Entrepreneur et bien plus

 

Koen Vanreusel est co-propiétaire de EasyKit,  fournisseur de  Kits de montage de matériaux pour les installations techniques dans les maisons.  Il dispose d’un réseau de 9 filiales en Flandres et à Bruxelles, occupant presque cent employés.

“Lorsque nous étions  jeunes,  ma femme et moi-même sommes entrés en contact avec un groupe de jeunes à Leuven. Ils s’imprégnaient de l’Evangile dans leur vie quotidienne. C’étaient des jeunes du mouvement des Focolari. Leur style de vie authentique nous rappelait les communautés des premiers chrétiens dont on peut lire entre autres dans l’Evangile qu’ils mettaient tout en commun et que personne n’était dans le besoin.

Cette expérience a été significative pour notre vie de famille.  Depuis lors,  nous avons eu 4 enfants et 9 petits-enfants. Dès le début nous avons considéré notre revenu mensuel et ce que nous possédions non tant comme nos ‘propriétés’, mais comme un cadeau du Père éternel dont nous sommes responsables et que nous cherchons à gérer le mieux possible.  Le fil d’or de notre vie était de partager avec des personnes proches ou lointaines mais pleinement confiants que  nous-mêmes ne manquerions de rien.

Quand le projet de l’Economie de Communion a été lancé, en 1991, nous étions tout de suite enthousiastes parce que nous y avons vu une réponse structurelle au problème de la pauvreté dans le monde. En fait, l’Economie de Communion est née à partir des besoins criants des favelas de San Paolo. Lors d’une visite à la communauté des Focolari au Brésil, Chiara Lubich, la fondatrice, était bouleversée par le fossé existant entre riches et pauvres. L’homme est capable d’ériger des gratte-ciels mais ne sait pas empêcher la mort d’enfants dans les bidonvilles.

Pour l’Economie de Communion trois éléments sont essentiels :

La pauvreté, les pauvres : La personne dans le besoin fait partie intégrante du projet. La pauvreté est souvent la conséquence d’un manque de relations, de l’exclusion sociale à cause de la religion, de la maladie ou du contexte social. En plus de l’aide directe à apporter dans des situations d’urgence, l’Economie de Communion développe dans différentes parties du monde des projets qui visent la formation à l’entrepreneuriat et la création d’emplois.

La diffusion d’une culture du partage, de la communion : Les moyens générés par le projet sont investis d’un côté dans des projets luttant contre la pauvreté, de l’autre dans la diffusion d’une culture du partage, de la communion, avec une attention particulière à la formation de jeunes.

Avec l’Economie de Communion, nous voulons faire partie du groupe des changemakers (acteurs du changement). Cela signifie qu’il faut évoluer des micro-expériences à la macro-économie et cela n’est possible que si beaucoup de personnes s’y engagent.

L’entrepreneur, l’économie:C’est l’entrepreneur, l’entreprise qui créé des emplois; il est par conséquent essentiel pour l’Economie de Communion de placer la personne au centre de tous les rapports.  Avec les stakeholders (toutes les parties prenantes : actionnaires, personnel, fournisseurs, clients ;,–)  cela peut faire une réelle différence.Accorder à l’être humain une place centrale signifie pour moi un plus dans ma vie de chef d’entreprise.  Cela signifie aller plus loin que ce que la loi exige ou le contrat stipule, ou ce qui est la norme. Ainsi naturellement, tu peux faire quelque chose de plus  de gratuit. Cette notion de gratuité ne signifie pas quelque chose qui n’a pas de valeur, mais que c’est non mesurable.

Profit et création de valeur ajoutée: Pour être clair, nous ne rechignons pas à faire du bénéfice et à créer de la valeur ajoutée. Nous travaillons dans une économie de marché dont l’efficacité et dégager des bénéfices en font partie et sont importants.  Mais pas de bénéfice pour le bénéfice ou de maximalisation du bénéfice aux dépens de la personne, mais le bénéfice comme moyen de développer l’entreprise, son personnel mais aussi dans l’optique du rôle social que l’entreprise doit remplir.

Pouvoir partager, donner une partie du bénéfice que l’entreprise produit, en toute liberté, sans obligation, est source d’une joie énorme. Et à chaque fois il s’agit d’un choix personnel qui n’est  pas toujours facile. Notre expérience montre que si tu ne sors pas tes 10 premiers euros de bénéfice de ton portefeuille, tu ne le feras pas non plus lorsque tu enregistreras 100.000 ou 500.000 euros de bénéfice.

La joie de partager : Refaire à chaque fois ce pas, sans léser personne, donne une joie profonde. Pour moi cette attitude donne une autre dimension, un autre objectif à l’entrepreneuriat et moi aussi je peux donner ma petite contribution à la fraternité universelle. Quand je donne, je me sens riche !

Mettre son expertise à disposition: Nous cherchons aussi à mettre en pratique cette culture du partage dans notre entreprise  avec nos collaborateurs. Si l’année a été bonne, nous donnons à nos collaborateurs un bonus et un chèque qu’ils peuvent attribuer à une œuvre sociale qu’ils choisissent. De cette façon ils peuvent aussi décider de l’utilisation faite d’une partie du bénéfice. Ce moment est à chaque fois l’occasion d’un dialogue ouvert.

Comme entrepreneur je veux aussi aider au démarrage de nouvelles activités, de préférence dans les pays où les besoins sont les plus grands et d’y investir une partie de mon temps et de mon énergie. Il importe non seulement de mettre nos compétences à disposition, mais aussi d’avancer et de prendre des risques ensemble, côte à côte.

Easykit à Budapest, en Hongrie: avec deux jeunes ingénieurs nous avons mis sur pied une filiale de notre entreprise, bien que nous sachions que nous ne pouvons pas nous attendre à de grands bénéfices à court terme.

A Bujumbura, au Burundi nous soutenons un projet social où les enfants de la rue reçoivent une formation d’électricien ou de mécanicien.

A Goma, au Congo nous avons lancé un studio de musique avec Belamy, un artiste local qui rêve de mettre la musique et la culture au service des jeunes du Congo de l’est, plutôt que d’aller chercher le succès à l’étranger.

A Man, en Côte d’Ivoire, nous soutenons une coopérative de 14 villages autour de Glolé.

A Abidjan nous avons fait un investissement dans un élevage de lapins. Durant des échanges réguliers par skype nous discutons du développement de l’entreprise.

En guise de conclusion, une citation du pape François lors de l’audience qu’il a donnée en 2018 à une représentation mondiale de l’Economie de Communion :

« Si l’Economie de Communion veut être fidèle à son charisme, elle ne doit pas se limiter à se préoccuper des ‘victimes’ du système économique actuel, mais elle doit viser un ordre économique où il y a de moins en moins de ‘victimes’, et dans la mesure du possible, aucune ‘victime’. Tant que l’économie produit ne fût-ce qu’une seule ‘victime’, la communion totale n’est pas réalisée et la fête de la fraternité universelle n’est pas complète. Pour y arriver, il faut modifier les règles du système socio-économique ».

 

 

 

 

 

 

Lire aussi