Le « génie ecclésial » de Chiara Lubich

 

Récemment, le nouveau livre du coprésident du mouvement des Focolari, Jesús Morán, a été publié sous le titre : « Charisme et prophétie ». Quoique le livre n’existe qu’en italien, il nous a paru intéressant d’en parler avec l’auteur qui est sur le point de terminer les six années de son mandat. En continuité avec le précédent livre, intitulé « Fidélité créatrice. Le défi de l’actualisation d’un charisme », Morán propose, à partir de conférences tenues ces trois dernières années, sa réflexion sur le « génie ecclésial » de Chiara Lubich.

Comment est née l’idée de ce livre ?
J’avais ces textes qui n’avaient pas encore été publiés et je pensais honorer la mémoire de Chiara Lubich pour l’année du centenaire de sa naissance et, en même temps, rendre un service à tous les membres du mouvement des Focolari. Depuis que j’ai commencé, il y a plusieurs années, à utiliser cette expression, « le génie ecclésial de Chiara », j’ai vu que beaucoup l’aimaient, c’est-à-dire qu’ils y voyaient une idée simple qui pouvait résumer la merveilleuse unité et la synergie entre la personne de Chiara et son charisme. Je suis convaincu que Chiara, en plus d’avoir été dotée par Dieu d’un « génie ecclésial », l’a assurément incarné, à la suite de tous ceux qu’il y a eu dans l’Église et qui ont ouvert de nouveaux horizons, toujours insérés dans la tradition qui remonte à Jésus lui-même. Il était juste de l’approfondir en ce Centenaire.

Comme vous l’avez vous-même expliqué à plusieurs reprises, le mouvement des Focolari, après sa phase charismatique, est entré dans sa phase historique, celle que vous avez définie comme « fidélité créatrice ». Il s’agit donc de la phase où les prophéties de Chiara s’incarnent dans l’histoire. Selon vous, quelle est la principale contribution que le mouvement des Focolari peut apporter aujourd’hui à la réalisation de ces prophéties dans la sphère ecclésiale, dans son cheminement vers l’ut omnes (‘que tous soient un’, Jean 17, 21) ?
[…] Il ne fait aucun doute que la question de l’incarnation du Charisme de l’unité revêt aujourd’hui une importance et une urgence particulières. La fidélité créatrice s’exerce toujours en gardant à l’esprit deux principes : l’écoute des questions que Dieu pose dans le monde, l’écoute de ce que Dieu continue à dire dans le noyau fondateur du charisme. À mon avis, une des questions que Dieu pose à l’Église qui marche dans l’histoire du monde est ce qu’en un mot, on pourrait appeler la « synodalité », avec tout ce qui l’accompagne : ouverture, communication, proximité, attention à la dignité de la personne, en particulier des plus vulnérables. Le Mouvement des Focolari contribue à ce cheminement ecclésial avec un accent tout particulier, qui vient du cœur du charisme, c’est-à-dire de l’expérience vitale et incarnée du Dieu trinitaire qui se fait histoire, sans laquelle la synodalité se réduit à une nouvelle organisation privée de la vie de l’Esprit.

Et quels sont les aspects de l’incarnation de ces prophéties pour lesquelles il reste encore un long chemin à parcourir ?
Je pense que pour être à la hauteur de notre véritable vocation dans l’Église, les membres du Mouvement doivent croître dans ce qu’on appelle le sensus ecclesiae (le sens de l’Église). Celui-ci ne fait pas défaut, mais il doit grandir, ce qui signifie pour nous surmonter définitivement tout comportement autoréférentiel et atteindre la maturité que les derniers papes nous ont souhaitée. Par ailleurs, nous devons dépasser tout dualisme entre engagement civil et engagement ecclésial, en regardant le modèle que nous avons toujours devant nous en tant que chrétiens : Jésus, Dieu fait homme, vraiment homme et vraiment Dieu.

Que souhaitez-vous dire, à cœur ouvert, à la lumière également des réflexions que vous proposez dans votre texte, à l’approche de la fin de ces six années de coprésidence du mouvement des Focolari ?
Je prie pour que Dieu nous donne les grâces nécessaires pour actualiser le charisme de Chiara Lubich de manière vitale et radicale. Je pense qu’il faut renaître, à partir du cœur du charisme, et de là mettre en route les réformes nécessaires pour que le Mouvement, également en tant qu’institution, reflète de mieux en mieux la vie tout à la fois humaine et divine qui l’anime. Et cette renaissance signifie purification, conversion.

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