. Ainsi l’« enfant de l’Evangile » imite le Père céleste, qui est Amour, et il aime comme lui : il aime tout le monde, car le Père « fait lever son soleil sur les méchants et sur les bons, et tomber la pluie sur les justes et les injustes » ; il est le premier à aimer, car le Christ nous a aimés alors que nous étions encore pécheurs ; il aime gratuitement, de façon désintéressée, comme notre Père du ciel…
C’est pourquoi Jésus aime s’entourer de petits enfants et les désigne comme modèles :
« Laissez les enfants venir à moi, ne les empêchez pas, car le Royaume de Dieu est à ceux qui sont comme eux »
En effet, les enfants continuent à nous surprendre. « Hier papa m’a demandé d’aller chercher quelque chose à la cave, m’écrit Betty, une petite fille de 6 ans de Milan. Il faisait noir dans l’escalier et j’avais peur. Alors j’ai prié Jésus et j’ai senti qu’il était près de moi. »
Irène, Ilaria, Laura, trois sœurs qui habitent Florence, s’en vont en voiture avec leur maman pour faire les courses. En passant devant la maison de leur grand père, elles demandent de pouvoir aller lui dire bonjour. « Allez-y – dit la maman – je vous attends ». Quand elles reviennent, elles demandent : « Pourquoi n’es-tu pas venue ? » « Grand père ne s’est pas bien comporté vis-à-vis de moi. Comme ça, il comprendra… » Et Ilaria : « Mais maman, nous devons aimer tout le monde, même nos ennemis… » La maman ne sait plus quoi dire. Elle les regarde et sourit : « Vous avez raison. Attendez-moi là. » Et elle monte toute seule voir le grand père.
Les enfants nous apprennent à accueillir le royaume de Dieu.
Chiara LUBICH
Parole de vie de Septembre 2003
Ces paroles peuvent nous désorienter. Jésus dit de nous couper le pied ou la main, de nous arracher l’œil s’ils sont un sujet de scandale (s’ils nous incitent à pécher). Nous le savons, ces mots ne sont pas à prendre à la lettre bien qu’ils aient toute la force du « glaive à double tranchant » qu’est la Parole selon la définition de l’épître aux Hébreux (He 4,12). C’est donc plutôt une façon de parler qui exprime que, si une occasion de pécher se présente à nous, nous devons être disposés à renoncer à tout ce que nous pouvons avoir de plus cher – choses ou personnes – plutôt que de manquer l’entrée dans la vraie vie, c’est-à-dire la communion avec Dieu et notre pleine réalisation.
Dans les évangiles le mot « scandale » indique tout ce qui s’interpose entre Dieu et nous et constitue un obstacle à l’accomplissement de sa volonté ; c’est un peu comme des bâtons dans les roues qui bloquent notre route à la suite de Jésus, comme des embûches qui tendent à nous faire tomber dans le péché. Il y a dans la vie des moments où notre œil, notre main, notre pied « sont des occasions de scandale, de péché » ; en d’autres termes ils cherchent à nous inciter à renier Jésus, à le trahir, à lui préférer quelque chose d’autre.
C’est ce qu’a bien compris une jeune fille de 23 ans, Santa Scorese, qui en 1991, à Bari (Italie du Sud) a préféré mourir plutôt que de répondre aux avances malhonnêtes d’un garçon de son âge. Pour elle, Dieu valait plus que sa propre vie.
« Si ton pied entraîne ta chute, coupe-le; il vaut mieux que tu entres estropié dans la vie que d’être jeté avec tes deux pieds dans la géhenne ».
Cette Parole de vie arrache le masque du « vieil homme » qui est en nous. Le péché ne vient pas de ce qui est hors de nous, mais jaillit de notre propre cœur. Le « vieil homme » vit en nous lorsque nous cédons aux pièges du mal et que nous nous laissons dominer par nos mauvaises inclinations : l’égoïsme, la soif de pouvoir, de gloire, d’argent…
Notre « vieil homme » doit céder la place à « l’homme nouveau », à Jésus en nous.
Sommes-nous capables par nos propres forces de déraciner nos passions désordonnées et de faire naître en nous la vie divine ? Non, seul Jésus, par sa mort, peut faire mourir notre « vieil homme » et, par sa résurrection, peut faire de nous des hommes nouveaux. Lui seul peut nous donner le courage et la détermination de lutter contre le mal, lui seul peut nous remplir d’un amour absolu pour le bien. C’est de lui que proviennent la liberté intérieure, la paix et la joie ineffable qui nous élèvent au-dessus des bassesses du monde et nous font expérimenter dès maintenant l’avant-goût du Ciel.
« Si ton pied entraîne ta chute, coupe-le; il vaut mieux que tu entres estropié dans la vie que d’être jeté avec tes deux pieds dans la géhenne ».
L’ « homme nouveau » en nous doit grandir et se protéger des pièges du « vieil homme ». Que pouvons-nous faire pour cela ? J’écrivais en 1949 : « Il existe bien des façons de faire le ménage dans une pièce : on peut ramasser chaque brindille une à une ; on peut se servir d’un petit balai, d’un grand balai, d’un gros aspirateur, etc. Ou bien – pour se trouver dans un lieu propre – on peut changer de pièce et tout est fait. Il en va de même en ce qui concerne notre sanctification. Plutôt que de faire de gros efforts, nous pouvons immédiatement mettre notre moi de côté et laisser vivre Jésus en nous. C'est à dire vivre « transférés » dans l’autre : dans notre prochain, par exemple, qui – à tout instant – est proche de nous : vivre sa vie dans toute sa plénitude. »
Aimer ! Cela résume toute la doctrine de Jésus. Affiner notre cœur pour qu’il soit capable d’écoute, faire nôtres les problèmes et les soucis de nos prochains, partager leurs joies et leurs douleurs, faire tomber les barrières qui nous divisent encore, dépasser les jugements et les critiques, sortir de notre isolement pour nous mettre à la disposition de ceux qui sont dans le besoin ou qui sont seuls, construire dans notre entourage l’unité que Jésus désire.
Si nous vivons ainsi, Dieu nous attire dans une communion toujours plus profonde avec lui, il nous rend forts et presque inattaquables devant les erreurs et l’attrait du monde.
« Si ton pied entraîne ta chute, coupe-le; il vaut mieux que tu entres estropié dans la vie que d’être jeté avec tes deux pieds dans la géhenne ».
Jésus ajoute qu’il faut couper énergiquement ce qui est pour nous une occasion de péché, qu’il s’agisse de choses, de personnes, de situations. Cela équivaut à cette autre Parole de l’Évangile : « Renie-toi toi-même » . Le chrétien est quelqu’un qui a le courage de lutter contre ses tendances égoïstes, pour qu’elles ne se transforment pas en style de vie.
Au cours de ce mois, sortons de nous-mêmes pour aimer ceux qui nous sont proches ; soyons attentifs à nous détacher de ce qui ne mérite pas notre amour, ce qui entrave la vie de l’homme nouveau en nous, bref, arrachons ce qui doit être enlevé de notre cœur. Aucun sacrifice n’est trop grand pour maintenir la communion avec Dieu. Chaque émondage fera jaillir de notre cœur la joie, la vraie joie, celle que le monde ne connaît pas.
Chiara Lubich
PAROLE DE VIE D’AOÛT 2003
Le peuple d’Israël était fier d’avoir un Dieu aussi proche, lui parlant comme à des amis, pour lui donner des lois et coutumes aussi justes, comme nous pouvons le lire dans le Deutéronome.
Mais comme la Parole de Dieu nous fascine, nous courons le danger de croire qu’une fois écoutée, tout est fait. La Parole est à vivre, c’est le point important.
C’est contre cette tentation que l’apôtre Jacques mettait en garde les premiers chrétiens : « Soyez les réalisateurs de la parole et pas seulement des auditeurs qui s’abuseraient eux-mêmes ». Moïse n’enseignait rien d’autre quand il se tournait vers le peuple entier en disant :
« Et maintenant, Israël, écoute les lois et les coutumes que je vous apprends moi-même à mettre en pratique. »
Écouter la Parole, donc, et en vivre.
Lorsqu’il s’agit des paroles de Jésus, c’est lui-même qui est présent. Il prononce des paroles éternelles, actuelles à chaque instant ; universelles, c’est-à-dire valables pour tous les hommes et toutes les cultures. Contrairement aux paroles humaines, il ne s’agit pas de simples suggestions, exhortations ou même commandements. Ses Paroles contiennent et transmettent la vie.
À la fin de son grand sermon sur la montagne, Jésus nous a laissé à dessein une célèbre parabole : il compare celui qui écoute avec enthousiasme ses Paroles, mais sans les traduire ensuite en vie, à une maison construite sur le sable ; surviennent les vents et les pluies, ou plutôt d’autres propositions humaines plus faciles et plus séduisantes, des doctrines qui enchantent et plongent dans l’illusion avec leurs lueurs éphémères, et la personne s’effondre misérablement parce que le message évangélique n’est pas devenu vie en elle.
Jésus compare ensuite celui qui met sa Parole en pratique à une personne qui bâtit sa maison sur le roc : les épreuves, les tentations, les doutes, les désarrois peuvent survenir, mais cette personne a la force de rester sur le chemin de l’Évangile, elle continue à croire dans les Paroles de Dieu parce qu’elle en a expérimenté la vérité.
Vivre la Parole de Dieu suscite une véritable révolution dans notre vie et dans celle de la communauté des hommes et des femmes qui partagent la vie de l’Évangile avec nous.
Vivons donc les Paroles de Jésus avec la simplicité des enfants ! Il nous dit : « Donnez et on vous donnera » (Lc 6, 38). Combien de fois avons-nous expérimenté que plus nous donnons, plus nous recevons ! Et combien de fois nous sommes-nous retrouvés les mains pleines, parce que chaque fois que nous avons donné à qui se trouvait dans le besoin, nous avons reçu cent fois plus. Et quand nous n’avions rien à donner ? Jésus n’a-t-il pas dit : « Demandez, on vous donnera » (Mt 7, 7) ? Nous demandions… et notre maison se remplissait de toute sorte de biens envoyés par Dieu, afin que nous puissions donner encore.
Quand nous sommes écrasés par les soucis, devant une situation qui nous semble dépasser nos forces, quand nous sommes paralysés par l’angoisse, nous nous souvenons des Paroles de Jésus : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi je vous donnerai le repos… » (Mt 11, 28). Si nous jetons en Lui toute inquiétude, nous verrons la paix revenir et avec elle la solution à nos préoccupations.
La Parole de Dieu brise notre moi, anéantit notre égoïsme, remplace notre manière de penser, de vouloir, d’agir par celle de Jésus. Si nous la mettons en pratique, la logique divine et la mentalité évangélique pénétreront en nous et nous verrons tout avec des yeux neufs ; notre relation aux autres changera : des personnes qui ne se connaissaient pas auparavant, vivront ensemble la Parole de Dieu et partageront les expériences qu’elle suscite, se retrouveront frères, formant ainsi un peuple, une Église vivante. Une seule Parole de l’Évangile vécue par beaucoup pourrait changer le cours de l’histoire.
Vécue, la Parole de Dieu opère des miracles. Naît ainsi, dans notre cœur, une nouvelle confiance, illimitée, dans l’amour du Père, qui intervient chaque jour pour assister ses enfants. Ses Paroles sont vraies : si nous les vivons, Lui aussi les met en pratique, à la lettre, et Il nous donne ce qu’Il promet : le centuple ici sur la terre, la plénitude de la vie et la joie sans fin du paradis.
Chiara LUBICH

« Les religions peuvent-elles être partenaires dans la recherche de la paix ? »
« Pas de paix sans fraternité »
Le pluralisme religieux peut sembler au premier abord une source de divisions et de guerres. Il constitue en réalité un défi, affirme Chiara Lubich dans son intervention. Toutes les religions sont appelées à rétablir ensemble l’unité de la famille humaine, puisque dans toutes les religions, « l’Esprit Saint est, d’une manière ou d’une autre, présent et actif ». Le fait même du terrorisme, que l’on ne parvient pas à combattre par des moyens conventionnels, montre que les religions ont un grand rôle à jouer dans la recherche de la paix. « La cause la plus profonde du terrorisme » est « l’insupportable souffrance » face à un monde où le fossé entre riches et pauvres continue à s’élargir, a souligné Chiara Lubich à Caux. Une plus grande égalité, une solidarité plus vraie et surtout une plus juste distribution des biens sont indispensables. « Mais les biens ne bougent pas tout seuls, il faut faire bouger le cœur des gens ». « D’où donc, sinon des grandes traditions religieuses, pourrait émerger une stratégie de la fraternité capable de marquer un tournant jusque dans les relations internationales ? ». Pas de paix sans fraternité, soutient Chiara Lubich.
Sans perdre leur identité
L’idée de l’unité et de l’amour est enracinée en toute religion : « En pratique, cela signifie que nous sommes partenaires sur le chemin de la fraternité et de la paix. Les grandes traditions religieuses de l’humanité peuvent se rencontrer et se comprendre, sans perdre leur identité ». La fondatrice du Mouvement des Focolari a indiqué l’amour comme voie royale pour la compréhension entre les religions. « Si nous engageons le dialogue les uns avec les autres, si nous nous ouvrons l’un à l’autre dans un dialogue fait de bienveillance, d’estime réciproque, de respect et de miséricorde, nous nous ouvrons aussi à Dieu et faisons en sorte – ce sont les mots de Jean-Paul II – que Dieu soit présent au milieu de nous ». Chiara Lubich a dit sa conviction que c’est avec la présence de Dieu que l’on trouvera de véritables solutions aux problèmes actuels.
Le secret du dialogue
Le Mouvement des Focolari a acquis une riche expérience dans le dialogue interreligieux : « dans un climat d’amour réciproque, on peut en fait établir le dialogue avec ses partenaires, un dialogue où l’on cherche à se faire rien pour “entrer” en eux, en quelque sorte. Cette attitude qui consiste à “se faire un avec l’autre”, Chiara Lubich la présente comme le secret d’un dialogue qui peut conduire à l’unité. Elle demande une réelle pauvreté d’esprit : « vider notre tête de ses idées, libérer notre cœur de ses affections, notre volonté de ses désirs », pour pouvoir s’identifier avec l’autre et comprendre celui qui est en face de nous. Touché par une telle attitude, l’autre se met à son tour à poser des questions (c’est l’expérience de Chiara Lubich). « Nous pouvons alors passer à une “annonce respectueuse” et, par loyauté envers Dieu et envers nous-mêmes, mais aussi par honnêteté envers le prochain, dire ce que notre religion affirme sur le sujet dont il est question, sans rien imposer à l’autre, sans prosélytisme, seulement par amour. Et pour nous chrétiens, c’est le moment où le dialogue débouche sur l’annonce de l’évangile ».
Grande simplicité
Dans l’intervention suivante, Cornelio Sommaruga, président d’ « Initiatives et Changement », a souligné la grande simplicité avec laquelle Chiara Lubich répand son message d’amour. Rajmohan Gandhi, petit-fils du Mahatma Gandhi, professeur à l’université de New Delhi et responsable lui aussi de la structure qui a organisé le colloque, a ajouté : « Cette femme s’adresse au cœur des gens. Pas comme beaucoup le font, la voix puissante et passionnée, mais avec douceur et force. Le dialogue interreligieux tel que le conçoit Mme Lubich est d’une extrême importance, surtout à notre époque ». Le rabbin Marc Raphaël Guedj, fondateur de « Racine et Source », s’est dit impressionné par « la personnalité de Chiara, qui parle d’amour en étant amour, sagesse, sagesse de la vie quotidienne, … amour qui transforme le monde ». D’après le reportage de Beatrix Ledergerber-Baumer pour l’agence KIPA, 3 août 2003 16-08-2003
Les religions peuvent-elles être partenaires sur le chemin de la paix ?
Les religions peuvent-elles être partenaires sur le chemin de la paix ?
Je voudrais d’abord vous dire ma joie de me trouver ici dans ce Centre de Caux, qui a multiplié les initiatives pour consolider la société dans ses fondements moraux et spirituels et pour promouvoir la rencontre pacifique des cultures, des civilisations et des religions. Je remercie particulièrement Monsieur Cornelio Sommaruga de m’avoir invitée à donner ma contribution à cet important séminaire interreligieux.
Le sujet que l’on m’a demandé de traiter aujourd’hui a pour titre : « Les religions peuvent-elles être partenaires sur le chemin de la paix ? » C’est évidemment une question très importante et tout à fait d’actualité. Beaucoup croient que le nombre croissant d’actes terroristes, les guerres menées dans le monde en guise de réponse, la tension permanente au Moyen Orient, sont les symptômes d’un « conflit de civilisations » que les religions auraient provoqué et parfois exaspéré. Toutefois, cette façon de voir – qui peut venir des extrémismes et des fanatismes qui ne sont que des déformations des religions – résulte tout à fait partiale. Les croyants et les responsables de toutes les religions, aujourd’hui plus que jamais, se sentent en devoir de travailler ensemble pour le bien commun de toute l’humanité. Des organisations comme la Conférence Mondiale des Religions pour la Paix ou des initiatives comme la Journée de prière pour la Paix organisée par Jean-Paul II à Assise en janvier 2002, en sont la preuve. À cette occasion le Pape avait répété, au nom de tous les participants que « celui qui utilise la religion pour fomenter la violence en contredit l’inspiration la plus authentique et la plus profonde » et qu’ « aucune finalité religieuse ne peut justifier la pratique de la violence de l’homme sur l’homme » parce que « Offenser l’homme revient en définitive à offenser Dieu. » Après le 11 septembre 2001, l’humanité a découvert avec effroi le grand danger que représente le terrorisme. Ce n’est pas une guerre comme les autres, parce que les autres guerres – aujourd’hui, il y en a une quarantaine dans le monde – sont générées par la haine, le mécontentement, les rivalités, les intérêts personnels ou collectifs. Mais le terrorisme, comme l’a affirmé encore le Pape, est le fruit du Mal avec un M majuscule, des Ténèbres. Or ce genre de choses ne se combat pas avec les moyens humains, diplomatiques ou politiques. Les forces du Bien, avec un B majuscule, sont l’arme adéquate ; et le Bien avec un B majuscule, c’est, comme nous le savons, Dieu et tout ce qui vient de Lui. On peut donc le combattre avec des forces spirituelles, comme la prière, le jeûne, comme l’ont fait les représentants des religions du monde dans la ville de saint François. Nous savons que parmi les différentes causes du terrorisme, l’une d’elles, la plus profonde, est la déchirure insupportable d’un monde mi-pauvre mi-riche, ce qui génère dans les esprits le ressentiment, incite à la violence, à la vengeance. On voudrait un peu plus d’égalité, de solidarité, un plus juste partage des ressources. Mais les ressources ne bougent pas d’elles-mêmes, ce sont les cœurs qu’il faut changer. Ce sont les cœurs qui doivent communier. C’est pourquoi il faut diffuser l’idée de la fraternité et en répandre le style de vie, et même l’idée de la fraternité universelle puisque le problème est universel. Un frère s’occupe de son propre frère, il sait comment l’aider, il sait partager. Pour répondre à ce défi sans précédent, la contribution des religions est décisive. D’où, sinon des grandes traditions religieuses, peut partir une stratégie de fraternité, stratégie susceptible de marquer un tournant dans les relations internationales ? Le sentiment religieux est porteur d’énormes ressources spirituelles et morales, parce que les croyants vivent pour un Idéal, aspirent à une plus grande justice, s’engagent en faveur des démunis. Il faut ajouter à cela le poids politique de millions de croyants. Or tous ces éléments peuvent s’unir dans le champ des relations humaines et se traduire en actions susceptibles d’influencer positivement l’ordre international. Les Organisations Non gouvernementales font déjà beaucoup dans le domaine de la solidarité internationale. Ce qui manque, c’est que les États fassent des choix politiques et économiques aptes à construire une communauté fraternelle de peuples engagée pour la justice. Face à la stratégie de mort et de haine, la seule réponse valide est l’édification de la paix dans la justice. Mais sans fraternité il n’y a pas de paix. Seule la fraternité entre les individus et les peuples peut assurer un avenir pacifique. Du reste l’idée de la fraternité universelle et la paix, son corollaire, ne datent pas d’aujourd’hui. De grandes personnalités les ont prônées parce que « le plan de Dieu sur l’humanité est la fraternité ; l’amour fraternel est inscrit dans le cœur de tout un chacun ». « La règle d’or, disait le Mahatma Gandhi, est d’être amis du monde et de considérer la famille humaine “une”. » Et Martin Luther King : « Je fais le rêve que les hommes, un jour, [�] comprendront qu’ils sont faits pour vivre ensemble comme des frères. [�] ; que la fraternité deviendra le premier sujet à traiter d’un homme d’affaire et le mot d’ordre d’un gouvernant. » Dans le même sens, le Dalai Lama écrivait à ses disciples après les événements de septembre 2001 aux États-Unis : « Pour nous, la cause de ces événements est claire. […] Nous avons oublié les vérités les plus fondamentales. […] Nous sommes tous un. C’est un message complètement négligé par la race humaine. L’oubli de cette vérité est l’unique cause de la haine et de la guerre ». Malgré les destructions, une grande vérité de toujours peut surgir des décombres du terrorisme : nous constituons tous ensemble sur la terre une grande famille. Celui qui a indiqué à l’humanité cette vérité et lui en a fait don, un don essentiel, c’est Jésus. Avant de mourir, il a prié ainsi : « Père que tous soient un » (cf. Jn 17,21). En révélant que Dieu est Père et que les hommes sont, pour cette raison, tous frères entre eux, Jésus introduit l’idée de la fraternité universelle. Ce faisant, il détruit les murs érigés entre ceux qui sont « égaux » et ceux qui sont « différents », entre amis et ennemis. Chacun de nous, mû par sa propre foi religieuse, a sans aucun doute des expériences positives qui peuvent servir à la solution de problèmes semblables à ceux de notre époque. Et comme notre époque est celle où – pour reprendre l’expression d’un évêque spécialiste en ce domaine – « les religions doivent faire émerger de la profondeur de leurs traditions les forces spirituelles qui pourront aider l’humanité et la conduire sur la voie de la solidarité et de la paix » , permettez-moi de vous présenter mon expérience au contact de personnes de tout âge, langue, race et surtout religion, un peu partout dans le monde. C’est une expérience de dialogue qui peut fournir une clé pour un « vivre ensemble » fraternel et pacifique, et me paraît dans la ligne des sessions de Caux qui privilégient le témoignage personnel par rapport à l’exposition théorique. L’art d’aimer Soixante ans ont passé depuis le début de l’expérience du mouvement des Focolari, et pourtant nous ne cessons de nous surprendre car le chemin spirituel à travers lequel Dieu nous a conduits recoupe les autres chemins spirituels des chrétiens ainsi que celui de fidèles d’autres religions. Bref, nous nous émerveillons de pouvoir devenir partenaires dans le chemin de la fraternité et de la paix. Tout en gardant notre propre identité, ce chemin nous permet de nous rencontrer et de nous comprendre avec les grandes traditions religieuses de l’humanité. En d’autres termes, en nous mettant dans une attitude d’écoute obéissante de l’Esprit, nous avons appris comment réussir à mettre en pratique l’amour, l’amour du prochain, l’amour de nos frères, amour qui est inscrit dans les gènes de tout homme et de toute femme, créés à l’image de Dieu-Amour, de Dieu-Père. C’est la seule parole qui puisse faire de l’humanité une seule famille. Cet amour n’est pas un amour quelconque, mais un comportement qui nécessite certaines qualités. Pour les chrétiens, cet amour est participation à l’amour même de Dieu, tandis que, pour les autres fidèles, il n’est pas absent de leurs Livres Saints. Ce fut pendant la deuxième Guerre Mondiale que nous avons été éclairés sur la première qualité de cet amour, de ce style de vie. Face à l’écroulement de tous nos idéaux, à la perte de tous nos biens matériels, nous étions poussées à nous agripper à quelque chose qui ne passe pas, qu’aucune bombe ne puisse détruire : Dieu. Nous l’avons choisi comme unique Idéal de notre vie, en croyant, quelles que soient les adversités, à son Amour de Père, amour qui n’exclut aucun homme de la terre. Il ne suffisait pas, cependant, de croire à l’amour de Dieu. Il ne suffisait pas de l’avoir choisi comme Idéal de notre vie. Le sentiment de la présence de ce Père et les soins tendres qu’il nous prodiguait nous incitaient à nous faire « fils », à l’aimer à notre tour, à réaliser au fil des jours le projet particulier d’amour qu’il a sur chacun de nous, en d’autres termes à faire sa volonté. Or la première volonté d’un Père n’est-elle pas que ses enfants, tous ses enfants, se traitent en frères, s’aiment entre eux ? Il désire que nous aimions chacun, sans faire de discrimination, tout comme lui. Il n’est donc pas question de choisir entre le sympathique et l’antipathique, le beau ou le laid, le blanc, le noir ou le jaune, l’européen ou l’américain, le chrétien ou le juif, le musulman ou l’hindou. L’amour ne connaît aucune forme de discrimination. Cette foi dans l’amour que Dieu a pour ses créatures se retrouve, nous l’avons constaté, chez de nombreux frères et sœurs d’autres religions, à commencer par les religions abrahamiques qui affirment l’unité du genre humain, la sollicitude de Dieu pour toute l’humanité et le devoir de tout homme d’imiter le Créateur dans son comportement immensément miséricordieux envers chacun. Un dicton musulman affirme : « Dieu pardonne cent fois, mais il réserve sa suprême miséricorde à celui dont la piété a épargné la plus petite de ses créatures. » On reste sans paroles devant la compassion infinie pour chaque être vivant que le Bouddha a enseignée à ses disciples : « Vous, moines, vous devriez travailler au bien-être de beaucoup, au bonheur de beaucoup, mus de compassion pour le monde, pour le bien-être (…) des hommes ». Pour les chrétiens, il faut aimer chaque homme, car en chaque homme on aime le Christ. Lui-même nous dira un jour : « C’est à moi que vous l’avez fait » (cf. Mt 25,40). Aimer tous les hommes, sans distinction. Un autre trait de cet amour est universellement connu et mentionné dans les livres sacrés. Vivre cela pourrait suffire à faire du monde une grande famille : aimer comme soi-même, faire aux autres ce que l’on voudrait que l’on vous fasse à vous-même, ne pas faire aux autres ce que l’on ne voudrait pas qu’on vous fasse. C’est ce qu’on appelle la « Règle d’or » mentionnée dans la présentation de ce Séminaire. Elle a été exprimée par Gandhi en ces beaux termes : « Toi et moi nous ne sommes qu’un. Je ne peux te faire de mal sans me blesser moi-même. » La tradition musulmane dit : « Aucun parmi vous n’est un vrai croyant, s’il ne désire pour son frère ce qu’il désire pour lui-même » . L’Évangile l’énonce ainsi : « Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux » (Mt 7,12). Et Jésus commente : « C’est la Loi et les Prophètes. » (Ibid) Cette simple norme que l’Esprit a répandue dans toutes les religions est un condensé de tous les commandements de Dieu. Il faut donc lui faire une large place dans le dialogue interreligieux. De cette règle – qui à juste titre a été appelée « d’or » – découle une norme qui, si elle était appliquée, pourrait être à elle seule un puissant moteur pour l’harmonie entre les individus et les groupes. Pour mettre en pratique l’amour authentique envers les autres il faut encore quelque chose qui se condense en une formule toute simple, de trois mots seulement : « Se faire un ». Se faire un avec les autres signifie nous charger de leurs poids, de leurs soucis, de leurs souffrances et de leurs joies. Se faire un est d’une extrême importance dans le dialogue interreligieux. Quelqu’un a dit : « Connaître la religion de l’autre implique que l’on entre dans sa peau, que l’on voie le monde tel qu’il le voit et que l’on pénètre la signification qu’a pour l’autre d’être bouddhiste, musulman, hindou, etc. » Or « vivre l’autre » touche tous les aspects de la vie et est l’expression du plus grand amour. En effet, en vivant ainsi, on est mort à soi-même, à son « moi » et à tout attachement. On parvient au « rien de soi » auquel aspirent les grandes spiritualités et au vide d’amour qui se réalise au moment où l’on accueille l’autre. Cette attitude consiste à se placer face à chacun dans l’attitude d’apprendre, et l’on a réellement quelque chose à apprendre. L’étape suivante de l’art d’aimer est peut-être celle qui requiert le plus d’efforts. Elle est la pierre de touche de l’authenticité de notre amour, de sa pureté et, par conséquent, de sa réelle capacité d’engendrer l’unité entre les hommes et la fraternité universelle. Il s’agit d’être les premiers à aimer, c’est-à-dire de ne pas attendre que l’autre fasse le premier pas, mais être les premiers à prendre l’initiative. Cette manière d’aimer est un risque que nous prenons personnellement, mais si nous voulons aimer à l’image de l’amour de Dieu et développer la capacité d’amour qu’Il a déposée en nos cœurs, nous devons faire comme Lui qui n’a pas attendu d’être aimé de nous, mais au contraire nous prouve depuis toujours et de mille manières qu’Il nous aime en premier, quelle que soit notre réponse. Nous avons été créés comme un don les uns pour les autres et nous nous réalisons dans la mesure où nous nous mettons au service de nos frères et sœurs dans cette attitude d’amour qui devance l’amour de l’autre. C’est un enseignement que nous ont transmis par leur exemple les grands fondateurs des religions. Jésus nous en a donné l’exemple. Lui qui a dit : « Nul n’a de plus grand amour que celui qui donne sa vie pour celui qu’il aime » (Jn 15,13), il l’a réellement donnée, lorsque nous étions pécheurs et que nous n’aimions pas. Lorsque deux ou plusieurs personnes sont dans l’attitude d’aimer en premier, l’amour entre elles devient réciproque. Or l’amour réciproque est le le plus sûr fondement de la paix et de l’unité dans le monde. Certes, nous en avons fait l’expérience, pour quiconque entreprend aujourd’hui de déplacer les montagnes de la haine et de la violence, la tâche est immense et ardue. Mais ce qui est impossible à des millions d’hommes isolés et divisés semble devenir possible à des personnes qui ont fait de l’amour mutuel, de la compréhension réciproque, de l’unité, la dynamique essentielle de leur vie. Tout cela a une raison, possède une clé de voûte et porte un nom. Lorsque nous entrons en dialogue entre nous, fidèles de religions différentes, que nous nous ouvrons les uns aux autres pour établir un dialogue où se mêlent la bienveillance, l’estime réciproque et le respect, nous nous ouvrons en même temps à Dieu et « nous permettons – l’expression est de Jean-Paul II – que Dieu soit présent au milieu de nous » . Cette présence, fruit de notre amour réciproque, est la force secrète qui dynamise nos efforts en faveur de la paix et de la fraternité universelle et permet qu’ils soient couronnés de succès. L’Évangile l’annonce aux chrétiens en ces termes : si deux ou plusieurs personnes s’unissent dans l’amour authentique, le Christ lui-même, qui est la Paix, est présent au milieu d’elles et donc en chacune d’elles. Peut-il y avoir de plus grande garantie, de meilleure chance pour ceux qui s’efforcent d’être des instruments de fraternité et de paix ? Cet amour réciproque, cette unité qui procure tant de joie à ceux qui les mettent en pratique, demande quoi qu’il en soit détermination, entraînement quotidien, sacrifice. C’est ici qu’entre en jeu, dans le langage chrétien, un mot à la fois éblouissant de lumière et profondément dramatique, un mot que le monde ne veut pas entendre prononcer, car il le considère folie, absurdité, non-sens. C’est le mot « croix ». On ne réalise rien de bon, d’utile, de fécond en ce monde, si l’on ignore, si l’on refuse l’effort, la souffrance, en un mot, la croix. S’engager à vivre et à porter la paix, à susciter la fraternité, n’est pas une partie de plaisir ! Il faut du courage, il faut savoir souffrir. Je ne suis pas en train de vous parler d’une utopie mais d’une réalité vécue depuis plus de 50 ans par des millions de personnes, une expérience pilote de la fraternité universelle et de l’unité que nous désirons tous. Grâce à ce style d’amour, des dialogues féconds ont été entrepris entre notre mouvement et des chrétiens de nombreuses Églises, avec des fidèles de différentes religions et avec des personnes de cultures les plus disparates. Ensemble nous avançons vers la plénitude de vérité à laquelle nous aspirons tous. L’expérience de dialogue interreligieux du mouvement des Focolari Je vais donc vous parler des occasions de rencontre que nous avons eues, dès les débuts du mouvement, avec des frères et des sœurs d’autres credo. La première expérience vraiment forte que nous avons faite fut un contact avec la tribu des Bangwa, une tribu du Cameroun profondément ancrée dans sa religion traditionnelle, qui était décimée par une grave mortalité infantile et à laquelle nous allions prêter assistance. Un jour leur chef, appelé « Fon », a réuni les milliers de membres de son peuple dans une grande clairière dans la forêt, pour nous fêter en nous présentant leurs chants et leurs danses. J’étais présente et j’ai eu une très forte impression, comme si Dieu, comme un immense soleil, nous embrassait tous de son amour, eux et nous. Pour la première fois de ma vie j’ai eu l’intuition que nous aurions eu des relations avec des personnes de traditions non chrétiennes. L’événement fondateur de ce dialogue s’est produit à Londres, en 1977, à l’occasion de la cérémonie de remise du Prix Templeton pour le progrès des religions. À l’issue du discours que j’avais tenu, tandis que je sortais de la salle, les premiers à venir vers moi pour me féliciter ont été des juifs, des musulmans, des bouddhistes, des sikhs, des Hindous. L’esprit chrétien dont j’avais parlé les avait impressionnés, si bien que je compris avec clarté que nous ne devions plus nous occuper seulement de notre Église et des autres Églises, mais aussi de ces frères et sœurs d’autres crédos. C’est ainsi qu’a commencé notre dialogue interreligieux. Deux ans plus tard, j’ai eu l’occasion de rencontrer une personnalité bouddhiste, M. Nikkyo Niwano, fondateur au Japon de la Rissho Kosei-kai. Il m’a invitée à aller parler à Tokyo de mon expérience spirituelle devant 10 000 bouddhistes. Depuis, entre focolarini et membres de la Rissho Kosei-kai, des relations fraternelles sont établies partout où nous nous rencontrons dans le monde. De façon plus surprenante encore, toujours avec le bouddhisme, nous sommes entrés en contact avec d’éminentes personnalités du monachisme thaïlandais. Durant un long séjour dans notre cité-pilote internationale de Loppiano (Italie), une petite cité où les 800 habitants s’efforcent de vivre la fidélité à l’Évangile, deux moines ont très touchés de découvrir l’unité et la vie d’amour évangélique qu’ils ne connaissaient pas. De retour en Thaïlande, ces deux moines ont saisi toutes les occasions pour raconter à des milliers de fidèles et à des centaines de moines, leur expérience au contact du mouvement des Focolari. C’est ainsi qu’est né ce que j’appellerais un mouvement bouddhiste-focolarino, ou plutôt bouddhiste-chrétien, une sorte d’oasis de fraternité parmi celles que nous sommes en train de construire dans le monde. Par la suite j’ai été invitée en Thaïlande dans l’une de leurs Universités bouddhiste et dans un temple, où j’ai pu parler à des nonnes, des moines bouddhistes et des laïcs et laïques. Ils ont prêté une grande attention à mes paroles tandis que nous-mêmes nous avons été édifiés par le détachement qui les caractérise, par leur ascèse. Et le dialogue avec l’Islam ? 6 500 amis musulmans sont en contact avec le mouvement. Ce qui nous lie entre nous c’est notre spiritualité qui leur donne un nouvel élan et les encourage à mieux vivre ce que la spiritualité islamique a d’essentiel. Nous avons organisé plusieurs rencontres avec eux. Chacune d’elles a été caractérisée par une présence de Dieu tangible notamment lorsqu’ils prient, ce qui nous donne beaucoup d’espoir. J’ai personnellement touché du doigt que cette espoir n’est pas vain dans la mosquée Malcom Shabazz de Harlem aux États-Unis. C’était il y a six ans. Je me trouvais devant 3 000 musulmans afro-américains à qui j’avais été invitée à parler de mon expérience chrétienne. Leur accueil, à commencer par celui de leur leader, l’Imam W.D. Mohammed, a été si chaleureux, si sincère, si enthousiaste que nous pouvons entrevoir un avenir très prometteur. Je suis retournée aux États-Unis il y a trois ans, à Washington, pour participer à un Grand Rassemblement organisé par ce mouvement et y parler de notre collaboration. Sept mille personnes, chrétiens et musulmans, y participaient. La joie qui nous envahissait n’était pas simplement humaine, nous nous sommes donnés une accolade sincère au milieu des applaudissements et nous nous sommes promis d’avancer dans cette voie aussi unis qu’il est possible, diffusant ce style de vie au plus grand nombre. Une autre oasis de fraternité. Il faut également évoquer les contacts toujours plus étroits que nous avons avec des frères et des sœurs juifs en Israël et un peu partout dans le monde. Ma dernière rencontre en date a eu lieu à Buenos Aires avec une nombreuse communauté. D’autres membres du mouvement ont eu d’autres contacts à différentes occasions. Nous nous sommes retrouvés avec une grande émotion et nous avons scellé entre nous un pacte d’amour réciproque si profond et si sincère que nous avons eu l’impression de dépasser d’un seul coup des siècles de persécution et d’incompréhension. Depuis trois ans nous avons commencé également un dialogue prometteur en Inde, avec les Hindous. Nous avons des contacts fraternels et intenses avec des mouvements gandhiens au Sud de ce grand pays. À Mumbai un dialogue profond s’est instauré avec des professeurs de l’Université Somaiya et de l’Institut culturel indien. Plus récemment nous avons établi de bonnes relations avec un mouvement numériquement très important, le Swadhyaya, dont l’objectif – l’unité dans la diversité et la fraternité – ressemble beaucoup au nôtre. Il y a un an nous avons tenu le premier colloque hindou-chrétien. L’atmosphère qui s’y est créée était d’une telle profondeur que nous avons pu leur faire connaître de nombreuses vérités de notre foi. C’était un peu comme si un horizon impensable jusqu’à présent s’était ouvert devant nous. Il y a quelques mois, je suis retournée en Inde et nous avons pu poursuivre ce dialogue au niveau de la spiritualité, niveau défini par un dignitaire de mon Église : « le point culminant des différentes formes de dialogue qui répond aux attentes les plus profondes des hommes de bonne volonté » . Nous envisageons de faire d’autres colloques du même genre, bouddhiste-chrétien et islamo-chrétien. En ce qui concerne l’expansion universelle de notre mouvement, nous sommes en contact avec les principales religions du monde, et environ 30 000 fidèles de ces religions partagent, dans la mesure du possible, la spiritualité et les buts du mouvement. Comment dialoguer ? Si notre dialogue interreligieux a connu une évolution aussi rapide et féconde, c’est parce que l’élément décisif et caractéristique a été l’art d’aimer dont j’ai parlé tout à l’heure. Dans le climat d’amour réciproque suscité par la mise en pratique de la règle d’or, on peut établir un dialogue avec ses partenaires, on s’efforce de se faire « rien » pour pouvoir entrer, d’une certaine manière, en eux. « Se faire rien », ce qui est synonyme de « se faire un » avec les autres. J’ai déjà parlé de « se faire un » et ces trois simples mots contiennent le secret du dialogue qui peut engendre l’unité. « Se faire un », en effet, n’est pas une tactique, une attitude extérieure ; ce n’est pas seulement un sentiment de bienveillance, d’ouverture et de respect, une absence de préjugés. C’est tout cela ensemble, avec quelque chose de plus. Cette pratique de « se faire un » exige que l’on chasse de sa tête les idées, de son cœur les affections, de la volonté tout ce qui nous empêche de nous identifier aux autres. On n’arrivera jamais comprendre un frère, le connaître, partager ses souffrances ou ses joies, si notre esprit est riche d’une préoccupation, d’un jugement, d’une idée… ou de quoi que ce soit d’autre. Pour se « faire un » il faut des esprits pauvres, des pauvres en esprit qui soient riches d’amour. Cette attitude très importante et incontournable, provoque un double effet : elle nous aide à nous inculturer dans la situation d’autrui, à connaître sa culture et son langage, et elle dispose notre interlocuteur à nous écouter. Nous avons remarqué, en effet, que lorsque l’on meurt à soi-même pour se « faire un » avec les autres, ceux-ci sont frappés et demandent des explications. On peut ainsi passer à « l’annonce respectueuse » c’est-à-dire à une annonce mue par un devoir de loyauté envers Dieu et envers nous-mêmes et de sincérité envers notre prochain : nous proposons à notre interlocuteur ce que notre foi affirme sur le sujet abordé, sans rien imposer, sans un soupçon de prosélytisme, uniquement par amour. Pour nous chrétiens, à ce moment-là le dialogue débouche sur l’annonce de l’Évangile. Nous travaillons avec de nombreux frères et sœurs des grandes religions et nous expérimentons avec eux la fraternité. Dès lors nous sommes convaincus que le pluralisme religieux de l’humanité peut perdre peu à peu sa connotation de division et de conflit et représenter, dans la conscience de millions d’hommes et de femmes, une sorte de défi : celui de recomposer l’unité de la famille humaine, parce que l’Esprit Saint est présent et actif d’une façon ou de l’autre dans toutes les religions, non seulement dans les personnes prises individuellement mais aussi dans les traditions religieuses elles-mêmes. Jean-Paul II a défini la magnifique Journée mondiale de prière pour la paix à Assise de 1986 « une manifestation admirable de l’unité qui nous lie au-delà des différences et des divisions. » Que notre cœur soit empli d’amour authentique. Nous aurons alors de bonnes raisons de nourrir une grande espérance quant à l’unité entre les fidèles des grandes religions et à la fraternité vécue par toute l’humanité. Merci de votre écoute. Que Dieu, dans son amour, nous prenne dans une seule étreinte. Chiara Lubich
Initiatives et Changement
Initiatives et Changement
L’ancien président de la Croix rouge internationale est aujourd’hui président de la Fondation suisse « Caux – Initiatives et Changement » et de l’association internationale Initiatives et Changement. Toutes deux sont issues du groupe d’Oxford et sont, selon les termes de Cornelio Sommaruga, « comme le Mouvement des Focolari, un produit de la deuxième guerre mondiale ». En 1938, alors que les états se préparaient à la guerre, le fondateur du mouvement, Frank Buchmann, a lancé un appel à « un réarmement moral et spirituel » pour « un monde sans haine, sans peur et sans avarice ». Après la guerre, sous le nom de Réarmement Moral (MRA), le mouvement a soutenu le processus de réconciliation entre les ennemis, et en premier lieu entre l’Allemagne et la France. Aujourd’hui, Initiatives et Changement consiste en un réseau de personnes de cultures, religions et générations différentes, engagées dans un processus toujours nécessaire qui vise à « renouveler le monde ». A Caux, près de Montreux, dans le canton de Vaud (Suisse), se déroulent tous les ans des colloques sur des thèmes divers. Ceux de cette année portaient sur : « Du conflit à la communion », « Le facteur spirituel et religieux dans une société laïque », « Initiatives de paix » et « Sécurité humaine pour la prévention des conflits ». Par Beatrix Lederberger-Baumer pour l’agence KIPA, 3 août 2003
PAROLE DE VIE DE JUILLET 2003
Dans un arbre, nous voyons le feuillage, les fleurs et les fruits, mais non les racines dont l’arbre tire sa vie. De même pour chacun de nous. Nous sommes appelés à aimer, à servir, à créer des rapports de fraternité, à travailler à la construction d’un monde plus juste. Mais comment y arriver sans racines, sans vie d’union avec Dieu, sans rapport d’amour personnel avec lui soutenant notre action ?
D’autre part, il est vrai aussi qu’à travers les feuilles la lumière et la chaleur fortifient les racines de l’arbre. De même notre amour envers notre prochain nourrira à son tour notre amour pour Dieu, le vivifiera, lui permettra de se concrétiser. L’amour de Dieu et celui du prochain expriment un unique amour. La vie intérieure est la racine de la vie extérieure et réciproquement.
Cette vie intérieure, la parole de vie de ce mois nous invite à la cultiver, surtout par le recueillement, la solitude, le silence, afin d’approfondir notre rapport personnel avec Dieu. Tout comme si Jésus nous redisait les paroles qu’il adressa à ses disciples, un jour qu’il les voyait fatigués après s’être beaucoup donnés aux autres.
« Venez à l’écart dans un lieu désert et reposez-vous un peu. »
Jésus lui-même prenait parfois de la distance par rapport à ses nombreuses occupations. Il y avait des malades à guérir, des foules à instruire et à rassasier, des pécheurs à convertir, des pauvres à aider et à consoler, des disciples à guider… Et pourtant, même quand tout le monde le cherchait, il savait se retirer hors des lieux habités, seul avec son Père . C’était comme s’il rentrait chez lui. Dans cet entretien avec son Père, il trouvait les paroles qu’il allait adresser aux foules , il repensait sa mission, il retrouvait des forces pour affronter le jour nouveau. Et cela, il nous demande à nous aussi de le faire.
« Venez à l’écart dans un lieu désert et reposez-vous un peu. »
Qu’il est donc difficile de nous arrêter ! Nous sommes quelquefois pris dans un tourbillon de travail et d’activités, dans une sorte d’engrenage dont nous avons perdu le contrôle. La société nous impose souvent un rythme de vie frénétique : il faut produire toujours davantage, faire carrière, se distinguer… Comment alors parler de solitude et de silence au dehors et au-dedans de nous ? Et pourtant ils sont la condition pour écouter la voix de Dieu, pour imprégner notre vie de sa parole, pour approfondir notre rapport d’amour avec lui. Que pouvons-nous entreprendre de fructueux sans cette sève intérieure ?
D’où la nécessité de périodes, même brèves, de repos physique et mental, ne serait-ce que pour nous dégager du stress. Serait-ce perdre notre temps que de répondre à l’invitation de Jésus ?
« Venez à l’écart dans un lieu désert et reposez-vous un peu »
En restant avec Jésus, les disciples trouveront en lui le repos : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi je vous donnerai le repos […] et vous trouverez le repos de vos âmes ». Le meilleur repos consiste à prendre le temps de “rester” avec Jésus, de vivre dans sa grâce, dans l’amour, en se laissant façonner et guider par sa Parole. Surtout avant la prière, qui est le moment privilégié pour “rester” avec lui, il est bon de se détacher de tout, de se reposer un peu, de se recueillir, d’entrer dans le secret et le silence de notre « chambre intérieure » . Ne mesurons pas le temps consacré à la prière. Là, plus nous croyons en perdre, plus nous en gagnons. Dans l’union avec Dieu, nous trouverons la paix. Ainsi nous parviendrons à nous entretenir en permanence avec lui, dans un recueillement constant, même au-delà du temps de la prière. C’est mon expérience depuis tant d’années.
Un jour j’ai écrit :
« Seigneur ;
Je te porte en mon cœur, tu es le trésor
qui doit pénétrer tous mes actes.
Prends soin de moi, garde-moi,
il est tien l’amour : joie et peine.
Que nul autre ne recueille un soupir.
Cachée en ton tabernacle,
je vis, je travaille pour tous.
Que soit tienne la caresse de ma main,
et tien aussi l’accent de ma voix. »
Même si nous ne pouvons nous isoler du tourbillon du monde, nous pouvons toujours aller au fond de notre cœur, à la recherche de Dieu. Il est toujours là. Il suffit de lui dire avant chaque action : « C’est pour toi, Jésus ». Ainsi nous pourrons nous mettre un peu à l’écart, voyant et vivant tout dans le surnaturel. Offrons-lui chaque souffrance, petite ou grande.
Notre communion avec lui s’intensifiera. Notre équilibre en tirera un bénéfice. Nous en serons régénérés pour retourner à nos activités et aimer davantage encore.
Chiara LUBICH

Le dialogue : clef de voûte de la construction de l’unité
« Le christianisme, malgré la crise spirituelle où se trouve aujourd’hui la civilisation, est capable de se renouveler continuellement. » Dans ces paroles du Pr Peter Blaho, Recteur de l’Université d’Etat de Trnava (Slovaquie), est contenue la signification profonde de la cérémonie solennelle qui s’est déroulée, ce matin là, dans la grande salle du Centre Mariapolis de Castelgandolfo. Là, les plus hautes autorités académiques de cette Université ont conféré à Chiara Lubich le doctorat honoris causa en théologie. Sur scène, se côtoyaient les drapeaux slovaque, européen et italien. Une image éloquente. La Slovaquie fait en effet partie des dix pays qui entreront dans l’Union Européenne en mai 2004. Des différentes interventions émergeaient les racines chrétiennes, toujours vivantes, de la culture slovaque qui a donné vie à l’Université de Trnava, en 1635. Les paroles du Doyen de la Faculté de Théologie, le Pr Ladislav Csontos, qui a suscité cette reconnaissance, révélaient l’héroïsme vécu sous le régime communiste : une histoire de fidélité, de persécutions, d’arrestations des enseignants de l’Institut de Théologie – fondé par les Jésuites et repris depuis 1992 par l’Université de Trnava -, et des étudiants, le plus souvent prêtres ou religieux ordonnés clandestinement. Venait en évidence l’activité intense qui a permis, malgré le régime, d’alimenter les études par l’enseignement du Concile Vatican II. D’où la place réservée au dialogue par la faculté, à tous les niveaux : dans les activités didactiques, par les séminaires scientifiques interdisciplinaires, les conférences et les publications. « Pour ces raisons – a déclaré le doyen, qui a présenté la personnalité et l’œuvre de la lauréate -, la théologie de l’unité et du dialogue de Chiara Lubich est très proche de notre faculté et sa contribution est la raison principale qui nous a poussé à proposer cette reconnaissance. » Il a qualifié la fondatrice des Focolari de « personnage-clef du mouvement œcuménique et du dialogue interreligieux. » Et il a rappelé que « son œuvre est apparue en Slovaquie avec le Mouvement des Focolari, qui y avait déjà mis des racines à l’époque du régime communiste, apportant à ceux qui y adhéraient un grand soutien spirituel et, dans la vie de l’Eglise locale, l’esprit du Concile Vatican II. » Le Recteur de l’Université a parlé des « chemins » et des « modèles nouveaux » dans les rapports interpersonnels ouverts par Chiara Lubich, avec des retombées innovantes dans les domaines économique, politique et culturel, sur la base du dialogue qu’elle promeut, qui s’appuie sur le commandement évangélique de l’amour. « Il faut construire l’unité du monde sur ce fondement spirituel, a-t-il affirmé, si nous ne voulons pas périr. »
Dans sa leçon magistrale, Chiara Lubich a communiqué les racines profondes de ce dialogue qui plongent au cœur même de la vie trinitaire. Elle en a montré le dynamisme : « Il se manifeste, a-t-elle expliqué -, comme un don de soi réciproque et inconditionnel, une mutuelle abstraction de soi, une communion totale. » Il exige un « rien d’amour », ce «’’ non être ‘’ qui révèle l’Etre comme Amour. » Elle en a montré la force de transformation dans la vie de la famille, dans les différents domaines de la société, dans la vie de l’Eglise, dans le domaine œcuménique et interreligieux. C’est donc un entrelacement de cultures différentes, de charismes anciens et nouveaux qui a émergé de cet événement. Et il aura des retombées. Une promesse solennelle a été demandée à la lauréate : ne pas faire manquer l’université de Trnava de son conseil éclairé et continuer à faire connaître la vérité au cœur de laquelle est contenue le Salut du genre humain. 26.06.2003

Chiara Lubich, docteur honoris causa en théologie
En conférant le titre de « docteur honoris causa » à la fondatrice du Mouvement des Focolari, une des plus importantes personnalités chrétiennes de notre temps, l’université de Trnava veut témoigner l’orientation chrétienne qui l’inspire et promouvoir dans la société slovaque l’ouverture au dialogue entre foi et science, culture et politique, pour que les conflits engendrés par les différences culturelles deviennent enrichissement et progrès social. Cette reconnaissance attribuée à Chiara Lubich a été proposée par la faculté de théologie en raison de la profonde consonance entre les valeurs incarnées par cette personne et la tradition de l’Universitas Tyrnaviensis, la première université slovaque, fondée en 1635, caractérisée par des valeurs spirituelles et une liberté de pensée puisées dans les racines historiques du peuple slovaque, c’est-à-dire les valeurs du christianisme, de la culture européenne et de la démocratie. Ces dix dernières années, depuis sa réouverture, l’université de Trnava s’attache à mettre en valeur les personnes qui ont particulièrement contribué au développement et à l’affirmation de ces valeurs dans la société.
[:it]Io sono ateo, ma tu devi essere matto[:en]I may be an atheist, but you are crazy![:es]Yo soy ateo, pero tú debes estar loco[:pt]Eu sou ateu, mas você deve ser louco
PAROLE DE VIE DE JUIN 2003
Ces paroles, Jésus ressuscité les adresse à ses apôtres avant de monter au ciel. Il avait accompli la mission reçue du Père : il avait vécu, était mort et ressuscité pour libérer l’humanité du mal, la réconcilier avec Dieu, l’unifier en une seule famille. Maintenant, avant de retourner vers le Père, il confie à ses apôtres la tâche de continuer son œuvre et d’être ses témoins dans le monde entier.
Cette mission les dépasse infiniment, Jésus le sait bien. C’est pour cela qu’il leur promet l’Esprit Saint, lui qui, à la Pentecôte, transformera les simples pêcheurs craintifs de Galilée en courageux annonciateurs de l’Évangile. Rien ne pourra plus les arrêter. À tous ceux qui voudront les empêcher de témoigner, ils répondront : « Nous ne pouvons pas taire ce que nous avons vu et entendu » .
À travers les apôtres, Jésus confie la tâche de témoigner à l’Église entière. C’est l’expérience de la première communauté chrétienne de Jérusalem qui, vivant « dans l’allégresse et la simplicité du cœur », attirait chaque jour de nouveaux membres . C’est aussi celle des membres de la première communauté de l’apôtre Jean. Ils annonçaient ce qu’ils avaient entendu, vu de leurs yeux, contemplé et touché de leurs mains, c’est-à-dire le Verbe de la vie…
Par notre baptême et notre confirmation, nous aussi nous avons reçu l’Esprit Saint (Ac 2,38). Il nous pousse à témoigner et à annoncer l’Évangile. Et à nous aussi, Jésus assure :
« Vous allez recevoir une puissance, celle du Saint Esprit qui viendra sur vous. »
C’est lui, le don du Seigneur ressuscité. Il habite en nous comme en son temple, il nous éclaire et il nous guide. Esprit de vérité, il fait comprendre les paroles de Jésus, les rend vivantes et actuelles, il nous fait aimer la sagesse, nous suggère ce que nous devons dire et comment le faire. Esprit d’amour, il nous enflamme de son amour même, nous rend capables d’aimer Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme, de toutes nos forces, et d’aimer tous ceux que nous rencontrons sur notre chemin. Esprit de force, il nous donne le courage et la force d’être cohérents avec l’Évangile et de toujours témoigner de la vérité. Seul le feu de l’amour qu’il insuffle dans nos cœurs nous permet d’accomplir la grande mission que Jésus nous confie :
« vous serez alors mes témoins… »
Comment être témoins de Jésus ? En vivant la vie nouvelle qu’il a apportée sur la terre, l’amour, et en en montrant les fruits. Je dois suivre l’Esprit Saint qui, chaque fois que je rencontre un frère ou une sœur, me rend prêt à me « faire un » avec lui ou avec elle, à les servir à la perfection ; qui me donne la force de les aimer lorsque je les considère comme mes ennemis ; qui emplit mon cœur de miséricorde pour savoir pardonner et me préoccuper de leurs besoins ; qui me pousse à communiquer au moment opportun ce que j’ai de plus beau dans le cœur…
À travers mon amour, c’est celui de Jésus qui se révèle et se transmet. Pensons à la loupe qui concentre les rayons du soleil. Elle peut enflammer ainsi une touffe d’herbe, alors que, mise directement face au soleil, celle-ci ne prend pas feu. Il se produit parfois la même chose pour ceux que la religion semble laisser indifférents : ils peuvent s’enflammer en rencontrant quelqu’un qui participe à l’amour de Dieu. Une telle personne joue alors le rôle de la loupe qui éclaire et enflamme.
Avec cet amour de Dieu dans le cœur, et grâce à lui, on peut aller loin, et faire partager notre découverte à bien d’autres :
«… jusqu’aux extrémités de la terre. »
Les « extrémités de la terre » ne sont pas simplement géographiques. Elles indiquent aussi, par exemple, des personnes proches de nous qui n’ont pas encore eu la joie de connaître véritablement l’Évangile. Notre témoignage devrait aussi les atteindre.
Nous voulons vivre la « règle d’or », présente dans toutes les religions : faire aux autres ce que nous voudrions qu’ils fassent pour nous.
L’amour de Jésus nous demande également de nous « faire un » avec chacun, dans le complet oubli de soi, jusqu’à ce que l’autre, doucement touché par l’amour de Dieu en nous, veuille se « faire un » avec nous, dans un échange réciproque d’aides, d’idéaux, de projets, d’affection. Ce n’est qu’alors que nous pourrons parler, et ce sera un don, dans la réciprocité de l’amour.
Que Dieu fasse de nous ses témoins devant les hommes afin qu’au Ciel, Jésus – comme il nous l’a promis – se déclare pour nous devant son Père.
Chiara LUBICH

Berlin : entre les chrétiens le mur s’écroule
Le premier Kirchentag œcuménique national a débuté le jeudi 28 mai près de la porte de Brandebourg, monument berlinois hautement symbolique. La liturgie principale en a été présidée par l’archevêque catholique, le cardinal Georg Sterzinsky, et par l’évêque luthérien de Berlin et du Brandebourg, Mgr Wolfgang Huber. Le lieu choisi, les dimensions, la poussée œcuménique de la base donnée par les 200 000 participants soulignent l’importance de l’événement, de même que la présence des plus hautes autorités politiques : le président fédéral Johannes Rau, le chancelier Gerhard Schroeder et le maire Klaus Wowereit. Dès les premiers mots du présentateur : « Enfin, enfin, le moment tant attendu… », une clameur s’élève qui l’empêche de continuer. Un cri de joie, comme l’explosion des désirs de tous les participants, de leurs attentes, de leurs espérances et des souffrances passées… Une réaction qui laisse à penser que c’était le juste moment. La liturgie a été vécue dans la joie et l’enthousiasme avec des moments de profond recueillement. Tous ont conscience que c’est le Christ lui-même qui est au centre de tout. Johannes Rau, président de l’Allemagne, souligne l’importance d’un tel événement dans le pays d’où est partie la Réforme : « Ce qui arrive ici aujourd’hui dépasse le cadre des Églises chrétiennes et est important pour la société tout entière ». Très applaudi, le message du pape est formulé dans un langage particulièrement « évangélique » : « Le Kirchentag doit devenir un grand signe œcuménique, parce que la communion dans la foi est plus forte et plus importante que ce qui nous divise encore ». Le pape encourage aussi à défendre ensemble les valeurs de la famille et de la vie. Il parle ensuite des souffrances dues à l’unité non encore réalisée entre les chrétiens. « Il faut repenser au fondement de notre foi. Je suis content que le Kirchentag œcuménique reprenne “l’année de la Bible” (initiative œcuménique de l’année en Allemagne). Je vous encourage à prier avec la Bible, à lire et à méditer la parole de Dieu et à éclairer votre vie par le message que Dieu nous a révélé et qui nous a été transmis par la communauté des fidèles tout au long des siècles ». Il souligne la nécessité de la conversion comme condition de l’œcuménisme : « Dieu veut que nous soyons un afin que le monde croie ! », et il encourage à poursuivre les efforts sur le chemin œcuménique « avec sensibilité et respect, avec patience et courage, fidèles à la vérité et animés d’un amour authentique ». Il termine ainsi son message : « Si vous vous mettez ensemble sous la bénédiction de Dieu, vous pourrez devenir encore davantage bénédiction les uns pour les autres et pour le monde, surtout là où il souffre et est déchiré ». Le chancelier Gerhard Schroeder prend ensuite la parole : « Malgré la sécularisation, de Berlin part en ce moment ce message : l’Église est vivante, elle est vitale, elle est attirante, en particulier pour les jeunes ». La foule passe sous la porte de Brandebourg, acte symbolique signe de l’espérance que s’écroule aussi le mur invisible qui sépare encore les Églises. Le soir, dans les rues du centre de Berlin, grande fête organisée par les paroisses, mouvements, groupes et associations. Les chrétiens apparaissent sous un jour moderne, jeune, attirant, joyeux, ouvert… un christianisme qui revient à la mode ! Le mot d’ordre et les quatre « domaines d’intérêt » Le mot d’ordre : « Soyez une bénédiction » a été approfondi dans les quatre « domaines d’intérêt » de la Journée œcuménique des Églises :
1 – montrer la foi – vivre en dialogue 2 – chercher l’unité – se rencontrer dans la diversité 3 – respecter la dignité humaine – garder la liberté 4 – vivre dans le monde – agir avec responsabilité
Dans chacun de ces « domaines d’intérêt » se sont déroulés un grand nombre de rencontres, prières, tables rondes, conférences et initiatives variées. Un livret de 720 pages illustre le vaste programme de ces journées.
[:it]La partecipazione del Movimento dei Focolari
Il a donné sa vie pour son frère
Il a donné sa vie pour son frère
« Il a donné sa vie pour son frère » ont titré les journaux locaux en relatant la mort tragique de Nelson Gomez. Don Nelson était curé, directeur spirituel du séminaire et aumônier de l’hôpital d’Armenia, en Colombie. Une de ses nièces, qui travaillait chez lui comme secrétaire, confie : « Il est mort en vivant la Parole de l’évangile qui dit de donner sa vie pour ses frères. Il nous disait toujours qu’il faut vivre pour les autres et non pour soi ». Un matin, deux malfaiteurs s’introduisent dans le presbytère et enferment don Nelson dans une pièce pour chercher de l’argent à voler. Son frère, marié et père de famille, habite à deux cents mètres. Quelqu’un l’ayant prévenu qu’il se passe quelque chose de bizarre au presbytère, il entre discrètement par une autre porte, mais se retrouve aussitôt le pistolet pointé sur lui. En entendant son frère, Nelson force la porte et s’interpose entre eux, criant aux voleurs : « Ne lui faites pas de mal ! ». L’un des hommes tire et l’atteint en pleine poitrine. C’était le 22 mars. L’amour de don Nelson était le fruit d’une grande maturité et d’une volonté constante, depuis son plus jeune âge. Voici son histoire retracée à grands traits à partir d’une interview faite par Città Nuova il y a quelques années, lors d’un séjour de don Nelson en Italie pour étudier la pastorale de la santé. « Nous étions sept dans la famille et mon père travaillait la terre. Nous étions très pauvres, mais nous avions confiance en Dieu et le peu que nous avions, nous étions heureux de le partager avec ceux qui avaient encore plus besoin que nous. Je me rappellerai toujours un pommier de notre jardin, dont les fruits nous étaient interdits parce qu’ils étaient réservés aux malades de la paroisse. » La pauvreté ainsi vécue, de façon évangélique, s’est transformée en une école d’humanité. Plus difficile a été son rapport avec la maladie. « J’avais 6 ans quand j’ai attrapé un virus qui attaque le système nerveux central et je suis resté paralysé pendant plusieurs mois. C’est un mal qui peut reprendre à tout moment et qui oblige à rester toujours sous traitement. D’autres maladies se sont ajoutées avec les années, et j’ai subi quatre interventions aux yeux. Les traitements et les hospitalisations, je connais ! Si jeune, je ne comprenais pas grand chose au sens de cette souffrance qui m’empêchait de vivre comme les garçons de mon âge. » Il a d’abord le projet de fonder une famille, mais se sent appelé à une donation plus universelle. Il comprend que sa route est autre et, à 21 ans, décide de devenir prêtre. Durant les premières années de séminaire, sa santé ne lui pose pas de problème majeur. Mais au début de son expérience pastorale, il se retrouve paralysé à la suite d’une nouvelle attaque qui le renvoie à l’hôpital. « Même si les médecins m’assuraient que je m’en sortirais et que je pourrais mener une vie normale, j’ai sombré dans la crise la plus noire et je voyais mon avenir compromis. » Dans cette situation, grâce à un prêtre ami qui vit la spiritualité des Focolari, il approfondit un aspect de la vie du Christ : son abandon sur la croix. En s’identifiant à lui, en le reconnaissant en chaque souffrance personnelle ou d’autrui et en l’accueillant par amour dans sa vie, il fait l’expérience d’une véritable renaissance intérieure. « Chaque souffrance physique ou morale a pris pour moi un sens. D’où une force intérieure insolite, un sentiment de paix et de joie. J’avais découvert le trésor le plus précieux et, même si je n’avais pas pu devenir prêtre, il ne m’aurait rien manqué pour me réaliser en tant que chrétien. » De 1983 à 1993, il se donne sans compter pour le diocèse : vicaire dans une grande paroisse, aumônier de l’hôpital, et formateur au grand séminaire d’Armenia. Puis Nelson décide de réaliser un projet qui lui tient à cœur depuis un certain temps : aller à Rome faire des études en pastorale de la santé. Un choix préparé par sa propre expérience de malade et qui veut répondre à la question, fondamentale pour lui : comment vivre la maladie « sainement » du point de vue spirituel, et la mort comme passage de cette vie à l’autre ? « Chez nous, il y avait peu de prêtres préparés dans ce domaine et seul le désir de mieux servir mes frères malades m’a convaincu de partir de l’autre côté de l’océan pendant deux ans, malgré mon état de santé. » Il commence ses études à Rome en 1993. Il vit avec deux autres prêtres, un argentin et un hollandais, et approfondit de façon concrète la spiritualité de l’unité qui l’avait attiré en Colombie. Cette expérience le prépare à un apostolat particulier auprès des malades du sida. Il est amené à en connaître beaucoup au cours de cette période et il a pour chacun un mot ou un silence, il partage sa souffrance, l’aide à se réconcilier avec Dieu. A son retour en Colombie, Nelson se voit confier par son évêque la responsabilité diocésaine de la pastorale de la santé. Une donation continuelle qui ira encore plus loin. Donner sa vie ne s’improvise pas et Nelson est parti sur un dernier et héroïque acte d’amour.
[:it]L’amore di Dio anche dietro una malattia[:en]God’s love hiding behind an illness
Mon nom était sur la liste noire
Aucun Burundais n’oubliera l’année 1993. L’assassinat du nouveau Président avait déchaîné une vague de haine entre ethnies, la rage, le désir de vengeance, en particulier en nous, jeunes. Et moi-même, comme tous – hommes, femmes, enfants – j’ai dû apprendre à utiliser un fusil. Une question me hantait : comment mettre fin à cette situation ? Un jour, justement dans mon village, a eu lieu un affrontement entre des militaires du gouvernement et des rebelles, qui a fait 50 morts. C’étaient des amis, des gens que je voyais chaque jour dans la rue. Je ne pouvais pas accepter cela, la vengeance m’apparaissait comme l’unique solution. Je devais prendre les armes et combattre pour défendre mon peuple. Un dimanche, je me suis réfugié dans une église pour me mettre à l’abri de la pluie. Je me suis retrouvé dans une salle où se tenait une rencontre autour de la Parole de Dieu. Invité par quelqu’un à rester parmi eux, j’ai commencé à observer les personnes : elles étaient différentes des autres, elles racontaient des épisodes de leur vie qui avaient un lien avec l’Evangile. Elles parlaient d’unité, de fraternité, et surtout je les voyais vécues entre eux. J’étais bouleversé et je voulais essayer moi aussi de faire mien le défi de l’amour. J’avais choisi l’université comme banc d’essai. Dans ces salles que je fréquentais chaque jour, les divisions étaient très vives à cause de la présence d’étudiants de toutes les ethnies. Beaucoup d’entre eux avaient perdu des parents à la guerre et ils vivaient de haine et de vengeance. Etudier dans ces conditions n’était certes pas facile. Malgré cela, je saluais chacun le matin en arrivant aux cours, même si certains me prenaient pour un fou. J’ai subi des accusations, des critiques des gens de mon ethnie, j’étais conscient d’avancer sur un terrain miné mais je n’ai pas changé d’attitude. Je voulais démontrer que le dialogue est plus puissant que les armes, que l’amour est la solution à nos problèmes. Jésus lui-même était passé par là : je voulais, comme lui, donner ma vie pour un monde plus uni. En dehors de l’université, avec mes amis, nous n’avions pas de temps à perdre : aimer signifiait diffuser une culture de paix, recueillir des vêtements et de la nourriture pour les plus pauvres, organiser des moments de dialogue, des fêtes, des tournois sportifs. Tout cela pour démontrer qu’il est possible de vivre en frères. Ce n’est que deux ans plus tard qu’un de mes camarades de faculté a trouvé le courage de m’avouer qu’il avait mis mon nom sur la liste des ennemis à éliminer. Et c’est mon comportement qui l’avait fait changer d’avis. Il a jeté le pistolet qu’il portait toujours sur lu. Il avait décidé lui aussi de changer de vie. Jovin, du Burundi
[:it]Convegno nazionale ’Polo Lionello, casa degli imprenditori’

Chronique inédite des interventions de Marie dans l’Histoire
C’est une chronique inédite que présente au Congrès Marial le Pr Tommaso Sorgi, directeur du Centre Igino Giordani : chronique qui révèle la force de paix de Marie, en acte dans l’histoire des peuples, aux moments de plus grande souffrance. Il met en lumière « l’efficacité, politique aussi, du maniement comme arme, de ‘la couronne’ du chapelet. » Un seul exemple : il parle de ce qui s’est produit aux Philippines il y a quelque temps. A la moitié des années 80, les évêques lancent une campagne de prière pour une conversion personnelle, nécessaire pour obtenir du Ciel la libération de la dictature de Marcos. Cinq millions de Philippins y adhèrent. Le monde assiste à un retournement : « Le dictateur part en exil et la révolution du chapelet libère le peuple, sans effusion de sang. » Le Magnificat en acte : Marie magnifie le Seigneur qui « disperse les orgueilleux et renverse les puissants de leur trône… » Le Magnificat, donc, « peut être choisi comme modèle de l’action politique ». Ce sont les perspectives ouvertes par le Pr Sorgi, justement aujourd’hui, alors qu’il devient urgent de « renverser les catégories fondamentales du pouvoir. » L’intervenant propose « le Magnificat comme ‘charte’ sociale ». Mais la royauté de Marie, précise-t-il, est une « royauté d’amour », « une royauté maternelle ». La politique pourrait ainsi revêtir « la chaleur d’un service d’amour », « l’âme » dont elle a un « besoin extrême ».
« Les grands pays démocratiques choisissent la guerre comme méthode de résolution des conflits. » C’est la dénonciation forte du Pr Andrea Riccardi, fondateur de la Communauté Sant’Egidio, qui est intervenu durant la seconde journée du Congrès Marial International. Il pose « une interrogation qui inquiète tous » : « La guerre sera-t-elle à nouveau l’avenir du monde ? » Il souligne de manière particulière que « la guerre est encore une activité en grande partie masculine ». De là, le Pr Riccardi met en lumière la force de paix du « trait féminin », montrant en Marie celle qui, sous la croix, « vaincue » par la violence du meurtre de son fils, « cache, au milieu des larmes, une force de vie et d’espérance » ; et « cela ne s’explique pas par la logique du vaincu et du vainqueur, de l’ami et de l’ennemi ». « Le mystère de la foi que nous voyons en Marie – ajoute-t-il -, est que le fort peut se retrouver dans le faible, le petit dans le grand, la vie dans le corps de la mort ». « Marie représente aujourd’hui une force de paix au milieu des conflits. » « La sollicitude maternelle », qui va à la rencontre des nécessités des hommes, « même non-exprimées, est démontrée aux noces de Cana. Ce trait est mis en lumière par Anna Pelli, dans sa réflexion sur ce tableau de l’Evangile, un des Mystères lumineux approfondi à ce Congrès. Cette page de l’Evangile se reflète dans l’expérience racontée par Carmen et Maricel, une famille travaillée par la souffrance : difficultés économiques, alcool, drogue, tensions et répercussions sur les enfants, au nombre de huit. Cela se passe dans une baraque, à la périphérie de Manille : une histoire de résurrection à partie de la découverte de l’amour de Dieu et de Marie, modèle à imiter. Carmen, la maman, raconte à quel point sa vie a changé depuis qu’elle est entrée en contact avec le Centre social de Bukas Palad : elle a pu recommencer à aimer son mari, qui, depuis des années, buvait et jouait. Maricel, une des enfants, est sortie du milieu de la drogue où elle se trouvait depuis sept ans. Elle a pardonné à son père – qui, entre temps, avait changé de vie – et l’a assisté aux derniers jours de sa vie. Un miracle de l’amour, qui s’étend à présent à d’autres familles pauvres du quartier, auxquelles Carmen et Maricel se consacrent, en travaillant comme animateurs sociaux à Bukas Palad.
Le langage de l’Art a atteint, ce jour, un sommet ; il nous a fait pénétrer encore plus profondément dans ce Mystère lumineux et nous a portés au cœur de l’Evangile : le chorégraphe, Marinel Stefanescu, plus que de représenter la fête des Noces, a préféré saisir le sens le plus profond du miracle de l’eau, qui est changée en vin, symbole du sang même que Jésus allait verser pour accomplir le plus grand miracle, la Résurrection. Une autre page de cet événement marial intense, a été marquée par l’apport des nouveaux charismes dans la compréhension vitale de Marie et du Chapelet. Elle s’est ouverte par une table ronde réunissant des représentants de différents mouvements et communautés ecclésiales : le Renouveau Charismatique International, la Communauté Sant’Egidio, les Cursillos, Schoenstatt, les Légionnaires du Christ. « Je jouissais de pouvoir partager le témoignage de nombreux charismes : il me semblait voir Marie présente et vivante en chacun, et au sein de l’Eglise », écrivait un ‘navigateur’ du Paraguay qui a suivi le Congrès via Internet. Et, d’Argentine : « Le panel des intervenants de différents Mouvements a été le témoignage de la variété des dons qui rend l’Eglise belle aujourd’hui. » Au cours de la matinée, le témoignage particulièrement profond de Pasquale Foresi, co-fondateur des Focolari et premier focolarino prêtre. Ressortait de ce témoignage la physionomie du sacerdoce, renouvelée par l’empreinte de Marie, et la fécondité d’une vie toute donnée pour la construction de son Œuvre.

Marie, parole de Dieu vécue
Castel Gandolfo, 28 avril 2003
« Je suis contre les attentats suicides » ; « Et moi, je suis contre les bombardements sur vos villes » : discussion entre une jeune palestinienne et un soldat israélien à un poste de contrôle. Chronique « inversée » racontée sur la scène de la grande salle du Centre Mariapolis de Castel Gandolfo, où se déroule le congrès marial international organisé en cette année du rosaire demandée par le pape. Jean-Paul II désirait remettre à l’honneur cette prière mariale qu’il définit comme « un abrégé de l’évangile », et amener les hommes d’aujourd’hui à rechercher la paix et une nouvelle dimension de l’Esprit, à « contempler le Christ avec le regard de Marie » et à être comme lui des « constructeurs de paix » et d’un « monde plus conforme au dessein de Dieu ». Les nombreux témoignages apportés constituent une chronique qui montre la puissance de l’évangile, capable de désamorcer la haine si quelqu’un aime son ennemi. Passage obligé « après le 11 septembre qui nous a placés devant un carrefour, et il nous appartient de prendre la bonne route », comme l’a affirmé Piero Coda. C’est aussi l’expérience de Dieudonné, du Burundi : douze membres de sa famille ont été sauvagement massacrés, mais cela ne lui fait pas changer sa façon de vivre. Il décide de mettre en pratique l’art d’aimer évangélique, même vis-à-vis des militaires si souvent sans pitié. Il lui arrive d’en rencontrer à un moment où ils ont besoin d’aide, comme ce soldat ivre sur le bord d’un pont, qu’il a secouru. Ces témoignages illustrent les cinq tableaux au programme du congrès : les cinq mystères lumineux qui, accompagnés de réflexions théologiques, aident à comprendre les étapes de la vie de Jésus et de Marie. Premier tableau, le baptême de Jésus : « C’est l’invitation à reconnaître Jésus comme fils de Dieu – dit le père Fabio Ciardi dans son commentaire – de sorte qu’il puisse noyer notre « vieil homme » dans l’eau du baptême et nous faire renaître à une vie nouvelle, afin que nous nous retrouvions tous frères et sœurs dans le cœur de l’unique Père ». En retraçant l’histoire du rosaire, Mgr Domenico Sorrentino, du sanctuaire de Pompéi, a montré comment Jean-Paul II invite à dépasser l’attitude que nous avions jusqu’à présent : « Il ne se contente pas de confier la paix à l’intercession de Marie, il la présente comme un fruit de cette prière qui est “prière de paix”, parce qu’en nous faisant contempler le Christ, elle exerce une action pacifiante ».
Et c’est bien une expérience de contemplation que vivent à Castel Gandolfo les 1 500 personnes de 70 pays qui sont dans la salle et tous ceux qui sont reliés dans le monde entier, grâce aux onze satellites mis généreusement à disposition par l’ESA, Telepace, EWTN (chaîne américaine) et CRC (canadienne), qui ont permis à des télévisions nationales et locales, et via internet, de transmettre le congrès dans son intégralité. Le premier jour, 7 000 points de connexion à internet, soit environ 20 000 personnes. Quelques flashes des messages électroniques reçus du monde entier. D’Amersfoort, (Pays-Bas) : « C’est impressionnant de voir combien une spiritualité élevée et sa concrétisation vont bien ensemble » ; d’Edimbourg : « Nous regardons la retransmission. Elle est empreinte de lumière et nous nous sentons dedans ». L’importante dimension spirituelle de cet événement marial est annoncée dès les premiers mots : « Nous nous arrêterons sur le rosaire, qui est un chant d’amour répété à Marie – prévient Giuseppe Zanghì, directeur de la revue Nuova Umanità – et qui est surtout un éclairage particulier sur les mystères de la vie du Fils de Marie. Et tandis que nous ouvrirons nos esprits et nos cœurs à Jésus, c’est lui qui parlera de Marie à nos cœurs et à nos esprits, avec un langage qui n’aboutit pas à de pauvres paroles, mais fait des créatures nouvelles ». Un des aspects nouveaux de cet événement marial est la contribution de la dimension charismatique à la compréhension vitale de Marie et du rosaire, en réponse au message remis à Chiara Lubich par le pape place Saint-Pierre le 16 octobre 2002, jour où il remettait à l’honneur la prière du rosaire. Un des moments les plus importants a été l’intervention de Chiara Lubich, qui a parlé des grâces reçues à l’origine de cette Œuvre, le Mouvement des Focolari, que l’Église reconnaîtra plus tard comme « Œuvre de Marie ». Chiara revit un des moments les plus dramatiques de cette période : « Sous un terrible bombardement, couchée par terre, couverte de poussière, je me suis relevée presque miraculeusement épargnée, calme et en paix au milieu des hurlements, et j’ai pris conscience d’avoir éprouvé une grande douleur au moment où j’étais en danger de mort : celle de ne plus pouvoir réciter le Je vous salue Marie sur cette terre ». Elle comprendra plus tard : « Ce Je vous salue Marie devait être composé de paroles vivantes, de personnes qui, telles de petites Marie, donnent au monde l’Amour ». Cet Amour qui est Jésus lui-même, « que nous pouvons aujourd’hui engendrer spirituellement, comme le promet l’évangile : “Là où deux ou plus sont réunis en mon nom (en mon amour, expliquent les Pères de l’Église) je suis au milieu d’eux” (Mt 18,20) ». Tâche « primordiale dans la société sécularisée actuelle », a précisé durant l’homélie Mgr Miloslav Vlk, archevêque de Prague. La fondatrice des Focolari a parlé de la découverte du nouveau visage de Marie, « d’une beauté incomparable, toute Parole de Dieu, toute revêtue de la Parole de Dieu » et de l’appel de tout chrétien à redire, comme Marie, Christ, Vérité, Parole, avec la personnalité que Dieu a donnée à chacun ». Une vision « riche de conséquences, dans le domaine œcuménique par exemple ». Des membres des Églises évangélique, luthérienne réformée, roumaine orthodoxe et copte orthodoxe apporteront leur témoignage dans la suite du congrès. Un autre élément nouveau qui marque tout le congrès est la place privilégiée donnée aux manifestations artistiques : chants, musique, danses, poèmes (Dante, Sartre), parce que de Marie, « on ne parle pas, on chante, l’amour s’épanouit en poésie », comme le chante le Gen Verde, sur une méditation de Chiara.
PAROLE DE VIE DE MAI 2003
Jésus se prépare à retourner vers son Père. Dans sa mort et sa résurrection, désormais imminentes, s’actualise la parabole du grain de blé qui, tombé en terre, meurt et porte du fruit en formant l’épi. Jésus accomplit son œuvre : sur la croix il se donne complètement (c’est le grain de blé qui meurt) et par la résurrection il donne vie à une nouvelle humanité (c’est l’épi formé de grains multiples). Mais Jésus veut que son œuvre continue dans ses disciples : eux aussi devront aimer jusqu’à donner leur vie et engendrer ainsi la communauté. C’est pourquoi, parlant avec eux lors de la dernière Cène, il les compare à des sarments de vigne appelés à porter du fruit.
Comment pouvons-nous être greffés à la vigne ? Jésus explique que demeurer en lui signifie demeurer en son amour , laisser ses paroles vivre en nous , observer ses commandements , surtout «son » commandement : celui de l’amour réciproque . Dans cette dernière Cène, il nous a donné aussi son corps et son sang. En nous et parmi nous, il continuera à porter du fruit et à accomplir son œuvre. Mais si nous refusons ce rapport d’amour, nous nous coupons nous-mêmes de la vigne.
« Tout sarment qui, en moi, ne porte pas de fruit, il l’enlève. »
Cette action sans recours du Père ne peut que réveiller en nous la crainte de Dieu. Nous ne pouvons pas abuser de son amour. Et comme Dieu est amour, il est également juste. S’il enlève le sarment, c’est parce qu’il est déjà mort, il s’est condamné lui-même, il a refusé la sève et ne porte plus de fruit. On peut aussi oublier ce qui a réellement de la valeur : être unis à Jésus, vivre de sa grâce, ou au moins être en paix avec sa conscience, et s’imaginer à tort que porter du fruit rime avec activisme, organisation d’œuvres, efficacité… Mais alors le Père enlèvera le sarment sans vie dont la greffe, malgré les apparences, n’a pas pris.
N’y a-t-il donc plus aucune espérance ? Non, car la vigne du Seigneur est mystérieuse et il sait greffer à nouveau le sarment arraché : on peut toujours se convertir et recommencer.
«… et tout sarment qui porte du fruit, il l’émonde, afin qu’il en porte davantage encore »
Comment savoir si je porte du fruit ? Celui qui agit avec droiture devra nécessairement traverser des épreuves. Elles sont à recevoir comme des manifestations de l’amour de Dieu qui nous émonde pour que nous portions du fruit. C’est le sens des souffrances physiques et spirituelles, des maladies, des tentations, des doutes, de la sensation d’être abandonné de Dieu, des situations les plus diverses qui nous parlent plus de mort que de vie. Pourquoi ? Dieu veut-il la mort ? Non, bien au contraire, Dieu aime la vie, mais une vie si pleine, si féconde que nous ne pourrons jamais l’imaginer malgré toute notre tension vers le bien, la paix et tout ce qu’il nous demande. C’est justement pour cela qu’il nous émonde.
« Je suis la vraie vigne et mon père est le vigneron. Tout sarment qui, en moi, ne porte pas de fruit, il l’enlève, et tout sarment qui porte du fruit, il l’émonde, afin qu’il en porte davantage encore. »
Cette Parole de Vie nous assure que les épreuves et les difficultés ne sont jamais le fruit du hasard. Elles nous sont données pour que nous puissions porter “plus de fruit”. Et le fruit ne consiste pas seulement en fécondité apostolique, c’est-à-dire en la capacité de susciter la foi et d’édifier la communauté chrétienne. Jésus nous indique également d’autres fruits. Il nous promet que si nous demeurons dans son amour et que ses paroles demeurent en nous, nous pourrons demander ce que nous voudrons, cela nous sera donné , nous rendrons gloire au Père , nous aurons la plénitude de la joie.
Cela ne vaut-il la peine de se confier aux mains du Père et de nous laisser travailler par lui ?
Chiara LUBICH
[:it]Più potente delle armi
[:it]La forza della preghiera
Interview de Chiara Lubich
‘- Q – Pouvez-vous expliquer le sens du titre du congrès : « contempler le Christ avec Marie » ? R – Aucune créature n’a jamais connu Jésus mieux que Marie, parce qu’elle est immaculée, parce qu’elle est sa mère, parce qu’elle est évangile vécu, et donc un autre Jésus. Pour le voir, le connaître et le contempler, à travers elle, il nous faudra chercher à l’imiter dans son oui continuel à la volonté de Dieu et ainsi, d’une certaine manière, la faire revivre en nous. Q – Quelle est l’importance de Marie, du rosaire et de la prière dans le monde d’aujourd’hui ? R – Marie et la prière ont aujourd’hui une valeur immense. Avec l’arrivée d’un terrorisme nouveau, plus terrible, effet d’un Mal avec un M majuscule, les moyens ordinaires pour le combattre ne suffisent pas, Il faut recourir au Bien avec un B majuscule, c’est-à-dire à Dieu et à ce qui le concerne. D’où l’importance de la prière, comme cela s’est fait à Assise, et donc aussi du rosaire. Dans ce monde divisé entre pays riche et pays pauvres, cause la plus profonde du terrorisme, et appelés comme nous le sommes à nous engager plus que jamais à susciter solidarité, partage et fraternité pour faire toujours plus de l’humanité une famille, Personne ne peut nous aider mieux que Marie, parce que mère universelle. Q – Que répondre à ceux qui ne croient pas à la prière ni à son efficacité sur les événements ? R – Quand quelqu’un ne croit pas à la prière, c’est en général parce qu’il a peu de foi en Dieu. Il faut alors l’aider à la raviver. Parmi les nombreuses possibilités à notre disposition, la plus efficace est le témoignage que nous donnons, nous chrétiens, lorsque nous nous aimons réciproquement. A l’unité dans l’amour est promise la conversion du monde. Jésus a dit : « Que tous soient un afin que le monde croie » (cf. Jn 17,21). Q – Quels liens entre Marie et la vie spirituelle et esthétique des artistes ? R – Les artistes tendent vers le Beau. J’ai constaté chez eux – s’ils sont croyants – que le meilleur attribut de Dieu est la Beauté. Dieu vrai, Dieu amour, oui, mais plus encore Dieu beau. Et Marie, la « toute belle », est pour ainsi dire l’incarnation du Beau. D’où le rapport entre les artistes et elle. Ils sont réellement attirés par elle, parce qu’ils l’ont peinte, sculptée, chantée… à toutes les époques et de toutes les manières. Q – Quelle est l’origine du congrès marial ? R – Tout a commencé le 16 octobre 2002, à la fin de l’audience du pape après qu’il ait signé la lettre apostolique Rosarium Virginis Mariae. J’étais présente place Saint-Pierre, avec 600 personnes de notre mouvement. C’est à cette occasion que le saint Père m’a remis un message dans lequel il dit entre autre : « En cette circonstance, je voudrais confier idéalement aux focolarini la prière du rosaire. […] Je suis certain que votre dévotion à la Vierge sainte vous aidera à donner l’importance nécessaire à l’initiative d’une année consacrée au rosaire ». A partir de ce moment, dans le monde entier, diverses réalisations ont vu le jour pour proposer à nouveau la récitation du rosaire. Le congrès marial en est une.

Contempler le Christ avec les yeux de Marie pour être comme lui constructeurs de paix
Contempler le Christ avec les yeux de Marie pour être comme lui constructeurs de paix
Le Mouvement des Focolari organise, du 28 au 30 avril 2003 au Centre Mariapolis de Castel Gandolfo (Italie), un congrès marial international intitulé « Contempler le Christ avec Marie », en l’Année du Rosaire demandée par le pape pour cette « année troublée par tant de préoccupations concernant le sort de l’humanité », afin que, « contemplant le Christ avec le regard de Marie », nous devenions « des constructeurs de paix » pour « un monde plus conforme au dessein de Dieu ». RETRANSMISSION TÉLÉVISÉE EN DIRECT ET SUR INTERNET Programme additionnel : interviews et reportages – www.focolare.org/live/ La perspective évangélique novatrice de la lettre du pape sur le rosaire et des mystères lumineux serviront de fil conducteur au congrès, avec des réflexions théologiques et des témoignages. Le congrès se propose de montrer les richesses et les potentialités de renouvellement de l’évangile proposées par le rosaire. L’évêque de Pompéi, Mgr Domenico Sorrentino, retracera l’histoire du rosaire à travers les siècles. LES NOUVEAUTÉS *Apport des nouveaux charismes à la compréhension de Marie et du rosaire : – lundi après-midi : Chiara Lubich, fondatrice et présidente des Focolari ; – mardi matin : don Pasquale Foresi, premier focolarino prêtre, co-fondateur des Focolari ; – mardi après-midi : Andrea Riccardi, fondateur de la communauté Sant’Egidio et des représentants de plusieurs mouvements et communautés ecclésiales. *Témoignages des territoires occupés, des Etats-Unis, du Burundi, des Philippines, d’Europe de l’Est : Jeunes, familles, personnalités politiques, prêtres et religieuses montreront les semences d’unité qui ont germé dans les situations les plus difficiles. *L’action de Marie dans l’histoire des peuples : – mardi après-midi : Tommaso Sorgi présentera une chronique inédite de plusieurs événements, dont le renversement du régime de Marcos aux Philippines et le conflit en Angola. Suivra le témoignage d’Adam Biela, polonais, spécialiste et homme politique. *Dimension œcuménique : la lettre du pape et Marie vue par les différentes Églises : – mercredi matin : table ronde avec des représentants des Églises roumaine-orthodoxe, copte-orthodoxe (Égypte), anglicane, évangélique réformée (Suisse), évangélique luthérienne (Allemagne). *Dimension interreligieuse : un chant au Père, dans la langue de Marie et Marie vue par l’Islam : – mercredi après-midi : Miriam Meghnagi, chanteuse juive et Shahrzad Hushmand, musulmane iranienne. *Contribution artistique : pour exprimer Marie chef-d’œuvre de beauté, type de l’humanité nouvelle réalisée : Moments musicaux, chants, danses et œuvres d’art de différentes cultures, avec la création des « Noces du miracle » de la compagnie de ballet classique Cosi-Stefanescu. *Retransmission télévisée en direct de tout le congrès : L’événement télévisé sera ultérieurement enrichi d’un programme additionnel qui couvrira les espaces correspondant aux intervalles dans la salle : nombreuses interviews et 27 reportages. Le retransmission en direct sera assurée grâce à la généreuse disponibilité de ESA, TELEPACE, avec les 8 satellites, la chaîne américaine EWTN, CANÇAO NOVA (Brésil), auxquelles se relieront de nombreuses télévisions nationales et locales. *Participants : Plus de 1 400 sont attendus, dont 20 cardinaux et évêques, de plus de 70 pays de tous les continents. *Les liturgies eucharistiques seront présidées par le cardinal Angelo Sodano, secrétaire d’État du Vatican, le cardinal Miloslav Vlk, archevêque de Prague, le cardinal Silvano Piovanelli, ancien archevêque de Florence, Mgr Rylko, secrétaire du conseil pontifical pour les laïcs et Mgr Vincenzo Paglia, évêque de Terni. *Pourquoi une telle initiative ? Pour répondre au message que le pape a confié à Chiara Lubich le 16 octobre dernier, jour où il a remis en vigueur dans l’Église la prière mariale du rosaire. Le pape écrivait : « Je voudrais confier idéalement aux focolarini la prière du saint rosaire que j’ai voulu proposer à nouveau à toute l’Église ». Il demandait de « donner l’importance nécessaire à une année consacrée au rosaire ». « Offrez votre contribution pour que ces mois deviennent pour toutes les communautés chrétiennes une occasion de renouvellement intérieur ».
Avec un pistolet pointé sur la tête
L’amour triomphe de tout
Je suis médecin gynécologue, mère de six enfants. L’autre soir, avant de me rendre à une réunion, je raccompagnais un des plus jeunes à la maison ; il s’exclame : « Maman, je m’ennuie tellement de toi ! Qu’est-ce que ce serait si tu n’étais plus là ? » Je l’ai aussitôt rassuré. Puis, au moment où je garais la voiture à l’entrée de la clinique, trois jeunes portant des armes m’ont intimé l’ordre de descendre. J’ai d’abord cru à une plaisanterie. Mais l’un d’entre eux m’a pointé son revolver sur le cou et m’a déclaré très sérieusement : « Si vous ne descendez pas, je vous fais éclater toutes les veines ! » Je descends et, tandis que l’un prend le volant, je réalise qu’ils sont en train de m’emmener. Les paroles de mon fils me martèlent le cœur. Je sens que le moment est venu de faire un pas décisif, un nouveau choix de Dieu . Je me dis que ce sont peut-être mes derniers instants et que je dois les vivre au mieux, en restant dans l’amour. C’est ce que je fais, et une grande paix envahit mon âme. Je m’intéresse à eux comme si j’étais leur mère. Ils veulent de l’argent ; quand je leur dis que j’ai six enfants et que je suis médecin, ils se taisent. Un long temps de silence, pendant lequel la voiture file loin de la ville. Puis : « Madame, ne vous inquiétez pas, il ne vous arrivera rien. Vous retrouverez bientôt votre voiture ! » Puis, une dispute ayant surgi entre eux, ils se sont mis à se bagarrer ; ils discutaient violemment et se menaçaient avec le pistolet. Je suis restée tête baissée, évitant de les regarder, et je priais pour eux. Ils étaient à peine plus âgés que mes propres enfants. Enfin, ils s’arrêtent, pour me déposer au beau milieu de la campagne. Pendant vingt minutes, j’ai marché à la recherche d’un sentier qui me conduise à une route goudronnée et à une cabine téléphonique. J’ai alors pu téléphoner à mon mari pour qu’il vienne me chercher. L’aventure était terminée ! Le lendemain j’ai récupéré ma voiture : j’ai retrouvé mon sac contenant mes papiers d’identité, l’argent, le chéquier, le magnétophone… et pas une égratignure sur la carrosserie ! T.N. – Brésil Extrait tiré de L’ÉVANGILE, ÇA MARCHE, Les « fioretti » de Chiara Lubich et des Focolari, recueillis par DORIANA ZAMBONI, ? Nouvelle Cité, mai 2003, traduction de Odile Perfumo.
[:it]La ragazza del capo. Droga, discoteca, vandalismo. Poi l’incidente.
[:it]Fratellanza come categoria politica: una proposta particolarmente significativa sullo sfondo del conflitto in Iraq[:en]Brotherhood as a political category[:es]Fraternidad como categoría política: Una propuesta particularmente significativa en el marco del conflicto en Irak[:pt]A Fraternidade como categoria política: uma proposta particularmente significativa diante do quadro de conflito no Iraque
[:it]Il Movimento Politico per l’unità
PAROLE DE VIE D’AVRIL 2003
Jésus est au jardin des oliviers, sur le domaine appelé Gethsémani. L’heure tant attendue est arrivée, moment crucial de toute son existence. Il tombe à terre et supplie Dieu en l’appelant « Père » avec une tendresse confiante. Il lui demande « d’écarter de lui cette coupe », expression qui signifie sa passion et sa mort. Il lui demande que cette épreuve passe loin de lui… et finalement Jésus s’en remet complètement à la volonté de son Père.
« Non pas ce que je veux, mais ce que tu veux ! »
Jésus sait que sa passion n’est pas un événement imprévu, lié à la seule décision des hommes. Ce sont les hommes qui ont rejeté et condamné Jésus, mais la « coupe » appartient au dessein de Dieu. Elle vient des mains du Père.
Jésus nous enseigne que le Père a un dessein d’amour sur chacun d’entre nous et nous aime tous d’un amour personnel. Si nous y croyons et y répondons par notre amour – voilà la condition – tout concourt à notre bien. Pour Jésus, rien n’est arrivé par hasard, pas même sa passion et sa mort. Et puis il y a eu la Résurrection, que nous célébrons solennellement ce mois.
L’exemple de Jésus, le Ressuscité, doit illuminer notre vie. Tout ce qui nous arrive, et notamment tout ce qui nous fait souffrir, est à lire comme une volonté de Dieu qui nous aime ou une permission de sa part, toujours due à son amour. Alors tout prendra un sens dans notre vie, tout servira, même ce qui nous apparaît sur le moment incompréhensible et absurde, même ce qui, comme pour Jésus, peut nous précipiter dans une angoisse mortelle. Il suffira qu’avec lui nous sachions répéter, dans un acte de confiance totale envers l’amour du Père :
« Non pas ce que je veux, mais ce que tu veux ! »
Ce qu’il veut, c’est que nous vivions notre vie, que nous profitions avec gratitude des dons de la vie. La volonté de Dieu est bien différente de ce que nous pensons parfois : une perspective, notamment douloureuse, à laquelle il faut se résigner, ou une succession d’actes monotones formant la trame de notre existence.
Pour nous donner sa vie en plénitude, Dieu nous fait connaître sa volonté par la voix de notre conscience et nous invite à la suivre. C’est ainsi qu’il nous manifeste son amour.
Nous pourrions nous la représenter par l’image du soleil et de ses rayons. Les rayons sont comme sa volonté sur chacun de nous. Chacun chemine sur un rayon, dans la volonté de Dieu sur lui, distinct du rayon de celui qui est à côté de lui, mais appartenant au même soleil. Nous tous, donc, nous ne faisons qu’une seule volonté, celle de Dieu, mais elle prend des formes différentes pour chacun. D’ailleurs, plus les rayons se rapprochent du soleil, plus ils deviennent proches les uns des autres. Nous aussi, plus nous nous rapprochons de Dieu, en accomplissant de manière toujours plus parfaite sa volonté, plus nous nous rapprochons entre nous… jusqu’au jour où nous serons tous un.
Vivre ainsi peut transformer notre vie. Au lieu de ne fréquenter que ceux qui nous plaisent et de n’aimer que ceux-là, nous pouvons approcher tous ceux que la volonté de Dieu met à nos côtés. Au lieu de choisir de faire ce qui nous plaît, nous pouvons donner la préférence à ce que la volonté de Dieu nous suggère. En étant entièrement projetés dans la divine volonté de l’instant (« ce que tu veux »), nous serons tout naturellement détachés de notre moi (« non pas ce que je veux »).
Et en cherchant Dieu seul, ce n’est pas le détachement pour lui-même que l’on recherche, mais on le trouve de fait. Alors notre joie sera pleine. Il suffit de se couler dans le moment qui passe en accomplissant, à cet instant, la volonté de Dieu, en répétant :
« Non pas ce que je veux, mais ce que tu veux ! »
Le moment passé n’est plus et le futur pas encore là. Nous ne pouvons aimer Dieu que dans le présent qui nous est donné, en lui disant notre propre « oui », à sa volonté. Un voyageur dans le train arriverait-il plus vite à destination en avançant dans le couloir du wagon ? Comme lui, restons assis à notre place, dans le moment présent. Le train du temps avance tout seul.
Aimons donc ce sourire à donner, ce travail à accomplir, cette voiture à conduire, ce repas à préparer, cette activité à organiser, et celui qui souffre à côté de nous.
L’épreuve et la souffrance ne doivent pas non plus nous effrayer si, avec Jésus, nous savons y reconnaître la volonté de Dieu, ou plutôt son amour pour chacun de nous. Et nous pourrons lui adresser cette prière :
« Seigneur, donne-moi de ne rien craindre, car tout ce qui arrivera ne proviendra que de ta volonté ! Seigneur, donne-moi de ne rien désirer, car rien n’est plus désirable que ta seule volonté.
Qu’importe la vie ? Ta volonté importe.
Donne-moi de n’être effrayé par rien, car en toute chose réside ta volonté. Donne-moi de ne me glorifier de rien, car tout vient de ta volonté. »
Chiara LUBICH

L’offensive de la paix en action
Contre-offensive de paix des Focolari
– A Notre-Dame de Paris, l’animation du « chapelet pour la paix » par les Focolari, tous les samedis de Carême à 17 h 30, a pris une intensité toute particulière avec les événements. Diffusion du « Time out » à cette occasion (cf. encadré « Time-out » ci-dessous).
– A Erstein (près de Strasbourg) plus de 1000 participants au Festival de la paix et de la fraternité. Montrer que la paix est possible, que des groupes différents (chrétiens, juifs, musulmans, autres…) peuvent travailler ensemble, partager leur culture, et créer un moment festif, était l’objectif de ce festival (29 et 30 mars 2003). Les artistes participants ont signé une charte, spécifiant l’adhésion personnelle de chacun à ce projet. Ce festival, organisé par le Mouvement des Focolari, a bénéficié du soutien de la commune d’Erstein, avec la participation active de son maire, du recteur et président de la mosquée de Strasbourg M. Lathai, du grand rabbin de Strasbourg M. René Gutman, du Pasteur Hoeffel représentant les Églises Réformée et de la Confession d’Augsbourg d’Alsace. Lecture a été faite de messages de soutien de Mgr Doré, archevêque de Strasbourg, et de Chiara Lubich, présidente du Mouvement des Focolari, ainsi que d’une lettre de félicitations et d’envouragement du Ministère des Affaires Étrangères. Nombre de participants et de personnalités ont signé un message en réponse à « l’appel des responsables des Églises chrétiennes en Irak » du 26 mars (cf. sur notre site www.focolari.asso.fr)
– A Nantes, animation d’une heure de prière avec les Mouvements d’Église et nouvelles communautés… (25 mars)
– A Villeneuve d’Asq, soirée-concert pour la paix. (22 mars)
– A Milan, marche silencieuse dans les rues de Milan pour la paix en Irak et les 62 pays où subsistent des conflits, organisée avec la Communauté Sant’Egidio. (22 mars)
– Aux USA, à Chicago soirée de solidarité en présence des amis musulmans Focolari, moment de silence et lecture de la prière de paix de St François d’Assise. A Sant’Antonio, Houston, Dallas, Denver… contacts avec autres mouvements d’Église et autres Églises chrétiennes, organisation de prières en commun.
– A Rome, les jeunes Focolari ont adhéré à l’initiative des « Sentinelles du matin pour un nouveau printemps de l’Évangile », avec Mgr Renato Martino, président du Conseil Pontifical Justice et Paix ». (22 mars)
– A Bruxelles, action « Battre tambours pour la paix » promue par les Focolari depuis plusieurs années pour sensibiliser les enfants à la non-violence et à leurs responsabilités de citoyens, en partenariat avec le Ministère de l’Éducation et des Communes. Cette année 60 000 enfants ont participé à la manifestation. (23 mars)
– A Lezha (Albanie), marche pour la paix de l’Eglise catholique jusqu’à la mosquée avec la participation de catholiques, musulmans et de diverses autorités civiles et religieuses.
– A Vienne (Autriche), lancement de l’opération « Lifestyle4peace » des jeunes Focolari, proposant la Règle d’or (« Fais aux autres ce que tu voudrais qu’ils te fassent ») comme contribution à un nouveau style de vie en faveur de la paix. Soutien d’hommes politiques de tous partis, du cardinal König et de la communauté musulmane.
– Au Caire (Egypte), veillée de paix avec les mouvements d’Action catholique.
– A Buenos Aires (Argentine), participation à l’initiative de l’Église locale et de communautés protestantes, juives et musulmanes : une tente de rencontre et de prière pour la paix installée sur la fameuse Place de Mai.
……… et bien d’autres initiatives
dont le Rosaire pour la paix, prière des jeunes qui fait le tour du monde selon les fuseaux horaires
[:it]Perché si ponga fine alla guerra: manifestare e pregare per la pace. A tutti i costi vivere per la fratellanza universale[:en]To bring an end to the war: initiatives and prayers for peace Live for universal brotherhood at all costs[:es]Para que se ponga fin a la guerra: manifestar y rezar.
[:it]"La sfida di una politica autentica"
[:it]Potevano essere i miei ultimi minuti di vita[:en]They could have been the last moments of my life[:es]Podían ser mis últimos minutos de vida[:pt]Podiam ser os meus últimos minutos de vida
[:it]Un momento di tregua per cercare le radici di un comune impegno per la pace
[:it]Momento di riflessione sulla pace
[:it]Riflessioni sulla Pace
[:it]Testi dei pensieri sulla Pace

La guerre est un homicide à grande échelle
Cinquante ans après sa sortie, L’inutilità della guerra, d’Igino Giordani, vient d’être réédité.
Giampaolo Mattei Un coup de poing dans l’estomac ! C’est l’effet produit par la lecture d’un livre dont le titre – L’inutilité de la guerre – est si éloquent qu’il place son lecteur le dos au mur. Et pourtant ces pages ont été écrites il y a exactement cinquante ans. Elles portent la signature d’Igino Giordani (1894-1980), homme politique, journaliste, écrivain et personnage de premier plan dans la vie ecclésiale et la vie italienne tout court. La maison d’édition Città Nuova a décidé de reproposer l’ouvrage de Giordani (Rome 2003, 116 pages – 6,50€) en cette période de l’histoire où se fait plus que jamais sentir le besoin de paroles authentiques, claires et essentielles. Il est des œuvres – lit-on dans la préface – qui ont la saveur d’une actualité intemporelle. Inspirées certes par les circonstances, elles dispensent cependant un enseignement qui franchit la condition historique et se met au service de tout homme, en tout temps et en tout lieu. C’est de cette constatation qu’est née l’idée de publier à nouveau le livre écrit par Igino Giordani en 1953, quand la « guerre froide » figeait les positions géopolitiques et cristallisait le partage des consciences. Aujourd’hui, le texte permet d’abord de se plonger avec le recul du temps dans l’atmosphère d’alors, tout en ayant entre les mains, si l’on peut dire, les morceaux du mur de Berlin : une expérience d’une immense portée historique et politique. Mais pour les heures délicates que nous vivons aujourd’hui, c’est un coup de poing dans l’estomac, parce que c’est une démonstration preuves à l’appui, de l’inutilité de la guerre et de son évidente stupidité intrinsèque. Attention, Giordani sait de quoi il parle parce qu’au cours de la première guerre mondiale, son comportement au front lui a valu une décoration. Ce n’est pas un naïf. Il ne parle pas non plus par « lâcheté », accusation ridicule, mais courante, portée contre ceux qui se rangent du côté de la paix. Au contraire, les vrais courageux sont les constructeurs de paix et non ceux qui se réfugient derrière les missiles, canons et autres fusils. Giordani affirme clairement, en structurant son raisonnement, que la paix est le résultat d’un projet qui se réalise patiemment et sérieusement et non des mots en l’air ni un paravent pour cacher qui sait quels intérêts.
Les cent pages de ce livre touchent le lecteur parce qu’elles semblent écrites ce matin et non pas il y a cinquante ans. Vraiment l’histoire est « maîtresse de vie », selon l’antique adage. Dommage que les hommes soient trop souvent de mauvais élèves. Dès la première phrase du livre, Giordani met les points sur les i et oblige le lecteur à la souligner en rouge : « La guerre est un homicide à grande échelle ». Il met le doigt sur la rhétorique, sur le mensonge et sur les intérêts qui accompagnent tout conflit, quel que soit le lieu des combats : « Comme la peste sert à empester, la faim à affamer, la guerre sert à tuer ». Un point, c’est tout. Tu peux être fier et garder tête haute, jeune catholique. Oui, tu te sens fier d’appartenir à une culture à laquelle ont contribué des hommes de cette trempe. Giordani n’était ni un marginal ni un radoteur. Giordani est l’un des nombreux personnages de premier plan du monde catholique qui ont contribué de façon décisive, parfois oubliée aujourd’hui, au développement du peuple italien, par des projets porteurs de vie et d’espérance. C’est un devoir enthousiasmant de connaître la pensée de ces hommes si proches de nous et d’une telle richesse spirituelle qu’ils ne passent jamais de mode.
Un ancien combattant des tranchées démontre que la guerre est inutile
Le livre de Giordani est si passionnant qu’il est difficile d’en interrompre la lecture. Après quelques pages, il faut déjà retailler son crayon, tant on éprouve le besoin de souligner presque chaque ligne. L’auteur est polémiste sans cesser d’être frère de tout homme, même de celui qui pense de façon diamétralement opposée. Il n’offense pas les hommes, mais en lutteur infatigable, en ancien combattant des tranchées, il s’élève contre la guerre et démontre son inutilité, sans lâcher prise. Giordani a une manière très personnelle de s’exprimer, captivante et passionnée, issue du désir de communiquer ses idées. Il est en état de mission permanente. Il est au cœur de l’Église. Il n’est pas seulement écrivain, il est « au-delà » et « davantage ». Il sait choisir les mots justes et, au besoin, invente des expressions qui font mouche. Il a le langage caractéristique des mystiques et on retrouve dans ses paroles des échos des Pères de l’Église. C’est un livre d’histoire, un livre de vie, un livre de prière. C’est un ouvrage qui prend parti contre la tentation de la résignation face aux décisions des puissants en place. Giordani soutient que toute personne est acteur de la paix. « Si tu veux la paix, prépare la paix » est son grand message destiné à toutes les catégories humaines. « Seuls les fous et les incurables peuvent désirer la mort – écrit-il – et la guerre est mort. Elle n’est pas désirée par le peuple. Elle est désirée par des minorités auxquelles la violence physique est utile pour s’assurer des avantages économiques ou pour satisfaire des passions mauvaises. Aujourd’hui surtout, par son coût, avec ses morts et ses destructions, la guerre se présente comme un “massacre inutile”. Massacre, et de plus inutile ». L’expression est de Benoît XV. Giordani respire à pleins poumons le magistère des papes et, au fil des pages, on ne perd jamais de vue les successeurs de Pierre. La guerre – affirme-t-il – est toujours une défaite, même pour le vainqueur. Avec l’argent investi dans ce « massacre inutile », il serait possible de s’attaquer réellement à des problèmes dramatiques comme la faim et la pauvreté, des maladies pourraient être définitivement vaincues. C’est une affaire de justice et les mille prétextes – toujours les mêmes – mis en avant pour justifier la guerre ne valent rien. La « rapidité » des opérations militaires est une « bonne excuse » que Giordani méprise et il rappelle que, dans l’idée d’Hitler, la seconde guerre mondiale devait être une « guerre éclair » et que, selon Salandra [chef du gouvernement italien en 1914, ndt], la première guerre mondiale allait être une « promenade ». Il ajoute avec violence : « Je ne crois pas qu’un chef d’état ait jamais admis faire la guerre pour voler ; tous ont toujours déclaré la faire dans des buts plus nobles, plus altruistes ou plus idéaux les uns que les autres. Et – puérilité de la haine – la rapacité est toujours attribuée à l’ennemi et les beaux sentiments à l’ami ».
Renverser une macabre perspective de l’historiographie
La logique dit que celui qui fait la guerre a tort, il ne résout rien et y perd de toute façon. Le peuple n’en veut pas. Et l’on commet une grave erreur en se complaisant dans les biographies de personnages qui ont déchaîné des massacre indicibles – d’Hitler à Staline – et en ignorant les véritables chefs de l’humanité comme – écrit Giordani – par exemple un Cottolengo ou un don Orione. C’est une question d’ordre culturel que de parvenir à renverser cette macabre perspective de l’historiographie. Giordani indique la voie du dialogue pour parvenir à une solution, toujours et de toute façon, sans céder à la fatigue. Il affirme que misère et convoitise sont les premières causes des guerres et que la peur est toujours à la racine. Mais il existe une espérance, une alternative : elle s’appelle charité et le Christ l’a incarnée, lui qui a tout racheté, y compris la politique pour lui donner une fonction de paix et de vie. « Les ennemis s’aiment : voilà la position du christianisme – écrit Giordani – Si l’on mettait en place une politique de la charité, on découvrirait qu’elle coïncide avec la rationalité la plus éclairée et que, socialement et économiquement parlant, elle se révèle être une affaire ». Il définit toute guerre comme un crime, qu’elle soit agressive ou préventive. C’est une action contre la justice, parce que la justice véritable engendre la paix véritable. Les références de Giordani à Saint François et à Dante sont d’une haute sollicitation spirituelle. Il affirme : « Pour mériter le nom de fils de Dieu, les chrétiens doivent travailler à la paix ». Avec un courage libéré de toute timidité, en vivant le ministère de la réconciliation, en abattant les murs qui séparent, en pardonnant à ceux qui leur font du mal, en guidant vers l’unité ceux qui en sont éloignés. Il cite l’Allemand Max Josef Metzger, tué par les nazis en 1944 : « Nous devons organiser la paix comme d’autres ont organisé la guerre ». Il n’est ni sérieux ni crédible de parler de paix tout en préparant la guerre. « L’œuvre pacificatrice commence avec moi et avec toi… » conclut Giordani. Pour supplanter la guerre, il ne suffit pas d’éliminer les armes, il faut avant tout reconstruire une conscience et une culture de paix. C’est un travail de première urgence, que les hommes de foi soutiennent par la stratégie de la prière. Voilà la mission des chrétiens aujourd’hui dans l’histoire : réaliser l’évangile de la paix.
La guerre est un homicide à grande échelle
Un coup de poing dans l’estomac ! C’est l’effet produit par la lecture d’un livre dont le titre – L’inutilité de la guerre – est si éloquent qu’il place son lecteur le dos au mur. Et pourtant ces pages ont été écrites il y a exactement cinquante ans. Elles portent la signature d’Igino Giordani (1894-1980), homme politique, journaliste, écrivain et personnage de premier plan dans la vie ecclésiale et la vie italienne tout court.
La maison d’édition Città Nuova a décidé de reproposer l’ouvrage de Giordani (Rome 2003, 116 pages – 6,50€) en cette période de l’histoire où se fait plus que jamais sentir le besoin de paroles authentiques, claires et essentielles. Il est des œuvres – lit-on dans la préface – qui ont la saveur d’une actualité intemporelle. Inspirées certes par les circonstances, elles dispensent cependant un enseignement qui franchit la condition historique et se met au service de tout homme, en tout temps et en tout lieu. C’est de cette constatation qu’est née l’idée de publier à nouveau le livre écrit par Igino Giordani en 1953, quand la « guerre froide » figeait les positions géopolitiques et cristallisait le partage des consciences.
Aujourd’hui, le texte permet d’abord de se plonger avec le recul du temps dans l’atmosphère d’alors, tout en ayant entre les mains, si l’on peut dire, les morceaux du mur de Berlin : une expérience d’une immense portée historique et politique. Mais pour les heures délicates que nous vivons aujourd’hui, c’est un coup de poing dans l’estomac, parce que c’est une démonstration preuves à l’appui, de l’inutilité de la guerre et de son évidente stupidité intrinsèque.
Attention, Giordani sait de quoi il parle parce qu’au cours de la première guerre mondiale, son comportement au front lui a valu une décoration. Ce n’est pas un naïf. Il ne parle pas non plus par « lâcheté », accusation ridicule, mais courante, portée contre ceux qui se rangent du côté de la paix. Au contraire, les vrais courageux sont les constructeurs de paix et non ceux qui se réfugient derrière les missiles, canons et autres fusils. Giordani affirme clairement, en structurant son raisonnement, que la paix est le résultat d’un projet qui se réalise patiemment et sérieusement et non des mots en l’air ni un paravent pour cacher qui sait quels intérêts.
Les cent pages de ce livre touchent le lecteur parce qu’elles semblent écrites ce matin et non pas il y a cinquante ans. Vraiment l’histoire est « maîtresse de vie », selon l’antique adage. Dommage que les hommes soient trop souvent de mauvais élèves. Dès la première phrase du livre, Giordani met les points sur les i et oblige le lecteur à la souligner en rouge : « La guerre est un homicide à grande échelle ». Il met le doigt sur la rhétorique, sur le mensonge et sur les intérêts qui accompagnent tout conflit, quel que soit le lieu des combats : « Comme la peste sert à empester, la faim à affamer, la guerre sert à tuer ». Un point, c’est tout.
Tu peux être fier et garder tête haute, jeune catholique. Oui, tu te sens fier d’appartenir à une culture à laquelle ont contribué des hommes de cette trempe. Giordani n’était ni un marginal ni un radoteur. Giordani est l’un des nombreux personnages de premier plan du monde catholique qui ont contribué de façon décisive, parfois oubliée aujourd’hui, au développement du peuple italien, par des projets porteurs de vie et d’espérance. C’est un devoir enthousiasmant de connaître la pensée de ces hommes si proches de nous et d’une telle richesse spirituelle qu’ils ne passent jamais de mode.
Un ancien combattant des tranchées démontre que la guerre est inutile
Le livre de Giordani est si passionnant qu’il est difficile d’en interrompre la lecture. Après quelques pages, il faut déjà retailler son crayon, tant on éprouve le besoin de souligner presque chaque ligne. L’auteur est polémiste sans cesser d’être frère de tout homme, même de celui qui pense de façon diamétralement opposée. Il n’offense pas les hommes, mais en lutteur infatigable, en ancien combattant des tranchées, il s’élève contre la guerre et démontre son inutilité, sans lâcher prise.
Giordani a une manière très personnelle de s’exprimer, captivante et passionnée, issue du désir de communiquer ses idées. Il est en état de mission permanente. Il est au cœur de l’Église. Il n’est pas seulement écrivain, il est « au-delà » et « davantage ». Il sait choisir les mots justes et, au besoin, invente des expressions qui font mouche. Il a le langage caractéristique des mystiques et on retrouve dans ses paroles des échos des Pères de l’Église. C’est un livre d’histoire, un livre de vie, un livre de prière.
C’est un ouvrage qui prend parti contre la tentation de la résignation face aux décisions des puissants en place. Giordani soutient que toute personne est acteur de la paix. « Si tu veux la paix, prépare la paix » est son grand message destiné à toutes les catégories humaines. « Seuls les fous et les incurables peuvent désirer la mort – écrit-il – et la guerre est mort. Elle n’est pas désirée par le peuple. Elle est désirée par des minorités auxquelles la violence physique est utile pour s’assurer des avantages économiques ou pour satisfaire des passions mauvaises. Aujourd’hui surtout, par son coût, avec ses morts et ses destructions, la guerre se présente comme un “massacre inutile”. Massacre, et de plus inutile ». L’expression est de Benoît XV. Giordani respire à pleins poumons le magistère des papes et, au fil des pages, on ne perd jamais de vue les successeurs de Pierre.
La guerre – affirme-t-il – est toujours une défaite, même pour le vainqueur. Avec l’argent investi dans ce « massacre inutile », il serait possible de s’attaquer réellement à des problèmes dramatiques comme la faim et la pauvreté, des maladies pourraient être définitivement vaincues. C’est une affaire de justice et les mille prétextes – toujours les mêmes – mis en avant pour justifier la guerre ne valent rien. La « rapidité » des opérations militaires est une « bonne excuse » que Giordani méprise et il rappelle que, dans l’idée d’Hitler, la seconde guerre mondiale devait être une « guerre éclair » et que, selon Salandra [chef du gouvernement italien en 1914, ndt], la première guerre mondiale allait être une « promenade ». Il ajoute avec violence : « Je ne crois pas qu’un chef d’état ait jamais admis faire la guerre pour voler ; tous ont toujours déclaré la faire dans des buts plus nobles, plus altruistes ou plus idéaux les uns que les autres. Et – puérilité de la haine – la rapacité est toujours attribuée à l’ennemi et les beaux sentiments à l’ami ».
Renverser une macabre perspective de l’historiographie
La logique dit que celui qui fait la guerre a tort, il ne résout rien et y perd de toute façon. Le peuple n’en veut pas. Et l’on commet une grave erreur en se complaisant dans les biographies de personnages qui ont déchaîné des massacre indicibles – d’Hitler à Staline – et en ignorant les véritables chefs de l’humanité comme – écrit Giordani – par exemple un Cottolengo ou un don Orione. C’est une question d’ordre culturel que de parvenir à renverser cette macabre perspective de l’historiographie.
Giordani indique la voie du dialogue pour parvenir à une solution, toujours et de toute façon, sans céder à la fatigue. Il affirme que misère et convoitise sont les premières causes des guerres et que la peur est toujours à la racine. Mais il existe une espérance, une alternative : elle s’appelle charité et le Christ l’a incarnée, lui qui a tout racheté, y compris la politique pour lui donner une fonction de paix et de vie. « Les ennemis s’aiment : voilà la position du christianisme – écrit Giordani – Si l’on mettait en place une politique de la charité, on découvrirait qu’elle coïncide avec la rationalité la plus éclairée et que, socialement et économiquement parlant, elle se révèle être une affaire ».
Il définit toute guerre comme un crime, qu’elle soit agressive ou préventive. C’est une action contre la justice, parce que la justice véritable engendre la paix véritable. Les références de Giordani à Saint François et à Dante sont d’une haute sollicitation spirituelle. Il affirme : « Pour mériter le nom de fils de Dieu, les chrétiens doivent travailler à la paix ». Avec un courage libéré de toute timidité, en vivant le ministère de la réconciliation, en abattant les murs qui séparent, en pardonnant à ceux qui leur font du mal, en guidant vers l’unité ceux qui en sont éloignés. Il cite l’Allemand Max Josef Metzger, tué par les nazis en 1944 : « Nous devons organiser la paix comme d’autres ont organisé la guerre ». Il n’est ni sérieux ni crédible de parler de paix tout en préparant la guerre.
« L’œuvre pacificatrice commence avec moi et avec toi… » conclut Giordani. Pour supplanter la guerre, il ne suffit pas d’éliminer les armes, il faut avant tout reconstruire une conscience et une culture de paix. C’est un travail de première urgence, que les hommes de foi soutiennent par la stratégie de la prière. Voilà la mission des chrétiens aujourd’hui dans l’histoire : réaliser l’évangile de la paix.
Giampaolo Mattei
Parole de vie de mars 2003
Aux foules qui s’empressaient autour de lui, Jésus parlait du royaume de Dieu : des paroles toutes simples, des paraboles tirées d’épisodes de la vie quotidienne, qui pourtant exerçaient un attrait tout spécial sur son auditoire. Ce qui frappait les foules c’était l’autorité avec laquelle Jésus parlait, contrairement aux scribes. « Jamais homme n’a parlé comme cet homme » répondent aux grands prêtres et aux pharisiens les gardes qui ont enfreint l’ordre de l’arrêter.
L’évangile de Jean rapporte des entretiens lumineux, comme celui de Jésus avec Nicodème ou avec la Samaritaine. Avec ses apôtres, toutefois, Jésus va plus en profondeur : il leur parle ouvertement du Père et des choses du Ciel, en abandonnant tout langage énigmatique ; ils en sont séduits même s’ils ne comprennent pas entièrement ses paroles ou que celles-ci leur paraissent trop exigeantes.
« Elle est dure, cette parole ! Qui peut l’écouter ? » commentent de nombreux disciples après le discours du Pain de Vie où il est question de donner son corps à manger et son sang à boire.
Alors, voyant s’éloigner ses disciples, il s’adresse aux Douze : « Voulez-vous partir, vous aussi ? »
Pierre, désormais attaché pour toujours à son Maître et fasciné par ce qu’il lui avait dit le jour de leur rencontre, prend la parole au nom de tous et déclare :
« Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as des paroles de vie éternelle ».
Pierre avait bien compris que les paroles de son Maître étaient tout à fait différentes de celles des autres maîtres. Les paroles qui vont de la terre à la terre, appartiennent à la terre et ont le destin de la terre. Les paroles de Jésus, en revanche, sont esprit et vie parce qu’elles viennent du Ciel : elles sont une lumière qui descend du Ciel et qui a la puissance du Ciel. Les paroles de Jésus ont une densité et une profondeur que n’ont pas les autres paroles, celles des philosophes, des hommes politiques, des poètes. Elles sont « paroles de vie éternelle » parce qu’elles contiennent, expriment et communiquent la plénitude de la vie qui n’a pas de fin, parce que c’est la vie même de Dieu.
Jésus est ressuscité et il est vivant. Ses paroles, prononcées dans le passé, ne sont pas de l’ordre du souvenir, mais s’adressent aujourd’hui à chacun de nous, à tous les hommes et femmes de tous les temps et de toutes les cultures : ce sont des paroles universelles et éternelles.
On pourrait dire de Jésus qu’il a excellé dans l’art de la parole : le Verbe lui-même qui s’exprime en paroles humaines. Tout y est inouï : le contenu, l’intensité, l’accent, la voix !
Saint Basile raconte : « Un jour, je m’éveillai comme d’un profond sommeil, je tournai les yeux vers l’admirable lumière de la vérité évangélique et je vis l’inutilité de la sagesse des princes de ce siècle, ceux qui sont marqués par la déchéance . »
Thérèse de Lisieux, dans une lettre du 9 mai 1897, écrit : « Parfois lorsque je lis certains traités spirituels [?] mon pauvre petit esprit se fatigue bien vite, je ferme le savant livre qui me casse la tête et me dessèche le cœur et je prends l’Écriture Sainte. Alors tout me semble lumineux, une seule parole découvre à mon âme des horizons infinis, la perfection me semble facile. »
Oui, les paroles divines comblent notre esprit fait pour l’infini. Elles n’illuminent pas seulement l’esprit mais tout notre être car elles sont lumière, amour et vie. Elles nous apportent la paix, même dans les moments de trouble et d’angoisse. Elles nous donnent la plénitude de la joie au milieu des souffrances qui parfois nous oppriment. Elles nous donnent la force lorsque nous sombrons dans la crainte ou le découragement. Elles nous rendent libres parce qu’elles ouvrent la voie à la Vérité.
« Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as des paroles de vie éternelle ».
La parole de ce mois nous rappelle que Jésus est le maître, l’unique maître que nous voulons suivre, au-delà de l’apparente dureté ou de l’étonnante exigence de ses paroles : honnêteté dans notre travail, pardon, service d’autrui plutôt que bien-être égoïste, fidélité dans la vie conjugale, résistance à la tentation de l’euthanasie auprès d’un malade incurable.
Combien de maîtres nous invitent à des solutions faciles, à des compromis ! Nous ne voulons écouter que notre seul maître et le suivre, Lui qui dit la vérité et « a des paroles de vie éternelle ». Nous pouvons prendre à notre compte ces paroles de Pierre.
Pendant le présent Carême qui nous prépare à la grande fête de la résurrection, nous pouvons nous mettre à l’école de ce Maître et en devenir d’authentiques disciples. L’amour de la Parole de Dieu doit nous habiter : accueillons-la attentivement lorsque nous l’entendons proclamer à l’église, lorsque nous la lisons, l’étudions ou la méditons.
Mais surtout, nous sommes appelés à la vivre, selon l’enseignement de l’Écriture : « Mettez la Parole en pratique. Ne soyez pas seulement des auditeurs qui s’abusent eux-mêmes ! » C’est pour cette raison que nous portons notre attention sur l’une d’entre elles chaque mois, et que nous la laissons nous pénétrer, nous former, nous « vivre ». Vivre une seule parole de Jésus revient à vivre l’Évangile tout entier car dans chacune de ses paroles c’est Lui-même qui se donne, c’est Lui qui vient vivre en nous. C’est comme une goutte de sa divine sagesse qui, à force de tomber au même endroit, se fraye un chemin et s’installe en nous, y imprimant un nouveau mode de penser, de vouloir et d’agir.
Chiara Lubich
Le courage de la cohérence, au risque de perdre son travail
Le courage de la cohérence, au risque de perdre son travail
Je suis étudiante en droit et je travaille en même temps dans un ministère au Paraguay. Je dois souvent aller à contre-courant face à une mentalité opposée au projet de Dieu, pour défendre mes principes jusqu’à en assumer toutes les conséquences. Dans mon milieu de travail, une personne haut placée et qui jouissait de certains privilèges avait un comportement carrément malhonnête. Pour se justifier, elle avait coutume de dire : « si tu veux être avocat et ne rien commettre d’illégal, tu perds ton temps et tu finiras tout simplement par mourir de faim ». Moi, je sentais que ce n’était pas vrai et j’en avais la preuve : je connaissais d’autres personnes qui vivaient de façon cohérente. Je devais le lui dire, avec charité certes, mais je devais le faire, même si je me rendais compte que c’était risqué. Mais la voix intérieure était plus forte et me donnait la certitude que dire à l’autre ce qui ne va pas bien est amour. Comme je le craignais, je perdis mon travail pour avoir manifesté mes convictions. J’en ai terriblement souffert, mais en même temps j’étais en paix parce que je savais que j’avais agi comme il fallait. La conscience d’avoir un Père à qui tout est possible et qui m’aime immensément s’est renforcée en moi. N’est-il pas écrit dans l’évangile que le Père qui prend soin des oiseaux du ciel s’occupe à plus forte raison de nous ? Certes, cela semblait humainement impossible dans la situation économique du Paraguay, pourtant le soir même, j’ai reçu deux propositions d’emploi et le premier entretien d’embauche a été fixé au lendemain. De plus, mon nouveau travail est plus directement en rapport avec mes études et donc plus intéressant et plus formateur. Ma reconnaissance envers le Père est infinie. C’est un nouveau défi qui s’ouvre devant moi et m’offre des occasions d’aimer et de servir par milliers. P.C. – Paraguay Tiré de I Fioretti di Chiara e dei Focolari (Les fioretti de Chiara et des Focolari) – éditions San Paolo

Prière mondiale pour la paix
Prière mondiale pour la paix
Une prière qui fait le tour du monde, 24 heures sur 24 « Les difficultés que la perspective mondiale fait apparaître en ce début de millénaire nous conduisent à penser que seule une intervention divine peut faire espérer un avenir moins sombre, une intervention capable de guider les cœurs de ceux qui vivent des situations conflictuelles et de ceux qui régissent le sort des nations ». Ainsi s’est exprimé le pape à l’angélus du 9 février 2003, en reprenant une phrase de la Lettre apostolique dans laquelle il remet en valeur la prière mariale du rosaire. Réponse enthousiaste des jeunes : le rosaire mondial pour la paix. A toute moment de la journée, grâce aux 24 fuseaux horaires, des jeunes récitent le chapelet, avec la paix comme intention spéciale, là où un conflit existe ou menace, par exemple en Israël, en Côte d’Ivoire, au Congo… Pour ceux qui veulent s’unir à cette initiative des JPMU (Jeunes Pour un Monde Uni), les heures proposées sont les suivantes : Heure française / heure locale et pays concerné 1 18 h : Mexique et Amérique centrale 2 20 h : Chili, Pérou, Colombie 3 22 h : Argentine, Uruguay, Venezuela 4 8 h : Inde 5 8 h, 10 h : Pakistan, Thaïlande 6 12 h : Singapour, Vietnam 7 14 h : Philippines, Hong Kong, Australie (Perth) 8 8 h : Allemagne ; 16 h : Corée, Japon 9 9 h : Belgique, Hollande ; 8 h : Grande Bretagne, Irlande, Côte d’Ivoire ; 18 h : Australie 10 10 h : Italie (Bologne, Castelli romani, Catania, Florence) 11 11 h : Italie (Milan, Naples, Rome), Moyen Orient 12 12 h : Autriche, Suisse ; 11 h : Portugal 13 13 h : France 14 14 h, 15 h : Pologne, Russie 15 15 h : République tchèque, Slovaquie ; 17 h : zone du Kenya 16 16 h : Croatie ; 18 h : Madagascar 17 17 h : Slovénie 18 18 h : Congo ; 14 h : Brésil 19 19 h : Cameroun 20 20 h : Afrique du Sud, Italie (Abruzzes) 21 21 h : Hongrie, Italie (Sardaigne) 22 22 h : Espagne, Italie (Trente et Turin) 23 14 h : Etats-Unis (San Antonio, Los Angeles), Ouest du Canada 24 16 h : Etats-Unis (New York, Chicago), Canada (Toronto)
[:it]Il segreto della pace[:en]From the Apostolic Letter of the Supreme Pontiff “Rosarium Virginis Mariae”[:es]El secreto de la paz
[:it]Non c’era posto per un altro figlio… ma l’amore va oltre[:es]No había lugar para otro hijo… pero el amor va más allá
PAROLE DE VIE DE FÉVRIER 2003
Que nous rappelle le psaume d’où est tirée cette Parole de vie ? Que nous sommes le peuple de Dieu qui, tel un berger, veut nous guider vers la terre promise. Il nous a conçus depuis toujours et sait comment nous devons marcher pour atteindre la plénitude de notre être véritable. Dans son amour il nous montre le chemin, nous indiquant ce qu’il faut faire et éviter.
Voulant nous introduire dans une communion avec lui, Dieu nous parle comme à des amis : si quelqu’un écoute ma voix, conclut le psaume, il entrera dans le repos de Dieu, la terre promise, la joie du Paradis .
Jésus lui aussi se compare à un berger, nous conduisant vers la plénitude de la vie. Ses disciples qui le connaissent écoutent sa voix et le suivent. Il leur promet la vie éternelle.
À chacun, Dieu fait entendre sa voix. Le Concile Vatican II nous le rappelle :
« Au fond de sa conscience, l’homme découvre la présence d’une loi qu’il ne s’est pas donnée lui-même, mais à laquelle il est tenu d’obéir. Cette voix, qui ne cesse de le presser d’aimer et d’accomplir le bien et d’éviter le mal, au moment opportun résonne dans l’intimité de son cœur : “Fais ceci, évite cela”. Car c’est une loi inscrite par Dieu au cœur de l’homme… » .
Lorsque Dieu parle à notre cœur, que devons-nous faire ? Simplement prêter l’oreille à sa parole, sachant que dans le langage biblique, écouter signifie adhérer complètement, se conformer à ce qui nous est dit. Cela revient à se laisser prendre par la main par Dieu et guider par lui . Nous pouvons lui donner toute notre confiance, comme un enfant qui s’abandonne dans les bras de sa mère et se laisse porter par elle. Le chrétien est une personne guidée par l’Esprit-Saint.
« Aujourd’hui, écouterez-vous sa parole ? »
Après ces mots, le psaume poursuit : « Ne durcissez pas votre cœur ». La dureté du cœur, Jésus en a parlé bien souvent. À Dieu on peut résister c’est-à-dire se fermer, refuser de l’écouter. Le cœur dur ne se laisse pas façonner.
Par mauvaise volonté ? Pas toujours ; mais notre cœur est si souvent encombré de trop de bruits : penchants désordonnés conduisant au péché, mentalité du monde qui s’oppose au projet de Dieu, modes, slogans publicitaires… Il est si facile de confondre nos opinions, nos désirs avec la voix de l’Esprit en nous, tombant ainsi dans l’arbitraire et le subjectif.
En moi se trouve la réalité par excellence : je ne dois jamais l’oublier. Alors, je ferai tout taire en moi pour y découvrir la voix de Dieu. Puis j’extrairai cette voix comme on extrait un diamant de sa gangue de boue : on enlève ce qui a pu la polluer, on l’expose, et on se laisse guider par elle. Alors je pourrai aussi guider les autres parce que la voix ténue de Dieu qui stimule et éclaire, cette sève qui monte du fond de mon âme, est sagesse, elle est amour, et le propre de l’amour est de se donner.
« Aujourd’hui, écouterez-vous sa parole ? »
Notre sensibilité d’âme et notre instinct évangélique peuvent-ils s’affiner pour mieux écouter ce que la voix nous suggère ?
C’est possible d’abord en nous réévangélisant constamment par la lecture et surtout par la pratique de la parole de Dieu. Nous apprendrons à reconnaître sa voix en nous si nous nous habituons à l’écouter de la bouche de Jésus, parole de Dieu faite homme. Demandons-le lui dans la prière.
Et puis laissons vivre le Ressuscité en nous, en renonçant à nous-mêmes, en combattant notre égoïsme, notre « vieil homme », toujours à l’affût. Ayons le réflexe de dire non tout de suite à ce qui s’oppose à la volonté de Dieu et oui à tout ce qu’il veut. Non aux tentations et oui à nos devoirs, à l’amour envers tous les autres, oui aux épreuves et aux difficultés.
Enfin, nous reconnaîtrons plus facilement la voix de Dieu si le Ressuscité vit au milieu de nous, c’est-à-dire si nous nous aimons jusqu’à ce que l’amour devienne réciproque, en créant partout des oasis de communion, de fraternité. Jésus au milieu de nous est comme le haut-parleur qui amplifie la voix de Dieu en chacun de nous. L’apôtre Paul nous apprend que l’amour chrétien, vécu dans la communauté, s’enrichit toujours plus en connaissance et en clairvoyance, et nous aide à discerner ce qui convient le mieux.
Notre vie grandira entre deux flammes : Dieu en nous et Dieu au milieu de nous. Dans ce foyer divin nous pouvons nous former et nous entraîner à écouter et à suivre Jésus.
Que c’est beau une vie guidée autant que possible par l’Esprit-Saint ! Elle de la saveur, de la vigueur, elle est authentique et lumineuse.
Chiara LUBICH