Mouvement des Focolari

Mars 2012

« Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as des paroles de vie éternelle. » Pierre avait bien compris que les paroles de Jésus étaient d’un autre ordre que celles des autres maîtres. Les paroles qui viennent de la terre appartiennent à la terre et sont appelées à y retourner. Venues du Ciel, les paroles de Jésus sont esprit et vie. Lumière descendue d’En-haut, elles en ont la puissance. Elles recèlent une densité et une profondeur uniques que n’ont pas les autres paroles, celles des philosophes, des hommes politiques, des poètes. Elles sont « paroles de vie éternelle[6] » parce qu’elles contiennent, expriment et communiquent la plénitude de la vie qui n’a pas de fin, c’est-à-dire la vie même de Dieu. Jésus est ressuscité et il est vivant. Ses paroles, même si elles ont été prononcées dans le passé, ne sont pas un simple souvenir. Elles s’adressent aujourd’hui à chacun de nous, à tous les hommes de tous les temps et de toutes les cultures : ce sont des paroles universelles et éternelles. Les paroles de Jésus ! Quel contenu, quelle intensité, quelle expression ! C’est le Verbe lui-même qui s’exprime en paroles humaines ! Saint Basile[7] raconte : « Un jour, comme si je m’éveillais d’un profond sommeil, je tournai les yeux vers l’admirable lumière de la vérité évangélique et je vis l’inutilité de la sagesse des princes de ce siècle[8] » Thérèse de Lisieux, dans une lettre du 9 mai 1897, écrit : « Parfois lorsque je lis certains traités spirituels […] mon pauvre petit esprit se fatigue bien vite, je ferme le savant livre qui me casse la tête et me dessèche le cœur et je prends l’Ecriture Sainte. Alors tout me semble lumineux, une seule parole découvre à mon âme des horizons infinis, la perfection me semble facile[9] » Oui, les paroles divines comblent notre esprit fait pour l’infini. Elles n’illuminent pas seulement l’esprit mais tout notre être car elles sont lumière, amour et vie. Elles nous apportent la paix – celle que Jésus appelle sienne : « ma paix » – même dans les moments de trouble et d’angoisse. Elles nous donnent la plénitude de la joie au milieu des souffrances, qui, parfois, tenaillent notre âme. Elles nous donnent la force lorsque nous sombrons dans la crainte ou le découragement. Elles nous rendent libres parce qu’elles ouvrent la voie à la Vérité. « Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as des paroles de vie éternelle. » La Parole de ce mois nous rappelle que Jésus est notre unique Maître. Nous avons à le suivre quelle que soit l’apparente dureté de ses paroles : elles exigent de nous l’honnêteté dans le travail, le pardon, le service des autres – plutôt que de penser à nous de façon égoïste – la fidélité à nos engagements, dans la vie familiale, etc… de prêter assistance à un malade en phase terminale, en sachant résister à l’idée de l’euthanasie… Alors que beaucoup de maîtres nous invitent à des solutions de facilité, à des compromis, nous ne voulons écouter et suivre qu’un seul Maître, celui qui dit la vérité et « a des paroles de vie éternelle » et devenir ses disciples. En nous aussi doit naître un amour passionné pour la Parole de Dieu : accueillons-la avec beaucoup d’attention lorsqu’elle est proclamée dans nos Eglises, lisons-la, étudions-la, méditons-la. Et surtout, nous sommes appelés à la vivre, suivant l’enseignement de l’Ecriture, vivons-la : « Devenez des réalisateurs de la Parole, et pas seulement des auditeurs qui s’abuseraient eux-mêmes[10] ! » C’est pour cette raison que nous portons notre attention chaque mois sur une Parole, la laissant nous pénétrer, nous former, nous « faire devenir elle ». Vivre une seule parole de Jésus revient à vivre l’Evangile tout entier car dans chacune de ses paroles c’est Lui-même qui se donne, c’est Lui qui vient vivre en nous. C’est comme une goutte de sa divine sagesse, à lui, le Ressuscité, qui, lentement se fraye un chemin et s’installe en nous, y imprimant un nouveau mode de penser, de vouloir, d’agir, quelles que soient les circonstances de la vie.

Chiara Lubich

 


Parole de vie publiée en avril 2003 [1] Cf Lc 9,11. [2] Cf. Mt 7,29. [3] Jn 7,46. [4] Jn 6,60. [5] Jn 6,67. [6] Jn 6,68. [7] Saint Basile (329-379), évêque de Césarée, un des plus célèbres Pères de l’Eglise grecque. [8] Y. Courtoune. Saint Basile et son temps, Lettre CCXXII. Etudes anciennes. Ed. Les Belles Lettres. Paris 1973, p. 52 [9] Lettre 226 au Père Roulland. [10] Jc 1,22.

En famille, toujours s’accueillir

En famille, toujours s’accueillir

Maria et John vivent en Italie depuis de nombreuses années. «Nous nous sommes demandés – raccontent-ils, dans le témoignage donné à l’occasion de l’anniversaire de Renata Borlone – si, tout en étant faits l’un pour l’autre, nous aurions pu être témoins d’unité dans notre propre famille, moi  américain et Maria autrichienne, plongés dans la societé italienne». Les différences entre eux sont multiples et semblent s’opposer: le nouveau continent américain et le vieux monde d’Europe. La langue: ils parlent entre eux ni l’allemand ni l’anglais, mais une troisième langue, l’italien. Différence de culture, d’origines familiales, de formation professionelle et intellectuelle, d’âge (13 ans d’écart) et enfin – raconte encore John – «je suis simplement un homme et elle une femme, avec des caractères, des exigences et des sensibilités différentes». «Un épisode significatif de cette diversité s’est justement passé pendant le voyage de noce en Sicile – poursuit-il – Tout est beau, ravissant… nous arrivons à Sélinonte et Maria s’exclame enthousiaste: ″Quels beaux temples, ils évoquent un passé merveilleux !″. Et moi, de lui répondre: ″Pourquoi ces vieilles pierres et ces colonnes à moitié cassées? Ce serait mieux de les retirer pour construire un beau gratte-ciel″. Où sera notre point de rencontre?  Sûrs du projet d’amour que Dieu avait sur nous, nous avons eu l’intuition que ce ne serait ni dans les temples – l’histoire – ni dans les gratte-ciel – la terre jeune, nouvelle – que nous nous serions rencontrés, mais dans l’accueil l’un de l’autre». «Cet accueil, c’est Renata qui nous l’a appris par sa vie. Elle avait une façon spéciale d’écouter, elle mettait toujours l’autre à la première place. Je me sentais pleinement accueillie, comprise, aimée»: c’est Maria qui racconte, évoquant quelques moments difficiles vécus dans le mariage. «Je ne comprenais plus mon mari. Sa façon d’être, de penser me mettait en crise, mais désormais nous avions quatre enfants encore petits. Un soir il me semblait que je n’y arrivais plus et j’ai courru chez Renata. J’ai déversé sur elle mon plus grand doute: je m’étais trompée en épousant John! Comme toujours, elle m’a écoutée en prenant sur elle ma souffrance. Puis, avec une certitude inébranlable, elle m’a rappelé que, lorsque je m’étais mariée, j’étais sûre que John était la personne juste pour moi, au-delà de nos différences. Ce soir-là j’ai trouvé une nouvelle force. Oui, nous aurions réussi à nous aimer jusqu’au bout!». «Encore aujourd’hui, après 40 ans de vie ensemble – conclu John – nous expérimentons combien c’est vrai  qu’en accueillant nos différences dans le positif, comme ce quelque chose qui peut nous enrichir et nous compléter, alors une nouvelle harmonie naît et renaît entre nous».

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Innovation, marché et société

Professeur Luigino Bruni, dans votre article publié sur Nuova Umanità, vous décrivez la figure de l’entrepreneur d’une façon particulière. Pouvez-vous nous expliquer comment les figures de l’investisseur, du manager et du spéculateur ont fini par se confondre avec celle de l’entrepreneur-innovateur ? Beaucoup dépend de la révolution de la finance, qui a investi l’économie (pratique et théorie) durant les 20 dernières années (…) en raison de la mondialisation. L’Occident a ralenti sa croissance, mais il n’a pas voulu réduire la consommation. La finance créative a alors promis une phase de croissance de la consommation sans croissance du revenu, avec de nouveaux instruments techniques. Il en est résulté que de nombreux entrepreneurs se sont transformés en spéculateurs, pensant faire des profits en spéculant, en laissant leur secteur traditionnel et leur vocation. Une seconde raison a été l’uniformisation des cultures d’entreprise, à la suite d’un fort pouvoir de la culture anglo-saxonne. La tradition européenne et italienne de gestion des entreprises était caractérisée par une forte attention de la dimension communautaire et sociale, à cause de la présence d’un paradigme catholico-communautaire. Il en est résulté, avec la première cause de la révolution financière, que les managers ont assumé un rôle toujours plus central dans les grandes entreprises, au détriment des entrepreneurs traditionnels. Aujourd’hui, il existe un énorme besoin de lancer une nouvelle façon d’être entrepreneurs, si nous voulons sortir de la crise, et de réduire le poids des spéculateurs. En partant de la Théorie de l’évolution économique de Schumpeter, vous décrivez le marché comme un « relais vertueux » entre innovation et imitation, (…) mais le profit, pour l’innovateur, est essentiellement circonscrit au temps qui passe entre l’innovation et l’imitation. Comment éviter que ce « relais vertueux » engendre au contraire un dommage réciproque entre entreprises ? Ici, la politique a un rôle important, ainsi que les institutions en général, qui devraient faire en sorte que le relais soit vertueux et pas vicieux, avec des réglementations appropriées en faveur de la concurrence et du fonctionnement correct des marchés. Mais la société civile a aussi un rôle essentiel ; les citoyens-consommateurs, avec leurs choix d’achat, doivent récompenser les entreprises qui ont des comportements éthiquement corrects et « punir » (en changeant d’entreprise) celles qui ont une attitude prédatrice et agressive. Le marché fonctionne et produit des fruits lorsqu’il est en contact continu avec les institutions et avec la société civile. Enfin, vous décrivez les caractéristiques de la « concurrence civile », dans laquelle la compétition ne se joue pas selon la formule Entreprise A contre Entreprise B pour attirer le client C, mais plutôt selon la formule Entreprise A pour le client C et Entreprise B pour le client C. Pouvez-vous nous expliquer quels effets positifs cette façon différente de voir la concurrence entraîne ? Quels exemples de « concurrence civile » pouvez-vous nous donner ? En premier lieu, elle contribue à créer un climat affectif différent dans les échanges sur le marché. Notre lecture et description du monde est très importante pour les comportements que nous assumons. Si je lis que le marché est une lutte pour gagner, lorsque je vis des moments d’échange sur le marché ou aussi au travail, je tends à m’approcher de ces domaines avec une attitude mentale et spirituelle qui influence beaucoup les résultats que j’obtiens ensuite et le bonheur (ou malheur) que j’expérimente. Si, au contraire, je vois le marché comme un grand réseau de relations coopératif, je favorise la création de biens relationnels, y compris dans les moments « économiques » de ma vie, et le bonheur individuel et collectif augmente. En outre, lire le marché comme une coopération colle plus à la vision des grands classiques de l’histoire de la pensée économique (Smith, Mill, Einaudi, et aujourd’hui Sen ou Hirschman) et s’approche plus de ce que des millions de personnes expérimentent chaque jour en travaillant et en échangeant, et pas uniquement dans l’économie sociale. Et comme exemples de « concurrence civile », je citerais le microcrédit, la coopération sociale, l’économie de communion, le commerce équitable et solidaire. Ce sont des exemples de cette concurrence civile, au moins comme des phénomènes macroscopiques.

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Etats-Unis: Un peuple «adapté à la spiritualité de l’unité»

L’Union de 50 Etats, connue comme Etats-Unis d’Amérique, s’étend sur un vaste territoire de l’extrême nord-ouest de l’Alaska à l’extrême sud-est de la Floride. Les premiers focolarini arrivent de l’Italie en 1961. En ces années-là s’ouvrent les premiers centres du Mouvement à Manhattan, Chicago et Boston et à la fin des années 70 à San Antonio et Los Angeles, suivis des centres à Washington DC, Columbus et Atlanta. La «Mariapolis Luminosa», située à Hyde Park (New York) et inaugurée en 1986, est le coeur du Mouvement en Amérique du Nord.   «J’ai été profondément touchée par ce pays. J’ai eu une bonne impression – écrit Chiara Lubich en 1964 durant son premier voyage à New York – (…) il me semble particulièrement adapté à l’esprit du Focolare. Il n’y a pas de sentiment de supériorité ethnique, mais un vrai sens de l’internationalité. C’est la simplicité qui domine. A la messe j’ai prié pour le Mouvement sur ce continent et j’espère que Dieu écoute ma prière car je prie pour la diffusion de Son règne». Sa prière a été entendue. En effet, au long des années fleurissent des communautés dans tout le pays. Contemporainement à la croissance du Mouvement des focolari, se développent les dialogues avec les autres religions. Avec les juifs, qui entrent en contact avec la spiritualité de l’unité, le dialogue s’exprime dans la vie quotidienne, dans la collaboration professionnelle et dans l’étude théologique. Un fraternel «dialogue de la vie» se développe avec les musulmans disciples de l’Imam W.D Mohammed dans tous les coins du pays. Chiara visite les Etats-Unis au moins sept fois. En 1990 elle souligne d’avoir «saisi les différentes marques du monde uni» sur cette terre. En mai 1997, reçue par l’Imam W. Deen Mohammed, elle parle de la spiritualité de l’unité à environ 3000 musulmans réunis à la mosquée Malcolm Shabazz, de Harlem. Par la suite, lors d’un symposium organisé en son honneur par la WCRP (Conférence Mondiale des Religions pour la Paix), elle parle de l’unité des peuples dans le Palais de verre de l’ONU. Enfin, un prix honoris causa  lui est attribué par la Sacred Heart University de Fairfield (Connecticut). En 2000, l’Imam Mohammed l’invite à revenir aux Etats-Unis: «L’Amérique a besoin de ton message», lui dit-il. Le 2 novembre de cette même année, 5000 chrétiens et musulmans se rassemblent à Washington DC pour une rencontre organisée par les deux communautés et intitulée “Faith Communities Together” (Communautés de foi ensemble). Des rencontres de ce genre se multiplient dans différentes villes, avec des événements annuels qui ressemblent plus à des réunions familiales qu’à des rencontres de dialogue. Dans son dernier voyage aux USA, Chiara reçoit un diplôme universitaire honoris causa en pédagogie à l’Université Catholique de Washington DC, dans une salle comble avec plus de 3000 personnes parmi lesquelles des juifs, des bouddhistes, des indous et de nombreux musulmans afro-américains, ceci seulement pour souligner l’apport des Focolari dans le dialogue entre les religions. En même temps, le projet de l’Economie de Communion s’enracine avec 19 entreprises de différents domaines  comme l’ingénierie environnementale, l’art, l’instruction, l’agriculture, les loisirs et le conseil en entreprises. La récente visite, en 2011, de l’actuelle présidente des Focolari, Maria Voce, et du co-président, Giancarlo Faletti, à l’occasion du 50ème anniversaire de l’arrivée du Mouvement en Amérique du Nord, a rassemblé 1300 personnes représentantes de nombreuses communautés du Canada, des Etats-Unis et des Caraïbes, y compris des juifs et des musulmans afro-américains. Toujours pour le 50ème anniversaire, est sorti le livre «Focolare – Living a Spirituality of Unity in the United States». Il essaie de répondre aux questions sur le Mouvement aujourd’hui, à travers les histoires fascinantes d’une variété d’Américains (enfants, jeunes, couples, personnes âgées, célibataires, religieuses, prêtres et évêques qui font partie des Focolari), dont la vie a été transformée par la rencontre avec Jésus. Les lecteurs  peuvent y découvrir les valeurs spirituelles et pratiques essentielles des focolari, les différents ‘sentiers de vocation’ de ses membres et sa vigueur dans le soutien des valeurs de la culture américaine comme la joie, la liberté, la vie ensemble et l’engagement pour le bien commun dans la vie publique.

Mariapolis Luminosa

NY Rencontre des jeunes

NY Célébration du 50°

Fordham Uni – St Patrick’s Cathedral

St Patrick’s Cathedral

Focolarini

Washington DC

Chicago – jeunes

Chicago – Rencontre Interreligieuse

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USA : une petite ville où on prend soin les uns des autres

En 1979, notre famille a déménagé à North Riverside, une petite ville d’environ 6000 habitants, près de Chicago. À la même période, nous avons appris que notre fils David, gravement handicapé, avait besoin d’une thérapie intensive. Nos voisins, ainsi que les pompiers, nous ont aidés, chaque jour pendant sept ans, pour que David puisse un jour réussir à marcher et à parler. Je me souviens avoir demandé à Dieu de nous montrer ce que nous aussi nous pouvions faire pour notre ville et ses habitants. Peu de temps après, notre ancien maire a écrit une lettre en demandant des idées pour un programme de services de quartier qui requérait des responsables pour chaque pâté de maisons. J’ai répondu à sa lettre en lui racontant mon expérience. Quelque temps après, il m’a demandée si je pouvais être la coordinatrice du programme. Il y avait 72 responsables, un par pâté de maison de North Riverside. J’ai pensé leur proposer comme objectif que leur pâté de maison devienne une famille, où personne ne se sente plus seul. Nous avons adapté « les points de l’art d’aimer », de Chiara Lubich, et nous en avons choisi quatre que j’ai appelés « L’Art de prendre soin ». À chaque rencontre des responsables, je prenais un des points et je l’illustrais avec une expérience concrète sur un de ces points. Au début, j’utilisais mes expériences et celles de ma famille ou des histoires de personnes célèbres. Mais, après quelques années, ils ont eux-mêmes commencé à communiquer aux autres ce qu’ils avaient fait pour vivre les points du « prendre soin ». Une des premières expériences concernait une nouvelle venue qui avait l’habitude de laisser ses chiens aboyer dehors, tôt le matin jusqu’à tard le soir. Au lieu de se plaindre et d’appeler la police, le responsable et les voisins se sont mis à « aimer leurs ennemis » en cherchant à établir un rapport avec la propriétaire, en préparant des biscuits pour elle et même en l’aidant à attraper les chiens lorsqu’ils s’échappaient du jardin. Ils ont, seulement alors, exprimé leur préoccupation que les aboiements continuels pouvaient déranger un nouveau-né voisin. Non seulement le maire encourageait ces actions individuelles, mais il a aussi cherché, à travers les responsables du pâté de maisons, à impliquer toute la ville à « prendre soin des autres ». Par exemple, quand un nouveau résident arrive, les responsables lui souhaitent la bienvenue avec un cadeau. Ils s’intéressent aux personnes, spécialement à celles qui souffrent. Ils leur envoient une carte, leur amènent des vivres, écoutent leurs problèmes… « Nous utilisons le courriel pour nous communiquer ces nécessités, comme dans une famille. Ainsi, nous savons tous qui a besoin d’aide », racontent-ils. Certains responsables offrent souvent d’amener quelqu’un chez le docteur ou faire les courses pour les personnes confinées à la maison. « Récemment, nous avons publié un petit livre avec les expériences faites en l’espace de vingt ans, avec des idées pour aider qui veut vivre la “Règle d’Or” : fais aux autres ce que tu voudrais qu’on te fasse », continuent-ils. Le petit livre a été distribué à des médecins, assistants sociaux, enseignants et politiques, et à tous ceux qui voulaient faire la différence dans leur coin de monde. « L’Art de prendre soin » s’est aussi étendu à d’autres villes. Lors d’une des rencontres entre délégations de différentes villes, le rédacteur du bulletin d’information a déclaré : « Lorsque je parle de North Riverside à mes concitoyens, ils me disent qu’une ville dans le genre ne peut pas exister. Et je réponds : Venez et vous verrez ! » Lire plus : http://www.northriverside-il.org/departments/recreation/neighborhoodservices.html

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Ne pas avoir peur de l’Autre

Une paroisse catholique de Kleinbasel rend visite à la communauté musulmane du quartier. Après la prière de midi des musulmans, ils restent pour le repas commun. L’imam Mohammed Tas raconte: « L’après-midi a été ponctué par trois tournois de foot : les enfants contre les enfants, les jeunes contre les jeunes et les adultes contre les adultes… les imams contre les curés ». « Nous avons perdu – réplique le curé Ruedi Beck en souriant – mais l’amitié s’est renforcée ». Et l’imam de poursuivre : « Nous nous réjouissons chaque fois que nous nous voyons. Beaucoup de choses nous unissent : nous sommes de la même ville, nous sommes des humains, nous avons les uns et les autres beaucoup de travail et beaucoup de soucis. Nous prions les uns pour les autres et nous nous aidons dans la mesure du possible ». Cet exemple, parmi d’autres faits racontés lors de cette rencontre «Musulmans et Chrétiens en dialogue », montre bien qu’il est possible, pour des communautés religieuses différentes, de vivre comme une seule famille. Le thème «  La Parole de Dieu écoutée et vécue » a servi de base au dialogue. L’imam de Baar, Ali Cetin, a fait pénétrer les participants dans la compréhension musulmane de ce thème, de qui est Dieu et sa parole pour les musulmans : « Quelqu’un qui reçoit un mail, un sms ou une lettre d’un ami qu’il aime beaucoup, lit et relit le message mot par mot. Il apprécie chaque parole, chaque phrase. C’est de cette façon que les musulmans vénèrent le Coran, que Dieu a envoyé aux hommes. Ses versets sont prononcés avec amour, appris par cœur et mis en pratique ». Dans la foi chrétienne, l’amour de Dieu un et trine a une place centrale. Les mots de Chiara Lubich, présenté en un court extrait vidéo l’expriment bien : « Nous croyons que Dieu nous aime chacun personnellement et infiniment… Le Coran le dit aussi : ‘Les croyants sont ceux qui aiment Dieu par-dessus tout’. C’est ce qui nous relie de plus fort. Nous ne sommes donc plus musulmans ou chrétiens, mais frères et sœurs, des personnes qui mettent Dieu à la première place… » Ces phrases, la fondatrice du Mouvement des Focolari les a prononcées en 1998 devant les participants à un congrès international de musulmans à Rome. Le principal intervenant de la journée, Mustapha Baztami, imam de Teramo (Italie), qui a connu personnellement Chiara Lubich, a rappelé que celle-ci a été la première chrétienne et la première femme à avoir parlé dans une mosquée à Harlem, en 1997. Elle a réussi à jeter de véritables ponts entre les religions. Elle n’avait pas peur de rencontrer l’altérité des différentes religions, car elle proclamait sa foi en Dieu non pas avec des slogans, mais avec sa vie. Pendant la Séance plénière une musulmane s’est exprimée ainsi: « Aujourd’hui nous nous sommes sentis au même niveau, en famille, acceptés par tous. Nous sommes comme un pont, un no man ‘s land, qui relie tous. » La Règle d‘Or – C’est ce dialogue qu’ont vécu concrètement les quelque 80 participants – à parts égales musulmans et chrétiens – venus des trois régions linguistiques de la Suisse et originaires de 17 pays, de la France au Kosovo, de l’Italie à l’Albanie, de la Turquie à l’Algérie, jusqu’à la Côte d’Ivoire. Parmi eux, des personnalités comme le Dr Taner Hatipoglu, président de l’Association des organisations islamiques de Zurich, ainsi que quatre imams. Marianne Rentsch et Franco Galli, responsables du Mouvement des Focolari en Suisse, ont conclu la journée en parlant de la « Règle d’Or ». Chaque participant a pu la recevoir au format carte de crédit et en trois langues, sous sa forme musulmane et chrétienne : « Aucun de vous n’est croyant tant qu’il ne désire pas pour son frère ce qu’il désire pour lui-même » (Mohammed, 13e Hadith dans le livre des 40 Hadith de al-Nawawi) – « Ce que vous voudriez que les autres fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux » (Luc 6,31). Beatrix Ledergerber-Baumer

Congrès Gen 3: «La Parole Crée»

Connaître, Vivre, Communiquer, Agir. Autour de ces quatre axes de pensée et d’action s’est déroulé du 17 au 21 février au Centre Mariapolis de Castelgandolfo le congrès des Gen 3. 410 jeunes, de 13 à 17 ans, de 17 nationalités différentes, quelques unes même extra-européennes: Brésil, Panama, Chili, Costa Rica et Venezuela. Un représentant de l’Iraq était aussi présent. Thème central de la rencontre: «La Parole Crée», que les adolescents ont approfondi de différentes façons à travers un programme équilibré. Celui-ci alternait des moments en salle, des travaux de groupes, des temps de dialogue sur des thèmes variés et également des moments de «coeur à coeur avec Dieu». Les Gen 3 ne sont pas restés les bras croisés. En véritables acteurs de la rencontre, ils se sont lancés dans une série d’ateliers dans lesquels ils ont pu s’exercer sur le thème de la «Parole» dans différents domaines de la communication. Répartis en petits groupes, ils ont exploré les secrets de la publicité et les techniques des journaux télévisés et du Web. Ils ont connu de près les rédactions du Journal Gen3, du site focolare.org et du SIF (service d’information focolari). Ils se sont encore entraînés avecla Teens TV, la Teens radio, Città nuova, le Centre Sainte Claire Audiovisuel et dans le secteur informatique. Quelques uns sont ensuite allés interviewer le maire de Grottaferrata (Rome) Gabriel Mori auquel ils ont posé neuf questions sur Chiara Lubich, le mouvement des Focolari, l’expérience de sa vie politique, sur comment il vit l’Evangile et sur le rôle des adolescents dans le quotidien de la ville. Un groupe important de Gen 3 a travaillé côte à côte avec les membres du groupe international Gen Rosso, pour la mise au point d’un spectacle intitulé «Street light» qui s’est ensuite produit au Palais des Sports de Genzano (Rome), mis à disposition par le maire et ouvert à tous gratuitement. Il s’agit de l’histoire d’un jeune caïd d’une métropole des années 60 à Chicago dans laquelle est racontée de manière créative comment on peut gagner par la paix, le pardon, la solidarité des uns envers les autres. L’adversaire n’est pas un ennemi. Même les Gen 3 ont leurs histoires de la vie quotidienne éclairées par l’Evangile. Prennent la parole des adolescents africains, européens, sud-américains qui racontent comment à la vengeance en raison d’un préjudice subit, il est répondu avec le pardon et à la façon la plus facile de s’adapter, par le choix d’aller à contre courant. «Lors d’une partie de basket – raconte Andrea – il y a longtemps, par ma faute, un jeune est tombé. Je me suis approché et je l’ai aidé à se relever. Du banc, mon entraîneur s’est fâché parce que j’avais aidé un adversaire. Selon sa philosophie je n’aurai pas dû le faire. J’ai cependant pensé que je devais aimé ce jeune mais aussi l’entraîneur et lui faire comprendre qu’on pouvait gagner tout en respectant l’adversaire et non pas en le considérant comme un ennemi».

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Le travail et la redécouverte d’une conscience sociale

PLAY VIDEO (Italian soundtrack)

« L’homme doit faire renaître en lui, au nom de Dieu qui l’a créé, la conscience de sa “socialité”, du fait qu’il est un être social, dimension sans laquelle il ne serait pas encore complètement homme. Un autre élément constitutif de l’homme, en effet, selon la Bible, outre la communion avec Dieu et le fait d’être appelé à se procurer sa subsistance et à se dédier au travail, est sa “socialité”, ses rapports avec les autres. Dans la pensée de Dieu “socialité” signifie aimer les frères comme soi-même,“comme soi-même”, rien de moins. Bien plus, les aimer d’un amour qui, parce qu’il émane de plusieurs personnes, devient réciproque et qui, parce qu’il est inspiré par le Christ, engendre l’unité. L’accent que nous avons mis précédemment sur le fait d’avancer ensemble dans la vie dans une unité toujours plus grande acquiert ici tout son sens. Nous pensons que notre spiritualité collective, née de l’Évangile, peut concourir avec une certaine efficacité à la solution des problèmes actuels du travail. Grâce à elle, l’homme, et donc chaque personne du monde du travail (du propriétaire à l’administrateur, du directeur aux techniciens, des employés aux agents de maîtrise) chacun, pour être solidaire, aime les autres de manière à devenir une seule chose avec eux. Grâce à elle, nous sommes portés à nous comprendre mutuellement, à faire nôtres les efforts des autres, à sentir nôtres leurs problèmes, à trouver ensemble des solutions. Cette spiritualité nous conduit à trouver d’un commun accord de nouvelles formes d’organisation du travail. Et l’on en arrive ainsi à partager, à participer, tous ensemble, autant aux moyens de production qu’aux fruits du travail. Qu’en résulte-t-il ? Prenons un exemple. Si auparavant pour un ouvrier, le travail industriel était écrasant et anéantissait sa propre personnalité, car il n’y voyait pas le fruit de son intelligence ni l’œuvre de ses mains, par contre s’il sent sien, vraiment sien, tout ce qui concerne aussi les autres, le travail ne peut que retrouver son sens, bien plus, un sens exaltant. La redécouverte d’une vaste conscience sociale est, par conséquent, nécessaire. (…) Mieux, étant donné que l’économie de chaque pays est liée à celle des autres nations – comme l’affirme aussi le Pape, – une conscience sociale à dimension planétaire est nécessaire. Mais qui peut aider l’homme à réaliser pleinement cela, à se considérer membre de la grande famille humaine “sans renier ses racines, son appartenance à sa famille, à son peuple, à sa nation, ni les obligations qui en découlent…”[1] ? Car l’homme a brisé la communion avec Dieu par le péché ; il a compromis et il compromet sans cesse gravement la communion avec ses frères et donc la solidarité humaine. Qui peut le faire ? Seul le Christ que l’on relègue souvent au domaine de la vie privée. Au contraire, son amour surnaturel et universel, que l’on limite à la vie de prière, est le ferment indispensable de toute l’existence humaine dans ses multiples expressions. C’est seulement avec son amour que l’on peut édifier, avec certitude, un monde où la justice et la paix sont durables. Pour ce qui est du travail, c’est par l’amour du Christ que l’égoïsme et la haine, considérés souvent comme lois essentielles de la vie sociale, pourront être éliminés. C’est avec son amour que, dans les communautés de travail on s’apercevra que l’unité est bien plus utile que la division pour améliorer le travail. Avec son amour, la vie de la société elle-même ne sera pas considérée comme une lutte contre autrui mais comme un engagement à grandir ensemble. Seule une nouvelle civilisation, basée sur l’amour, pourra aussi apporter une solution aux problèmes complexes du monde du travail ».

Chiara Lubich


[1] Cf. Jean-Paul II, Allocution à l’Organisation Internationale du Travail (O.I.T.) n°10, Genève, 15/06/1982.