Dialoguer : pourquoi et comment ?

 

Quelques clés offertes par la spiritualité de l’unité des Focolari

Dans une discussion on vise l’échange d’informations. Dans un débat on veut convaincre et avoir raison et il y aura donc des gagnants et des perdants. Dans un dialogue on veut se comprendre réciproquement et créer un lien, chercher à découvrir le « fil d’or », comme l’écrit la fondatrice des Focolari : « Ceux qui sont près de moi ont été créés comme un don pour moi, et moi comme un don pour eux. Sur terre, tout est en relation d’amour : Tout avec tout. Cependant il faut vivre l’Amour pour déceler le fil d’or qui relie les êtres. »[1] Chiara Lubich[2]

Conditions d’un vrai dialogue

Pour entrer en dialogue, il ne suffit donc pas d’échanger des paroles, mais il s’agit de se faire le don réciproque de notre altérité, de notre diversité. Il importe de laisser parler en nous un amour (celui du Christ) qui ne fait pas de discrimination, prend l’initiative, approche l’autre comme un frère, une sœur, avec un grand respect.

Le cardinal de Kesel écrit à ce sujet : « Le dialogue n’est pas suffisant. Il ne peut être vraiment fertile que s’il est le fruit d’une vraie rencontre. »[3]

Un tel dialogue exige silence et écoute. Une écoute active qui demande de ‘vivre l’autre’ – que de fois nous nous laissons emporter dans des conversations stériles où nous parlons en interrompant l’autre, pour affirmer notre point de vue – pour laisser l’espace à l’Esprit de Dieu. Chercher à déplacer momentanément ses propres pensées et émotions pour comprendre l’autre et accueillir en nous sa joie et sa douleur. Se ‘faire un’ avec lui, se faire « tout à tous » (St Paul, 1 Corinthiens 9:16-23 ). Aller à la découverte de ce que l’autre porte au plus profond de lui.

Ce qui émerge ainsi, c’est un style de vie imprégné de l’Evangile, une démarche exigeante qui demande un exercice régulier.  Aussi Chiara Lubich l’a-t-elle défini comme ”un art”, une méthodologie que l’on propose à tous : chrétiens, hommes et femmes de diverses religions et personnes sans référence religieuse précise.

Racines du dialogue

Pour les chrétiens et les trois religions monothéistes (le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam), c’est Dieu lui-même qui va à la rencontre de ses créatures, en établissant avec elles une alliance. Il nous invite à adhérer à son projet d’amour de chaque instant. Le philosophe juif Levinas est le chantre de l’altérité. Pour lui, regarder le visage de l’autre, c’est regarder l’infini. Quelle merveille ! Quel défi !

Dans l’encyclique Fratelli tutti, le document qui plaide pour une culture de la fraternité, du dialogue et de la rencontre, le pape François déclare : « Le dialogue n’exclut pas la divergence des opinions mais permet à chacun d’être lui-même tout en étant différent » (Fratelli tutti, 218).

Fruits du dialogue

L’unité dans la diversité, plus qu’un slogan, est une réalité qui peut nous combler. Elle s’enrichira en effet de ce que l’autre apporte dans la relation. On ne sort pas indemne d’un authentique dialogue. Une nouvelle compréhension de la vérité se fait jour, une nouvelle lumière qui est celle de la présence du Ressuscité, de Dieu « là où deux ou trois sont réunis en mon nom » (Matthieu 18, 20).

Grâce à la spiritualité de l’unité des Focolari on peut faire l’expérience d’une communion, d’une relation d’amour qui s’inspire de celle de la Trinité. Cette spiritualité est une nouvelle fenêtre ouverte sur le cœur du mystère pascal, selon les termes du théologien Urs von Balthasar.

Le dialogue œcuménique et interreligieux

Quand des croyants de différentes confessions chrétiennes ou de différentes religions veulent entrer en dialogue, il est nécessaire que chacun soit bien ancré dans sa foi et ait une identité clairement définie. Il ne faut pour autant pas être théologien pour être acteur du dialogue. Cela peut commencer par le souhait d’un bon Ramadan au musulman que l’on rencontre, ou d’une belle fête de Noël à nos voisins de palier. C’est ce qu’on appelle le ‘dialogue de la vie’, à la portée de tous. Parfois naît un échange des trésors spirituels des uns et des autres, et quelquefois il est suivi d’actions et d’engagements au service du bien commun. Le dialogue théologique quant à lui est plutôt réservé aux experts.

Une expérience un peu inédite

« C’est ça la difficulté et la beauté du chemin pour aller vers Dieu, c’est d’y aller ensemble », dit Ramy dans le documentaire « Au-delà du dialogue »[4]. Ramy est musulman, et le film retrace l’expérience d’un groupe de musulmans d’Algérie qui au contact de chrétiens Focolari, venus vivre en Algérie comme frères parmi leurs frères musulmans, découvrent combien ils ont à se donner les uns aux autres.

Dans ce même film, Pascale Vanderbeken, chrétienne belge Focolari vivant à Tlemcen dit : « On est bien au-delà du désir, même de la pensée de vouloir convertir l’autre. Et je pense que c’est réciproque. Parce que l’expérience qu’on vit ici est tellement satisfaisante et comblante. L’un et l’autre, qu’est-ce qu’on désire ? Le mieux pour l’autre : c’est-à-dire d’essayer de découvrir ce que Dieu a comme projet sur la vie de l’autre […] c’est ma joie de voir que nos amis musulmans se développent et grandissent dans leur foi, dans leur chemin. C’est ça que je leur souhaite.

C’est plutôt bouleversant. Je suis chrétienne, enracinée dans les traditions de mon peuple et dans la religion que je pratique depuis mon enfance. Et en même temps je suis en profonde communion avec ces personnes qui m’accueillent comme un invité précieux et attendu. Peut-être est-ce cela l’expérience qui s’approche le plus du vrai visage de Dieu ? Se retrouver comme des frères, dans une diversité d’expressions et de contrastes qui se multiplient à l’infini, à l’échelle de Dieu. »

Et chez nous en Belgique ?

Depuis un peu plus d’un an a été créé au sein du mouvement des Focolari, un nouveau projet de formation au dialogue s’adressant aux jeunes et aux éducateurs au sens large : Dialogue4All (Le Dialogue pour tous).

L’objectif est de proposer des clés afin d’améliorer la qualité des relations interpersonnelles, et de pouvoir répondre à des questions existentielles comme : Qui suis-je ? Qui est l’autre ? Qui est Dieu ? Comment s’ouvrir à une qualité relationnelle capable de générer collectivement des solutions créatives à la hauteur des enjeux de notre époque ?

Jusqu’ici le projet s’est concrétisé par la création de programmes pour les écoles dans le cadre de leurs retraites scolaires, par la formation d’enseignants et d’étudiants universitaires, et enfin par l’organisation de formations-évènements pour les éducateurs au sens large, ainsi que par le suivi du projet international d’éducation à la paix « Living Peace International » en milieu scolaire.

Website : www.focolare.be ; www.dialogue4all.org

Focolare Belgium : https://www.facebook.com/profile.php?id=100069750248624

Dialogue4All : https://www.facebook.com/profile.php?id=100089485748838; Contact : Claire Hebbelinck, cl.hebbelinck@gmail.com, 0479 04 33 06

[1] Comme un diamant, Nouvelle Cité, 1996, p .115
[2] La fondatrice du mouvement des Focolari, un des nombreux courants spirituels nés dans l’Église catholique au cours du siècle dernier.
[3] Pastoralia 1, 2019, Le miracle de la rencontre
[4] 2019 Association Focolari France & Monte-Charge

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